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21 décembre 2022 : InSight, clap de fin…

 

     Après 4 ans à la surface de la planète Mars, la sonde InSight voit sa mission se terminer le 21 décembre 2022[1]. En cause : des panneaux solaires pleins de poussière, donc incapables de fournir assez d’énergie à la sonde…

     Munie d’un sismomètre, InSight a permis de mieux connaître l’intérieur de Mars. Notamment l’épaisseur de sa croûte (24 à 72 km), la profondeur et le rayon de son noyau (respectivement 1 560 et 1 830 km) et l’uniformité probable de son manteau[2].

     L’instrument HP3 n’a quant à lui pas pu être déployé correctement. Impossible donc de mesurer la quantité de chaleur dégagée par l’intérieur de Mars[3]

     InSight a donc été un succès. Y aura-t-il d’autres sismomètres posés sur Mars à l’avenir ?

 

 

Notes et références

[1] Source : « La sonde InSight mise à la retraite après 4 ans à écouter les entrailles de Mars », Sciences et Avenir, 21 décembre 2022. Disponible à cette adresse : https://www.sciencesetavenir.fr/espace/systeme-solaire/la-sonde-insight-mise-a-la-retraite-apres-4-ans-a-ecouter-les-entrailles-de-mars_168477

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la sonde InSight. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/InSight#Résultats_scientifiques

[3] Pour rappel, voir l’article de ce blog consacré à InSight : « 26 novembre 2018 : atterrissage d’InSight sur Mars », publié le 30 novembre 2018 et toujours disponible à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/11/26-novembre-2018-atterrissage-insight-mars.html


Le point sur … le dôme de chaleur en Amérique du Nord

Dôme chaleur

        Depuis quelques jours, l’ouest des États-Unis et du Canada suffoque sous un « dôme de chaleur », avec des températures qui frôlent parfois les 50°C[1]. Peu commun pour ces régions au climat proche de celui de l’Europe de l’Ouest, et davantage habituées à une agréable douceur en cette saison.

        Des températures très élevées, sur une durée très (trop) longue … Voilà qui ressemble aux canicules qui frappent l’Europe de plus en plus fréquemment.

        À quel point les deux phénomènes sont-ils semblables ?

 

À l’origine des vagues de chaleur

        Comme les canicules européennes, le dôme de chaleur américain est provoqué par le blocage d’une masse d’air chaud. La situation météorologique est assez proche de celle qui a provoqué la canicule de juin 2019 (évoquée sur ce blog). Je te conseille donc, chère lectrice, cher lecteur, de lire (ou relire) l’article écrit à cette occasion[2].

        En remplaçant l’Europe de l’Ouest par l’ouest de l’Amérique du Nord, on obtient une description de la situation actuelle. Une situation qui devrait s’améliorer dès que la masse d’air chaud pourra à nouveau se déplacer …

 

Bientôt une vague de chaleur similaire en Europe ?

        A priori, ceci n’a rien d’impossible ! Le climat étant plus chaud qu’en 2003 (année d’une canicule semblable en Europe), rien n’empêche le thermomètre d’atteindre de telles températures sur le continent (et pas qu’en Andalousie). La seule interrogation serait plutôt quand cela va se produire[3] …

 

        Et sinon, la lutte contre le réchauffement climatique, ça avance ?

 

 

Notes et références

[1] Source : « 47,9°C près de Vancouver, 46,1°C à Portland… C’est quoi le « dôme de chaleur » qui touche le Canada et les Etats-Unis ? », 20 Minutes, 30 juin 2021. Très complet sur le sujet, donc il est intéressant d’y jeter un coup d’œil … Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/planete/3074279-20210630-479-pres-vancouver-461-portland-quoi-dome-chaleur-touche-canada-etats-unis

[2] « Europe : une semaine de canicule », 28 juin 2019. Disponible dans les archives de juin 2019 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/06/europe-une-semaine-de-canicule.html

[3] Source : article de 20 Minutes cité précédemment.


Le point sur … les semi-conducteurs

Puce électronique

        Un composant vous manque, et toutes les usines sont à l’arrêt ! La pénurie de semi-conducteurs a entraîné des perturbations dans des secteurs divers et variés, comme les cartes graphiques ou l’automobile. Et elle risque de durer encore un bon moment[1].

        Mais c’est quoi au juste, les semi-conducteurs ?

        C’est parti pour un petit voyage dans le monde de l’électronique …

 

Semi-conducteur : définition

        Essayons de faire simple. Les notions de bandes d’énergie et de bande interdite (aussi appelée par son nom anglophone gap) seront donc laissées de côté ici.

        Un semi-conducteur est un matériau solide dont la conductivité (c’est-à-dire la capacité à laisser passer les charges électriques) est intermédiaire entre celle des conducteurs et celle des isolants.

        Les conducteurs (comme les métaux) contiennent beaucoup d’électrons libres, ce qui leur permet de laisser passer le courant électrique (qui est un flux d’électrons) facilement. Par contre, chez les isolants, les électrons sont tous « occupés » à former des liaisons chimiques, ce qui les rend indisponibles : le courant électrique ne peut pas traverser ces matériaux. Si un isolant présente des impuretés ou des défauts, des électrons deviennent disponibles et il peut laisser passer le courant : il devient semi-conducteur[2].

 

Semi-conducteurs et dopage

        Attention, le dopage évoqué ici n’a rien à voir avec la tricherie sportive !

        Doper un semi-conducteur consiste à y introduire des « impuretés » pour contrôler ses propriétés électriques. Il existe deux solutions : augmenter la densité en électrons, ou au contraire la réduire[3].

        Prenons l’exemple du semi-conducteur le plus utilisé, le silicium. Cet élément chimique possède 4 électrons sur sa couche électronique externe, comme le montre le schéma suivant :

Eléments B Si P     Couches électroniques des atomes de bore (B), de silicium (Si) et de phosphore (P). Les électrons sont représentés en rouge, les noyaux sont simplifiés au centre.

        Pour augmenter la densité en électrons, il suffit de remplacer des atomes de silicium par des atomes de phosphore (ou d’arsenic, ou encore d’antimoine), qui eux présentent 5 électrons sur leur couche externe. Chaque atome de phosphore présente un électron qui ne participe pas aux liaisons chimiques avec les atomes de silicium voisins, ce qui le rend disponible pour faire circuler le courant électrique. C’est un exemple de ce qu’on appelle le « dopage de type N ».

        Pour réduire la densité en électrons, on applique le même principe, mais en remplaçant des atomes de silicium par des atomes de bore, avec 3 électrons sur leur couche externe. Chaque atome de bore ne peut former de liaisons chimiques qu’avec 3 atomes de silicium, au lieu de 4 pour un atome de silicium, ce qui crée un « trou » dans lequel un électron peut venir se loger (ce qui déplace le trou). C’est un exemple de ce qu’on appelle le « dopage de type P ».

 

Applications

        En mettant en contact un semi-conducteur dopé P avec un semi-conducteur dopé N, on crée une « jonction P-N ».

        En appliquant une tension positive du côté dopé P, on provoque un déplacement des trous (côté P) et des électrons libres (côté N) vers la zone de contact, et le courant électrique passe. En appliquant la même tension du côté dopé N, les trous et les électrons libres s’éloignent de la zone de contact, ce qui bloque le passage du courant électrique. C’est le principe de fonctionnement des diodes, qui sont des jonctions P-N équipées de contacts métalliques, et qui ne laissent passer le courant électrique que si elles sont branchées dans le bon sens.

        Lorsque des électrons se recombinent avec des trous, des photons sont émis. On obtient alors une diode électroluminescente (aussi connue sous son sigle DEL, ou sa forme anglophone LED). Les photons émis ne le sont pas forcément dans le domaine de la lumière visible, ils peuvent l’être dans l’infrarouge ou l’ultraviolet, par exemple.

Schéma DEL    Schéma d’une diode électroluminescente (DEL). En haut : vue de dessus ; au milieu : vue de profil ; en bas : symbole. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:LED_diagrams#/media/File:+-_of_Led.png). Domaine public.

        En jouant sur le dopage et sur les types de jonctions, on obtient toute une gamme de composants électroniques, dont les transistors[4].

        À l’inverse des DELs, les cellules photoélectriques (à la base des panneaux solaires), elles aussi constituées de semi-conducteurs, convertissent les photons de la lumière solaire en électricité, grâce à l’effet photoélectrique.

 

        Composants électroniques, panneaux solaires … Les semi-conducteurs sont aujourd’hui presque partout ! Et ils ne sont pas toujours faciles à remplacer.

        De quoi réfléchir à des solutions pour remédier à la pénurie …

 

 

Notes et références

[1] Source : « Comment la pénurie de semi-conducteurs menace la production de voitures en France », Europe 1, 21 avril 2021. Disponible à cette adresse : https://www.europe1.fr/economie/comment-la-penurie-de-semi-conducteurs-ralentit-la-production-de-voitures-en-france-4039969

[2] Source : article de la version en ligne de l’encyclopédie Universalis consacré aux semi-conducteurs. Disponible à cette adresse : https://www.universalis.fr/encyclopedie/semiconducteurs/

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux semi-conducteurs. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Semi-conducteur

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux semi-conducteurs, section « Jonction P-N ». Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Semi-conducteur#Jonction_P-N


Mars : premier vol de l’hélicoptère Ingenuity

Après des mois confiné dans sa soute, Ingenuity prend son envol.Envol       

        Arrivé sur Mars le 18 février 2021, le robot Perseverance n’a pas tardé à tester les prototypes qu’il embarque.

        L’expérience MOXIE a ainsi permis la production de dioxygène (O2) à partir du dioxyde de carbone (CO2) qui constitue 96% de l’atmosphère martienne. Une « première » qui ouvre la perspective de produire ledit dioxygène sur place au cours d’une mission martienne, au lieu de devoir l’importer depuis la Terre (ce qui allègerait substantiellement la charge à propulser dans l’espace). La réaction chimique (notée ainsi : 2 CO2 → 2 CO + O2) nécessite toutefois une température de 800°C et des oxydes métalliques, et produit du monoxyde de carbone en plus du dioxygène.

       

        Mais la « première » dont il sera question ici est le vol de l’hélicoptère Ingenuity, un appareil à l’allure de jouet (mais qui est très loin d’en être un !).

        Cette machine n’est pas la première à voler sur une autre planète : le ballon-sonde largué dans l’atmosphère de Vénus par la sonde soviétique Vega 1 l’a déjà fait avant elle, en 1985.

        Le principe du vol est de « s’appuyer » sur l’air, soit en exploitant le principe d’Archimède (pour les engins plus légers que l’air), soit en utilisant la portance (pour les plus lourds que l’air) (cf. l’article « 10 mars 2019 : crash du vol 302 Ethiopian Airlines » publié sur ce blog[1]).

        Le ballon-sonde soviétique était rempli d’hélium et flottait dans l’atmosphère vénusienne, à une altitude où la température et la pression sont assez proches de celles de l’atmosphère terrestre[2].

        Ingenuity est quant à lui un hélicoptère (donc un « plus lourd que l’air ») qui vole dans la très ténue atmosphère martienne (à la pression d’environ 0,006 bar). Ce qui est autrement plus difficile …Ingenuity    L’hélicoptère Ingenuity. Source de l’image : https://photojournal.jpl.nasa.gov/jpeg/PIA23882.jpg

        La machine a pour particularité d’utiliser 2 rotors contrarotatifs[3] et coaxiaux[4], ce qui supprime l’effet de couple et permet de se passer de rotor de queue (d’où une taille réduite et une masse moindre pour l’engin). Pour pouvoir être efficace dans le très peu dense air martien, la vitesse de rotation est comprise entre 2 400 et 2 900 tours par minute, soit une dizaine de fois celle du rotor principal d’un hélicoptère utilisé sur Terre. Les rotors sont construits en fibre de carbone et mesurent 1,21 m de diamètre.

        Ingenuity est équipé de batteries, alimentées par des panneaux solaires (situés au-dessus des rotors). Ces batteries fournissent l’énergie nécessaire à la propulsion, mais également à un altimètre, des caméras, l’avionique, un système de communication et des résistances chauffantes (pour préserver l’appareil du froid de la nuit martienne. L’ensemble de la machine pèse 1,8 kg[5].

 

        Ingenuity doit effectuer 5 vols de test. Il sera ensuite laissé sur place par Perseverance, qui entamera son exploration du cratère Jezero.

        D’autres hélicoptères sont à l’étude pour explorer Mars. La mission Dragonfly, dont le lancement est prévu en 2027, enverra quant à elle un hélicoptère de 450 kg voler sur la lune Titan (bien aidé par une gravité 7 fois moindre que celle de la Terre et une atmosphère beaucoup plus épaisse)[6].

        Même s’il ressemble à un gros joujou, Ingenuity est donc un véritable précurseur en matière d’exploration spatiale. Et aucun jouet ne peut en dire autant !

 

Notes et références

[1] « 10 mars 2019 : crash du vol 302 Ethiopian Airlines », publié le 15 mars 2019. Disponible dans les archives de mars 2019 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/03/10-mars-2019-crash-du-vol-302-ethiopian-airlines.html

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux sondes spatiales Vega. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vega_(sonde_spatiale)

[3] Qui tournent en sens inverse.

[4] Leurs axes sont concentriques.

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Ingenuity. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ingenuity_(hélicoptère)

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la mission Dragonfly. Disponible à cette adresse :  https://fr.wikipedia.org/wiki/Dragonfly_(sonde_spatiale)


La fin du changement d’heure remise aux calendes grecques

        Le passage à l’heure d’été du 28 mars 2021 aurait normalement dû être le dernier changement d’heure. Le sujet avait été abordé dans ce blog en 2019[1].

        Ce ne sera très probablement pas le cas. Les discussions pour « harmoniser » les fuseaux horaires à l’échelle européenne ont été interrompues par la pandémie de CoViD-19[2].

        Encore un peu de patience, donc, avant d’arrêter de jongler entre l’heure d’été et l’heure d’hiver …

 

 

Notes et références

[1] « 31 mars 2019 : changement d’heure, le der des ders ? », publié le 29 mars 2019. Disponible dans les archives de mars 2019 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/03/31-mars-2019-changement-d-heure.html

[2] Source : « Pourquoi ce ne sera pas le dernier changement d’heure », Le Point, 27 mars 2021. Disponible à cette adresse : https://www.lepoint.fr/societe/pourquoi-ce-ne-sera-pas-le-dernier-changement-d-heure-27-03-2021-2419624_23.php


Mars : bien arrivées à destination

        Au cours du mois de juillet 2020, 3 sondes spatiales sont parties en direction de la planète Mars. Ces départs ont été évoqués dans ce blog[1].

        Les 3 sont bien arrivées à destination. Mars Hope s’est mise en orbite autour de la Planète rouge le 9 février[2]. Tianwen-1 a fait de même le lendemain, en attendant de larguer son atterrisseur au printemps[3]. Quant au robot Perseverance, il a bien été déposé dans le cratère Jezero. Atterrissage particulièrement « sophistiqué »[4], mais réussi …

        Explorations à suivre !

 

 

Notes et références

[1] « 15-31 juillet 2020 : le Système solaire sous les projecteurs », disponible dans les archives de juillet 2020 du blog, ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2020/07/juillet-2020-systeme-solaire.html

[2] Source : «  La sonde Hope des Emirats arabes unis se place en orbite autour de Mars », France Info, 9 février 2021. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/sciences/mars-curiosity/la-sonde-hope-des-emirats-arabes-unis-se-place-en-orbite-autour-de-mars_4290313.html

[3] Source : « Mise en orbite réussie autour de Mars pour la sonde chinoise Tianwen-1 », Le Monde, 10 février 2021. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/sciences/article/2021/02/10/mars-mise-en-orbite-reussie-pour-la-sonde-chinoise-tianwen-1_6069480_1650684.html

[4] Pour te rendre compte du degré de complexité de cet atterrissage, je te suggère, chère lectrice, cher lecteur, de lire cet article : « Atterrissage de Perseverance sur Mars ce jeudi : pourquoi la Nasa parle de « 7 minutes de terreur » », Ouest France, 18 février 2021. Disponible à cette adresse : https://www.ouest-france.fr/sciences/espace/mars/atterrissage-de-perseverance-sur-mars-pourquoi-la-nasa-parle-de-sept-minutes-de-terreur-7158737


5 décembre 2020 : retour des échantillons d’Hayabusa 2

        Il n’y a pas qu’Amazon qui livre des colis sur Terre en ce moment ! Déjà évoquée à 2 reprises sur ce blog[1], la sonde japonaise Hayabusa 2 a largué les échantillons qu’elle a prélevés sur l’astéroïde (162173) Ryugu. Ces derniers ont atterri en Australie le 5 décembre 2020 et ont été récupérés avec succès[2].

        Toujours en bon état et ses réserves de « carburant »[3] encore à moitié pleines, la sonde a désormais une nouvelle mission : aller observer l’astéroïde 1998 KY26[4]. Rendez-vous prévu pour juillet 2031[5] …

 

Notes et références

[1] « 11 juillet 2019 : Hayabusa 2 récolte de nouveaux échantillons », disponible à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/07/11-juillet-2019-hayabusa-2-nouveaux-echantillons.html ; « 21 septembre et 3 octobre 2018 : on a atterri sur un astéroïde », disponible à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/10/21-septembre-3-octobre-2018-atterrissage-asteroide.html

[2] Source : « La sonde japonaise Hayabusa-2 a rapporté des échantillons d’astéroïde sur Terre », Le Monde, 5 décembre 2020. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/12/05/la-sonde-japonaise-hayabusa-2-envoie-sur-terre-des-echantillons-d-asteroide_6062323_1650684.html

[3] Mot mis entre guillemets, car le moteur de la sonde ne brûle pas de carburant comme un moteur chimique. Il s’agit d’un moteur ionique, qui arrache des électrons à des atomes de xénon et les éjecte à grande vitesse à l’aide d’un champ électromagnétique.

[4] Quel joli nom !

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la sonde Hayabusa 2, section « Suite de la mission : Hayabusa 2 extended ». Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Hayabusa_2#Suite_de_la_mission_:_Hayabusa_2_extended


18 septembre 2020 : le medicane Ianos touche terre en Grèce

Ianos_satellite    Le medicane Ianos, vu par un satellite météo. Source de l’image : Météo France.

        Une ribambelle de nuages en spirale … Un œil au centre … Des vents violents et de fortes pluies … Voilà qui ressemble fortement à un cyclone tropical (dont le nom est très souvent abrégé en « cyclone » tout court) ! Sauf que cette fois-ci, le tout se trouve en pleine mer Méditerranée. Et Ianos (c’est son petit nom) ne frappe pas la Floride ou la Louisiane, mais la Grèce.

        Mais au fait, Ianos est-il vraiment un cyclone ? Comment se forme un cyclone ? Le phénomène est-il si exceptionnel en mer Méditerranée ?

        Gardons la tête froide et répondons à ces questions d’un point de vue scientifique.

 

Vous avez dit « medicane » ?

        Ianos est le dernier représentant en date d’un phénomène météorologique appelé « medicane ». Ce terme d’origine anglophone est issu de la contraction de mediterranean hurricane (littéralement « ouragan méditerranéen »). En français, on parle plutôt de « cyclone subtropical méditerranéen ».

        S’il ressemble fortement à un cyclone par son aspect (la photo de Ianos en tête de l’article est assez parlante), un medicane n’en est pas un. Il en diffère par sa formation.

        Un medicane est issu de la descente en surface d’une masse d’air froid initialement située en altitude. Cette descente d’air froid lance un mouvement de convection[1], ce qui forme une dépression.

        En fin d’été, l’eau située sous la masse d’air froid est encore très chaude. Elle va alimenter le système en chaleur et en humidité. Les vents se renforcent, des bandes nuageuses se forment et s’enroulent progressivement autour du centre de la dépression[2]. Les vents violents et les fortes pluies qui accompagnent le phénomène font eux aussi penser à un cyclone tropical.

 

Medicane cyclone

        La ressemblance avec un cyclone tropical s’arrête là.

        Un cyclone tropical (qui peut également être appelé ouragan ou typhon, selon les régions) se forme dans des conditions bien différentes. Il a besoin d’une eau à température élevée sur 60 mètres de profondeur (ce qui correspond à une température de surface de 28 à 29°C), dans des régions tropicales (au niveau desquelles il est impossible de rencontrer des masses d’air froid). Ces conditions sont réunies à la fin de l’été[3].

Zones cyclones    Zones de formation des cyclones (en orange) et trajectoires typiques (flèches blanches). Traduction : « equator » = équateur, « hurricanes » = ouragans, « cyclones » = cyclones, « typhoons » = typhons. Source : https://spaceplace.nasa.gov/hurricanes/en/

        La température élevée de l’eau provoque son évaporation. C’est cette évaporation qui fournit l’énergie du cyclone. Le mouvement tourbillonaire du cyclone est quant à lui dû à la force de Coriolis, qui dévie les vents vers la droite dans l’hémisphère nord et vers la gauche dans l’hémisphère sud. Cette force est nulle à l’équateur, et insuffisante en-dessous de 5° de latitude, ce qui explique l’absence de cyclones dans les zones proches de l’équateur. Enfin, les vents doivent être suffisamment homogènes en force et en direction jusqu’à environ 15 km d’altitude. Si cette condition n’est pas respectée, l’énergie se disperse et le système va se « cisailler » au lieu d’évoluer en cyclone[4].

        Le cyclone perd de sa force dans plusieurs cas :

  • s’il passe sur des terres ou sur des eaux plus froides, ce qui le prive de « carburant » ;
  • s’il rencontre des vents pas assez homogènes, il subit un effet de cisaillement vertical qui déforme sa structure ;
  • s’il s’approche trop de l’équateur, la force de Coriolis devient insuffisante.

        Certains cyclones en fin de vie peuvent être « happés » par la circulation atmosphérique des latitudes moyennes et se transformer en violentes tempêtes. Certains ex-ouragans peuvent ainsi venir frapper l’Europe[5].

 

Des medicanes de plus en plus fréquents ?

        Les medicanes ne sont pas nouveaux. Jusqu’en 2015, il y en avait un environ tous les 2 à 5 ans. Depuis 2016, il s’en forme un chaque automne.

        Cependant, le faible nombre de medicanes et l’absence d’une base de référence rendent difficile la constitution de statistiques. Le manque de recul empêche également de faire un lien avec le réchauffement climatique[6].

        À suivre …

 

 

Notes et références

[1] Convection : transfert de chaleur par déplacement de matière. La matière chaude monte, la matière froide descend.

[2] Source : « Le medicane Ianos frappe la Grèce », Météo France, 18 septembre 2020. Disponible à cette adresse : https://meteofrance.com/actualites-et-dossiers/actualites/le-medicane-ianos-frappe-la-grece

[3] Source : dossier « Les cyclones », Météo France. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/phenomenes-meteo/les-cyclones

[4] Source : dossier de Futura Sciences sur les cyclones, p. 4 sur 6, « Vie d’un cyclone ». Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/dossiers/climatologie-cyclone-ouragan-typhon-sont-ils-573/page/4/

[5] Source : dossier de Météo France cité précédemment.

[6] Source : article de Météo France cité précédemment.


De la vie sur Vénus ?

Molécule de phosphine

    La molécule de phosphine. Source de l’image : 3DChem.com (http://www.3dchem.com/inorganicmolecule.asp?id=543)

 

        La nouvelle s’est propagée très rapidement le 14 septembre 2020 : de la phosphine a été découverte sur la planète Vénus[1] ! Comme ce gaz n’est produit sur Terre que par le vivant (ou par l’industrie chimique humaine[2]), certains médias se sont vite montrés un peu trop optimistes : et si Vénus abritait de la vie ?

        Tempérons cet excès d'optimisme.

        La phosphine existe également sur les planètes Jupiter et Saturne, sur lesquelles sa production n’a rien à voir avec le vivant : la pression en profondeur force les atomes de phosphore et d’hydrogène qui la constituent à se lier, avant que des courants ascendants ne forcent les molécules ne les fassent remonter vers le haut de l’atmosphère[2].

        En ce qui concerne la planète Vénus, sa surface semble peu propice à l’existence du vivant, avec plus de 90 bar de pression et des températures qui dépassent les 450 °C de jour comme de nuit. Au niveau des nuages, vers 50 km d’altitude, les conditions de température et de pression sont beaucoup plus proches de celles rencontrées sur Terre[3]… mais avec des gouttelettes d’acide sulfurique concentré en plus ! Ceci dit, certains organismes terrestres dits « acidophiles » survivent dans des environnements au pH de 1, voire 0 (exemple : Picrophilus torridus[4]).

        Enfin, les auteurs eux-mêmes restent prudents, et n’excluent pas une origine non liée au vivant[5]. Sources volcaniques, foudre, micrométéorites, réactions chimiques atmosphériques ou processus encore inconnu ? Le mieux pour trancher la question serait d’envoyer une sonde sur place.

        À suivre …

 

 

Notes et références

[1] Source (en anglais) : Jane S. Greaves, Anita M. S. Richards, William Bains, Paul B. Rimmer, Hideo Sagawa, David L. Clements, Sara Seager, Janusz J. Petkowski, Clara Sousa-Silva, Sukrit Ranjan, Emily Drabek-Maunder, Helen J. Fraser, Annabel Cartwright, Ingo Mueller-Wodarg, Zhuchang Zhan, Per Friberg, Iain Coulson, E’lisa Lee & Jim Hoge, « Phosphine gas in the cloud decks of Venus », Nature Astronomy, 14 septembre 2020. Disponible à cette adresse : https://www.nature.com/articles/s41550-020-1174-4

[2] En tant que pesticide, en raison de son caractère toxique.

[3] Source : « Phosphine et vie sur Vénus : un emballement prématuré », Pour la science, 17 septembre 2020. Disponible à cette adresse : https://www.pourlascience.fr/sd/exobiologie/phosphine-et-vie-sur-venus-un-emballement-premature-20088.php

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’atmosphère de Vénus. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Atmosphère_de_Vénus#Troposphère

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’archée Picrophilus torridus. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Picrophilus_torridus

[6] Source : « Un gaz associé à la vie découvert dans les nuages de Vénus », Science et Avenir, 14 septembre 2020. Disponible à cette adresse : https://www.sciencesetavenir.fr/espace/systeme-solaire/un-gaz-associe-a-la-vie-decouvert-sur-venus_147383


Le point sur … le déclin de la faune sauvage

        La version 2020 du rapport « Planète Vivante » du WWF[1] est arrivée le 10 septembre 2020. Et elle n’annonce pas de bonnes nouvelles : plus des deux tiers des effectifs des vertébrés terrestres ont disparu depuis 1970[2].

        Faisons donc un point sur le déclin de la faune sauvage.

 

Faune sauvage : définition

        La faune sauvage est l’ensemble des animaux non domestiqués. Sont donc exclus les humains, les animaux d’élevage et les animaux de compagnie.

        Avant d’aller plus loin dans cet article, précisons que le rapport du WWF ne concerne que les vertébrés : mammifères, poissons, amphibiens et reptiles[3]. Pas un mot donc sur les invertébrés comme les méduses, les insectes, les gastéropodes … bref sur les animaux dépourvus de squelette interne, ni sur les plantes.

 

Un déclin généralisé

        D’après le rapport, la population de vertébrés sauvages a diminué de 68 % en 50 ans.

        Et ce ne sont pas les seuls animaux concernés : les arthropodes (qui comprennent les insectes, les arachnides[4], les crustacés et les myriapodes[5]) subissent également de très lourdes pertes (au moins sur les continents européen et nord-américain)[6],[7]. Une étude menée en Allemagne a observé une baisse des effectifs de 67 % dans les prairies et de 41 % dans les forêts pour la seule décennie 2010. Près d’1 espèce d’invertébrés sur 5 serait menacée de disparition[8]. Les insectes pourraient même disparaître d’ici un siècle, alors qu’ils ont survécu à toutes les extinctions de masse précédentes.

        Un article publié dans la revue scientifique Pnas[9] donne un petit aperçu du caractère envahissant et étouffant d’Homo sapiens (pas si sage que ce nom scientifique le sous-entend, il va peut-être falloir le rebaptiser …). Avant l’apparition de l’être humain moderne, les mammifères sauvages représentaient environ 40 millions de tonnes de carbone. Ils n’en représentent plus qu’environ 7 millions aujourd’hui. Les humains, au départ peu nombreux, sont quant à eux désormais environ 8 milliards et représentent 60 millions de tonnes de carbone, sans parler de leurs animaux domestiques et d’élevage, qui en représentent plus de 100 millions. Autrefois archi dominants, les mammifères sauvages ne représentent donc plus que 4 % de la masse totale des mammifères[10] !

Répartition biomasse    Estimation de la répartition actuelle de la biomasse sur Terre, d’après l’article « The biomass distribution on Earth ». Masses exprimées en milliards de tonnes de carbone (Gt C). Traduction pour les non anglophones : archea = archées[11], viruses = virus[12], bacteria = bactéries, protists = protistes[13], fungi = champignons, animals = animaux, plants = plantes, arthropods = arthropodes, molluscs = mollusques[14], nematods = nématodes[15], annelids = annélides[16], wild birds = oiseaux sauvages, fish = poissons, wild mammals = mammifères sauvages, cnidarians = cnidaires[17], livestock = bétail, humans = humains.

 

Les causes du déclin

        Les causes de ce déclin sont multiples : destruction des habitats des animaux (le plus souvent au profit des surfaces agricoles, comme en Amazonie), surexploitation des espèces (exemple : la surpêche), pollutions en tous genres (pollution de l’eau, pollution de l’air, pollution lumineuse …), intoduction par les humains d’espèces invasives (exemple : le frelon asiatique, qui attaque les abeilles) ou encore réchauffement climatique[18]. Bref, des conséquences uniquement liées à l’humanité et à son mode de vie actuellement dominant, fondé sur la surconsommation irresponsable et qui ne s’embarrasse pas de ses conséquences sur l’environnement.

        Une autre cause, plus « psychologique », peut également être citée : l’intolérance d’une grande partie des humains vis-à-vis de tout qui échappe à leur contrôle[19]. Une intolérance particulièrement ancrée dans certaines cultures, notamment celle dite « occidentale ».

 

Les conséquences du déclin

        L’importance de la biodiversité a déjà été évoquée sur ce blog[20].

        Lorsqu’elle est « en bonne santé », la biodiversité rend nombre de services dits « écosystémiques » : pollinisation de plantes à fleurs par les insectes, fertilisation et aération des sols par les lombrics, construction de barrières coralliennes protectrices … La « valeur » estimée des services rendus gratuitement par la nature est astronomique : 125 000 milliards de dollars par an (1,5 fois le produit intérieur brut mondial)[21] ! Une somme que nous n’avons pas à débourser pour l’instant, mais qu’il faudra dépenser si les humains doivent assumer ces tâches à la place d’une nature trop affaiblie.

Microchaeta    Illustration (probable) de la plus grande espèce de ver de terre, Microchaetus rappi, tirée du volume 12 des Transactions of the Zoological Society of London.  Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Oligochaeta#/media/File:Microchaeta.jpg). Les vers de terre ne sont pas aussi charismatiques que le panda ou l’éléphant, mais ils sont indispensables au bon fonctionnement des écosystèmes.

        Autre conséquence du déclin du monde sauvage, qui est particulièrement en phase avec l’actualité : la transmission aux humains de maladies émergentes. Dans un habitat de plus en plus restreint, les animaux sont de plus en plus entassés, moins nombreux et les espèces sont moins diversifiées, ce qui les plus vulnérables aux maladies. La plus grande proximité avec les humains facilite également la transmission de nouveaux virus à Homo sapiens. Le phénomène est bien expliqué dans cette vidéo que je t’invite à découvrir :  « La biodiversité, un rempart contre les épidémies ? » (disponible à cette adresse : https://www.lumni.fr/video/la-biodiversite-un-rempart-contre-les-epidemies). L’actuelle pandémie de CoViD-19 est donc une conséquence particulièrement marquante de l’effondrement de la biodiversité.

 

Comment remédier à la situation ?

        Il n’y a pas une solution, mais plusieurs. Et tout le monde doit participer[22].

        Une solution consiste à augmenter la taille des aires protégées. Il faut également une protection efficace, qui n’est d’ailleurs pas forcément incompatible avec la présence humaine.

        Le problème étant en grande partie lié au mode de consommation actuel, tu peux également, chère lectrice, cher lecteur, apporter ta propre contribution en réduisant ton « empreinte écologique ». Alimentation, déplacements, limitation des gaspillages … les moyens d’agir sont nombreux. À toi de jouer !

 

 

Notes et références

[1] WWF : World Wide Fund For Nature, auparavant World Wildlife Fund (Fonds mondial pour la nature).

[2] Source : rapport Planète Vivante 2020, WWF, 10 septembre 2020. Synthèse et version complète disponibles à cette adresse : https://www.wwf.fr/rapport-planete-vivante

[3] Et les oiseaux ? Ce sont des reptiles à plumes. Ils sont donc inclus dans la liste, même s’ils ne sont pas nommés à part.

[4] Arachnides : araignées, scorpions et acariens (entre autres).

[5] Plus connus sous le nom de « mille-pattes ».

[6] Source : « La disparition des insectes se confirme », Libération, publié le 15 novembre 2019, mis à jour le 17 novembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/sciences/2019/11/15/la-disparition-des-insectes-se-confirme_1762915

[7] Source : « Extinction de masse : les insectes disparaissent à une vitesse alarmante », National Geographic. Disponible à cette adresse : https://www.nationalgeographic.fr/environment/extinction-de-masse-les-insectes-disparaissent-une-vitesse-alarmante

[8] Source : « Biodiversité : près d’un invertébré sur cinq menacé d’extinction », Futura Sciences, publié le 3 septembre 2012, modifié le 1er janvier 2020. Disponible à cette adresse :  https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/zoologie-biodiversite-pres-invertebre-cinq-menace-extinction-41007/

[9] Yinon M. Bar-on, Rob Phillips et Ron Milo, « The biomass distribution on Earth », publié le 19 juin 2018. Disponible à cette adresse : https://www.pnas.org/content/115/25/6506

[10] Source : « Quand les mammifères sauvages perdent leur place », Libération, 24 décembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/planete/2019/12/24/quand-les-mammiferes-sauvages-perdent-leur-place_1769555

[11] Archées : êtres vivants qui ressemblent à des bactéries, mais qui en diffèrent par de nombreux aspects.

[12] La question de savoir si les virus font partie ou non du monde vivant est encore débattue.

[13] Protistes : ensemble fourre-tout d’organismes constitués de cellules à noyau, mais qui ne sont ni des animaux, ni des champignons, ni des plantes. Exemples : les amibes.

[14] Mollusques : animaux à corps mou, non segmenté, protégé ou non par une coquille. Exemples : les escargots, les seiches, les huîtres …

[15] Nématodes : vers non segmentés, aussi connus sous le nom de « vers ronds ».

[16] Annélides : vers segmentés. Exemple : les lombrics.

[17] Cnidaires : animaux aquatiques, à symétrie radiale et qui utilisent des harpons urticants pour attraper  leurs proies. Exemples : les méduses, les coraux.

[18] Source : « 68% des animaux vertébrés ont disparu depuis 1970, selon le rapport Planète Vivante du WWF », France Info, 10 septembre 2020. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/biodiversite/68-des-animaux-vertebres-ont-disparu-depuis-1970-selon-le-rapport-planete-vivante-du-wwf_4100251.html

[19] Source : article de Libération cité précédemment.

[20] « 29 avril - 4 mai 2019 : la biodiversité au sommet », paru le 3 mai 2019 sur ce blog. Disponible dans les archives de mai 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/05/sommet-biodiversite.html

[21] Source : « La disparition des animaux pourrait remettre en cause nos modes de vie », Le Monde, 30 octobre 2018. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/biodiversite/article/2018/10/30/declin-de-la-faune-sauvage-la-nature-reprend-ses-droits-si-on-lui-en-laisse-le-temps_5376709_1652692.html

[22] Voir l’article du Monde cité précédemment.


15-31 juillet 2020 : le Système solaire sous les projecteurs

        En cette deuxième quinzaine du mois de juillet, le Système solaire se fait une petite place dans les médias.

        Je te propose donc, chère lectrice, cher lecteur, un bref retour sur cette quinzaine scientifique.

 

16 juillet 2020 : les premières images de Solar Orbiter dévoilées

Soleil_Solar Orbiter    Une des premières images du Soleil prises par la sonde Solar Orbiter, dévoilées le 16 juillet 2020. Crédit : Solar Orbiter / EUI / ESA / NASA / AFP. Source : https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/07/16/la-sonde-solar-orbiter-devoile-des-images-inedites-du-soleil-et-de-ses-feux-de-camp_6046411_1650684.html

        Lancée le 10 février 2020, la sonde Solar Orbiter est en route pour son orbite de travail. Ses premières images du Soleil ont été dévoilées le 16 juillet 2020[1].

        Elle se placera en orbite autour du Soleil pour l’étudier, et s’en approchera au maximum à l’équivalent d’un quart de la distance de la Terre à notre étoile, soit environ 37 millions de kilomètre. Elle y recevra alors 20 fois plus d’énergie par mètre carré qu’au niveau de l’orbite terrestre, ce qui rend nécessaire l’utilisation d’un bouclier thermique.

        Un « record » qui va être littéralement pulvérisé par la sonde Parker Solar Probe, qui s’approchera à moins de 6 millions de kilomètres du Soleil, y recevra 510 fois plus d’énergie par mètre carré que notre planète et devra encaisser une température d’environ 1 400°C sur sa face exposée à l’astre du jour. Chaud devant !

 

Destination Mars

        La planète rouge est à l’honneur cette année : pas moins de 3 sondes ont décollé pour lui rendre visite en fin de mois.

        Surprise : la première à partir n’est ni américaine, ni russe, mais émiratie ! Le 20 juillet, les Émirats Arabes Unis se lancent dans l’exploration martienne avec la sonde Mars Hope (aussi appelée Al-Amal). Cette dernière doit se placer en orbite autour de la planète pour étudier son atmosphère[2].

        Elle a été suivie le 23 juillet par la sonde chinoise Tianwen-1. La mission comporte un orbiteur, un atterrisseur et un rover[3]. Mission à haut risque, quand on sait à quel point il est difficile de poser un engin en douceur sur Mars …

        Enfin, les États-Unis ont été les derniers à expédier leur robot à destination de la surface martienne, le 30 juillet. Nommé Perseverance, ce dernier a un programme chargé : tester du matériel qui produit de l’oxygène à partir de l’atmosphère martienne, déposer un mini hélicoptère pour qu’il essaye de voler (dans un « air » à seulement 0,006 bar de pression, c’est pas gagné d’avance), et surtout, prendre des échantillons de sol martien. Ces échantillons seront récupérés et ramenés sur Terre pour être analysés. Précision intéressante : le robot fera sa randonnée dans le cratère Jezero, qui abrite les restes d’un delta et des dépôts lacustres[4]. Un endroit a priori idéal pour abriter la vie, si jamais elle est apparue un jour sur la planète rouge.

Cratère Jezero    À droite : carte géologique du cratère Jezero. Traduction (pour les non anglophones) : volcanic floor = surface volcanique ; delta deposit = dépôts deltaïques ; carbonate basin fill = remplissage carbonaté du bassin ; regional carbonate = formation carbonatée régionale. Ellipse blanche : zone d’atterrissage prévue de Perseverance. À gauche : photo de l’ancien delta présent dans le cratère. Crédit : NASA. Source : Wikipédia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Mars_2020_(mission_spatiale)#/media/Fichier:Mars-2020_rover-selection-site---Jezero-crater.png). Fichier d’origine : http://sites.nationalacademies.org/cs/groups/ssbsite/documents/webpage/ssb_183746.pdf

        

        Si on ajoute à cette liste la comète C/2020 F3 (NEOWISE) qui s’éloigne après nous avoir rendu une belle visite, le Système solaire est à l’honneur en ce moment. Tant mieux, en cette période toujours marquée par la pandémie de CoVid-19, ça ne fait pas de mal de rêver un peu …

 

 

Notes et références

[1] Source : « Des images inédites du Soleil et de ses « feux de camp » », Le Monde, publié le 16 juillet 2020, mis à jour le 17 juillet 2020. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/07/16/la-sonde-solar-orbiter-devoile-des-images-inedites-du-soleil-et-de-ses-feux-de-camp_6046411_1650684.html

[2] Source : « Les Emirats lancent « Al-Amal », la première sonde spatiale arabe en route pour Mars », 20 minutes, 20 juillet 2020. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/monde/2825447-20200720-emirats-lancent-al-amal-premiere-sonde-spatiale-arabe-route-mars

[3] Source : « Avec la mission Tianwen-1, la Chine lance sa première sonde vers Mars », France 24, 23 juillet 2020. Disponible à cette adresse : https://www.france24.com/fr/20200723-avec-la-mission-tianwen-1-la-chine-lance-sa-première-sonde-vers-mars

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la mission Mars 2020. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mars_2020_(mission_spatiale)

 


Dans le ciel en ce moment : C/2020 F3 (NEOWISE)

C-2020-F3-NEOWISE_image réduite    La comète NEOWISE, photographiée le 18 juillet 2020.

 

        Enfin une comète bien visible dans l’hémisphère nord ! Contrairement à C/2020 F8 (SWAN) et C/2019 Y4 (ATLAS), C/2020 F3 (NEOWISE) a survécu à son passage au plus près du Soleil le 3 juillet 2020 et repart vers la banlieue lointaine du Système solaire. Actuellement observable dans les « pattes » de la Grande Ourse, elle passera au plus près de la Terre le 23 juillet 2020. Proximité toute relative : à cette date, les deux astres seront séparés d’environ 103 millions de kilomètres …

        La comète ne devrait pas revenir dans les parages avant environ 6 800 ans, alors profitez du spectacle !


Aviation neutre en carbone : réalisable ou utopique ?

Proposition d’avion neutre en carbone

Avion de papier

        Dans la rubrique « pensons le monde d’après », le gouvernement français a annoncé le 9 juin 2020 miser sur un avion neutre en carbone pour 2035[1].

        L’idée n’est pas mauvaise, surtout quand on sait que le transport aérien pourrait représenter 22 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2050 (si les tendances observées avant la crise liée à la CoViD-19 se prolongent)[2].

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Avion plus « vert » : quelques pistes

        Un avion est un « plus lourd que l’air » qui utilise des ailes et sa vitesse pour voler. Le principe a déjà été abordé sur ce blog[3].

        De nombreuses pistes sont explorées pour réduire les émissions des avions.

        L’une d’elles consiste à réduire la traînée aérodynamique et les turbulences en bouts d’ailes. Une solution radicale pour réduire ces dernières : supprimer les bouts d’ailes ! Exemple avec ce concept d’avion aux ailes dites « rhomboédriques », qui forment un anneau :

Avion aile rhomboédrique    Concept d’avion à ailes rhomboédriques. Source de l’image : https://www.futura-sciences.com/sciences/photos/univers-top-17-avions-futur-688/univers-aile-rhomboedrique-4654/

        Autre idée : augmenter la portance de l’engin, en lui donnant la forme d’une aile volante. Le concept n’est pas nouveau (il date de 1876[4]). Il a été mis en œuvre notamment sur le prototype Horten Ho 229 et sur le bombardier Northrop B-2 Spirit (pour ne citer que les ailes volantes les plus connues). Une variante consiste à intégrer le fuselage de l’avion dans une aile volante, comme pour le prototype Boeing X-48 BWB (pour Blended Wing Body, soit « fuselage intégré dans l’aile »).

NASA_BWB    Le Boeing X-48 BWB. Crédit : NASA. Domaine public. Source de l’image : Wikimédia Commons  (https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_ailes_volantes#/media/Fichier:NASA_BWB.jpg).

        Quelques inconvénients plutôt gênants à noter toutefois : une aile volante est beaucoup plus large qu’un avion « classique » (ce qui lui interdit nombre d’aéroports), résiste moins bien à la pressurisation qu’un fuselage cylindrique et serait plus difficile à évacuer. Et en ce qui concerne les passagers placés loin de l’axe de l’avion, gare au roulis !

        Mais la solution la plus évidente consiste à s’intéresser aux moteurs pour améliorer leur rendement et ainsi les rendre plus économes.

        Cette piste est suivie depuis des années, et les avions les plus récents intègrent des moteurs moins gourmands que ceux des générations précédentes, comme par exemple le LEAP[5]. Une autre possibilité passe par des architectures moins « conventionnelles », à l’image de la soufflante non carénée (aussi appelée propfan ou open rotor) (en développement). Cette technologie utilise des hélices 2 fois plus grandes et situées en dehors de la nacelle, ce qui obligerait alors les constructeurs à placer les moteurs non plus sous les ailes, mais vers l’arrière des avions[6].

Open rotor    Un prototype de moteur à soufflante non carénée, vu de face. Crédit : Éric Drouin / Safran. Source : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/safran-devoile-l-open-rotor-son-moteur-disruptif-pour-les-airbus-et-les-boeing-du-futur-752712.html

        Une autre option pourrait être un retour à l’utilisation d’hélices. Pas forcément avec des moteurs à pistons, mais plutôt avec des turbopropulseurs. Moins gourmands en carburant que les réacteurs, ces moteurs emploient une turbine à gaz pour faire tourner l’hélice. L’Airbus A400M est équipé de turbopropulseurs.

        Ces pistes sont prometteuses, mais elles ne permettent que de réduire les émissions de gaz à effet de serre, pas de les supprimer. Peut-on trouver mieux ?

 

Des solutions plus « vertes » ?

        Les plus lourds que l’air ont besoin d’aller vite pour voler. Un inconvénient que n’ont pas les plus légers que l’air, comme les dirigeables. Ils ne dépensent donc pas de carburant pour se maintenir en l’air. Par contre, ils sont lents et sensibles au vent, au givre et autres tracas météorologiques (la faute à leur énorme volume)[7], et l’hélium a tendance à fuir de l’enveloppe (c’est un gaz constitué de très petits atomes ; et cher en plus …). 

        Certains de ces problèmes pourraient être résolus si le dirigeable était gonflé … de vide ! Plus de fuite de gaz, et une pompe à vide coûte bien moins cher que de l’hélium. Revers de la médaille, il faut construire une structure très solide et très légère à la fois, pour résister à la pression de l’air environnant. Ce qui est désormais réalisable (et actuellement en développement), grâce aux progrès réalisés dans le domaine des matériaux[8]. L’engin peut même être alimenté par des panneaux solaires. Mais il reste désespérément lent …

        Et si on utilisait des moteurs électriques pour propulser un avion ? Après tout, le Solar Impulse 2 a bien déjà fait le tour du monde. Il mesure 72,30 m d’envergure, ce qui est comparable à un avion de ligne. Mais ses 269,5 m² de panneaux solaires n’alimentent que 4 moteurs électriques de moins de 20 chevaux chacun, ce qui propulse les 2 300 kg de l’appareil à seulement 90 km.h-1. Et encore, l’engin ne transporte que son pilote[9] … Il est donc encore un peu tôt pour envisager des avions transportant des passagers à l’énergie solaire !

        Signalons qu’il existe un « avion gonflable » transportant plusieurs tonnes de façon écologique : le Solar Ship[10].

Molécule de dihydrogène    Une molécule de dihydrogène. Source : https://www.chemtube3d.com/H2/

        La solution la plus probable pour un avion plus « neutre en carbone » serait donc d’utiliser du dihydrogène comme carburant. À condition que ce gaz soit produit de façon « propre » (en dissociant de l’eau avec de l’électricité produite par des panneaux solaires, par exemple). Le sujet a déjà été évoqué par ce blog à l’occasion de la mise en service de trains[11] et de bus à dihydrogène[12], qui utilisent une pile à combustible destinée à alimenter un moteur électrique. Quelques obstacles à surmonter toutefois : le dihydrogène est un gaz très léger. Il vaut mieux donc le stocker à l’état liquide, ce qui requiert une température de -253°C. Pas très pratique sur plusieurs plans, notamment ceux de la technique et de la sécurité[13] …

 

        L’avion plus « propre » est donc envisageable, même pour 2035. Par contre, même s’il n’émet pas de gaz à effet de serre en vol, il en émettra forcément au moment de sa construction. Comme tous les engins de fabrication humaine, y compris ceux réputés « verts » !

 

 

Notes et références

[1] Source : « La France mise sur un avion neutre en carbone pour 2035 », La Voix du Nord, 10 juin 2020. Disponible à cette adresse : https://www.lavoixdunord.fr/763590/article/2020-06-10/la-france-mise-sur-un-avion-neutre-en-carbone-pour-2035

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’impact climatique du transport aérien. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Impact_climatique_du_transport_aérien

[3] « 10 mars 2019 : crash du vol 302 Ethiopian Airlines », 15 mars 2019. Disponible dans les archives de mars 2019 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/03/10-mars-2019-crash-du-vol-302-ethiopian-airlines.html

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux ailes volantes. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Aile_volante

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au LEAP. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/CFM_International_LEAP

[6] Source : « Safran dévoile l'Open Rotor, un moteur en rupture pour les Airbus et les Boeing du futur », La Tribune, 4 octobre 2017. Disponible à cette adresse : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/safran-devoile-l-open-rotor-son-moteur-disruptif-pour-les-airbus-et-les-boeing-du-futur-752712.html

[7] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux dirigeables. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ballon_dirigeable

[8] Source : « Dirigeables : le miracle du vide », Science & Vie, 5 juin 2020. Disponible à cette adresse : https://www.science-et-vie.com/technos-et-futur/dirigeables-le-miracle-du-vide-56281

[9] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Solar Impulse. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Solar_Impulse

[10] Source : site Web du Solar Ship. Disponible à cette adresse : http://fr.solarship.com/

[11] « 17 septembre 2018 : entrée en service de l’Alstom LHB Coradia iLint », 21 septembre 2018. Disponible dans les archives de septembre 2018 de ce blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/09/17-septembre-2018-alstom-lhb-coradia-ilint.html

[12] « 12 septembre 2019 : mise en service des premiers bus à hydrogène en France », 13 septembre 2019. Disponible dans les archives de septembre 2018 de ce blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/09/12-septembre-2019-premiers-bus-hydrogene-france.html

[13] Voir l’article de La Voix du Nord mentionné précédemment.

 


Pas de pause pour la science !

Panneau interdiction

 

        Chère lectrice, cher lecteur,

        La pandémie actuelle occupe pour l’instant les médias jusqu’à saturation. Je te propose donc aujourd’hui un bref tour d’horizon de 
l’actualité scientifique du mois dernier, garanti à 100 % sans coronavirus.

 

10 avril 2020

Terre_BepiColombo    La Terre photographiée par une caméra de la sonde BepiColombo pendant le survol du 10 avril 2020. Source : http://www.esa.int/Space_in_Member_States/France/BepiColombo_prend_de_dernieres_photos_de_la_Terre_avant_de_se_diriger_vers_Mercure

        Lancée le 19 octobre 2018, la sonde BepiColombo croise la Terre sur sa (très) longue route vers la planète Mercure, qu’elle doit étudier. Objectif de ce rapprochement assez serré (12 700 km) : utiliser la gravitation de la planète pour freiner la sonde. Le trajet comporte 9 survols de ce type et durera un peu plus de 7 ans[1]. C’est très long, mais ça permet d’économiser pas mal de carburant et d’emporter plus d’instruments scientifiques.

 

15 avril 2020

Kepler 1649 c    Vue d’artiste de Kepler-1649 c en orbite autour de son étoile naine rouge. Crédit : NASA/Ames Research Center/Daniel Rutter. Source : https://astronomy.com/news/2020/04/earth-sized-habitable-zone-exoplanet-found-hiding-in-kepler-data

        Annonce de la découverte d’une planète potentiellement habitable, la plus similaire à la Terre connue actuellement[2] : Kepler-1649 c. Similarité toute relative : si son rayon est très proche de celui de la Terre, elle reçoit 25 % d’énergie lumineuse en moins de son étoile. Pour être habitable (du moins selon des critères terrestres), la planète doit avoir un assez fort effet de serre en surface. Or on ne connaît pas la composition de son atmosphère … Par ailleurs, elle est en orbite autour d’une naine rouge, un type d’étoile connu pour sa forte activité éruptive. Donc attention à ne pas se réjouir trop vite !

 

15 avril 2020 également

Feu forêt Tchernobyl    Feu de forêt à proximité de Tchernobyl, le 10 avril 2020. Crédit : Volodymyr Shuvayev / AFP. Source : https://www.20minutes.fr/planete/2761419-20200415-tchernobyl-incendies-maitrises-impacts-radiologiques

        Les incendies qui ravagent la zone d’exclusion autour de Tchernobyl depuis le 3 avril 2020 sont maîtrisés[3]. Les flammes ont remobilisé des éléments radioactifs présents dans le sol et absorbés par la végétation, ce qui a généré une pollution atmosphérique radioactive (nettement moindre que celle de 1986) . En ce qui concerne la centrale, le feu a été stoppé à 1,5 km d’elle.

 

18 avril 2020

Atlas_Hubble_23 avril 2020    La comète Atlas (enfin, ce qu’il en reste …), photographiée par le télescope spatial Hubble, le 23 avril 2020. Crédit : NASA/ESA/D. Jewitt (UCLA). Source de l’image : https://www.cieletespace.fr/actualites/le-telescope-hubble-voit-la-comete-atlas-se-desagreger-en-30-morceaux

        La fragmentation de la comète Atlas est officialisée par le Centre des planètes mineures[4].  Présentée auparavant comme étant potentiellement la comète de l’année, voire de la décennie, Atlas n’a pas survécu à son approche du Soleil. L’espoir d’une comète spectaculaire est désormais reporté sur Swan, découverte ce même mois …

 

3 - 4 mai 2020

CO2_Mauna Loa_07-05-2020    Variations de la concentration en dioxyde de carbone atmosphérique mesurée à l’observatoire du Mauna Loa. Source : https://www.esrl.noaa.gov/gmd/ccgg/trends/monthly.html

        Enfin, un petit détour par la case « climat ». Le 3 mai, l’observatoire du Mauna Loa a enregistré une concentration record en dioxyde de carbone atmosphérique de 418,12 parties par million (soit 0,04182 %). Le 4, une température de 35,4 °C a été relevée à Cambo-les-Bains (Pyrénées-Atlantiques), ce qui représente les 35 °C les plus précoces en France depuis le début des mesures fiables au thermomètre[5]. Une température à l’image du début de l’année, bien partie pour battre des records …

 

        Eh oui, même en pleine pandémie, le monde ne s’arrête pas de tourner. Et il n’arrête malheureusement pas non plus de se réchauffer …

 

 

Notes et références

[1] Source : « BepiColombo prend de dernières photos de la Terre avant de se diriger vers Mercure », European Space Agency, 10 avril 2020. Disponible à cette adresse : http://www.esa.int/Space_in_Member_States/France/BepiColombo_prend_de_dernieres_photos_de_la_Terre_avant_de_se_diriger_vers_Mercure

[2] Source (en anglais) : Andrew Vanderburg, Pamela Rowden, Steve Bryson, Jeffrey Coughlin, Natalie Batalha, Karen A. Collins, David W. Latham, Susan E. Mullally, Knicole D. Colón, Chris Henze, Chelsea X. Huang, Samuel N. Quinn, « A Habitable-Zone Earth-Sized Planet Rescued from False Positive Status », soumis le 14 avril 2020.  Disponible à cette adresse : https://arxiv.org/abs/2004.06725

[3] Source : « Tchernobyl : Les incendies sont maîtrisés… Et les impacts radiologiques ? », 20 minutes, publié le 15 avril 2020, mis à jour le 16 avril 2020. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/planete/2761419-20200415-tchernobyl-incendies-maitrises-impacts-radiologiques

[4] Source (en anglais) : « MPEC 2020-H28 : COMET C/2019 Y4 (ATLAS) », Minor Planet Center, 18 avril 2020. Disponible à cette adresse : https://minorplanetcenter.net/mpec/K20/K20H28.html

[5] Source : « La France a connu son début d’année le plus chaud ! », Futura Sciences, 9 mai 2020. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/rechauffement-climatique-france-connu-son-debut-annee-plus-chaud-80881/


L’accélération du réchauffement en Europe liée à la diminution des émissions d’aérosols ?

La peste ou le choléra ?

Fléaux        Annoncé comme « le plus froid depuis 30 ans » par certains médias à l’automne 2019, l’hiver 2020 est pour l’instant en train de déjouer ces pronostics alarmistes. Mis à part quelques courtes périodes relativement froides, les températures sont en effet très douces pour la saison[1]. Des températures supérieures à 25°C ont même été relevées dès le 3 février (avec notamment 27,8°C à Cambo-les-Bains, dans les Pyrénées-Atlantiques)[2] ! Cet hiver doux concerne également le reste de l’Europe. Et ce n’est pas fini, si on en croit les prévisions[3] …

        Un article paru dans la revue Nature Climate Change pointe l’influence des émissions humaines d’aérosols sur le changement climatique[4]. Pour faire simple : si l’Europe connaît des hivers de moins en moins froids, c’est en partie à cause de la réduction desdites émissions sur ce continent !

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Aérosols : définition

        Un aérosol est un ensemble de particules fines, solides ou liquides, en suspension dans un milieu gazeux[5].

        Il peut donc s’agir de poussières, de suie ou de gouttelettes (entre autres).

Aérosols_monde_2012    Simulation des émissions d’aérosols par le modèle GEOS-5. Le sel marin est en bleu, la poussière en rouge, la fumée en vert et les émissions soufrées en blanc. Crédit : William Putman, NASA/Goddard. Domaine public. Disponible à cette adresse : https://www.nasa.gov/multimedia/imagegallery/image_feature_2393.html

        Notons que l’humanité n’est pas la seule émettrice d’aérosols. La nature en émet également, à l’occasion d’éruptions volcaniques, d’incendies …

 

Effets des aérosols sur l’atmosphère

        Selon le comportement des aérosols vis-à-vis de la lumière, il est possible d’en distinguer 2 types.

        Certains aérosols absorbent la lumière. Ils participent ainsi au réchauffement climatique. C’est le cas de la suie émise par les incendies de forêts ou par les industries humaines, par exemple.

        D’autres diffusent ou réfléchissent la lumière. Situés dans la haute atmosphère, ils empêchent une partie du rayonnement solaire d’atteindre la surface terrestre, ce qui provoque un refroidissement au niveau du sol. C’est le cas des gouttelettes d’acide sulfurique émises par les éruptions volcaniques[6].

        La présence d’aérosols dans l’atmosphère favorise également la condensation de gouttelettes d’eau, ce qui provoque la formation de nuages, dont le sommet réfléchit la lumière solaire, mais qui permettent également de conserver la chaleur en renvoyant le rayonnement infrarouge vers le sol …

 

Et en Europe ?

        L’Union européenne a pris des mesures contre la pollution de l’air dès les années 1970. Les aérosols font partie des polluants ciblés.

        L’application de ces mesures a permis une nette diminution des émissions polluantes[7].

        Résultat : une baisse bienvenue de la quantité d’aérosols présents dans l’atmosphère … mais du coup une augmentation du flux lumineux qui atteint le sol ! Un effet responsable d’environ 23 % du réchauffement constaté en Europe entre 1980 et 2012, d’après une étude de 2014 du Centre national de recherches météorologiques français[8].

Effets diminution aérosols    Évolution des émissions d’aérosols dans l’hémisphère nord et changements climatiques de 1970 à 2005 : a) variation des émissions d’aérosols ; b) variation du flux lumineux ; c) variation de la vitesse du courant-jet ; d) variation de la pression atmosphérique en surface. Copyright Wang et al. Visible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/aerosols-hivers-trop-doux-europe-faute-reglementations-antipollution-55484/

        Mais ce n’est pas tout ! Ce réchauffement accentue le gradient[9] de température entre le continent et l’Arctique. Le courant-jet[10] (ou jet-stream) est bloqué dans les hautes latitudes, ce qui empêche l’air arctique (froid) de descendre sur l’Europe[11].

 

        Les hivers plus chauds sont donc en partie des « effets secondaires » de l’amélioration de la qualité de l’air. Mais que ce soit bien clair entre nous : il ne faut surtout pas voir dans cet article une invitation à polluer !

 

 

Notes et références

[1] Source : « Grande douceur hivernale sur l’Europe », Météo France, 4 février 2020. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/actualites/79333902-grande-douceur-hivernale-sur-l-europe

[2] Source : « Premiers 25 °C de l'année : des records de chaleur battus », Météo France, 3 février 2020. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/actualites/79287008-premiers-25-c-de-l-annee-des-records-de-chaleur-battus

[3] Source : prévisions saisonnières de Météo France pour le trimestre février-mars-avril 2020. Disponibles à cette adresse : http://www.meteofrance.com/accueil/previsions-saisonnieres

[4] Article d’origine (payant) : « Reduced European aerosol emissions suppress winter extremes over northern Eurasia », Yuan Wang et al., Nature Climate Change, 3 février 2020. https://www.nature.com/articles/s41558-020-0693-4

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux aérosols. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Aérosol

[6] Source : « Comment les aérosols atmosphériques modifient-ils le climat ? », sur le site Le climat en questions. Disponible à cette adresse : http://www.climat-en-questions.fr/reponse/mecanismes-devolution/aerosols-climat-par-olivier-boucher

[7] Source : « La législation européenne sur l’air », sur le site de l’Agence européenne pour l’environnement. Disponible à cette adresse : https://www.eea.europa.eu/fr/signaux/signaux-2013/articles/la-legislation-europeenne-sur-l2019air

[8] Source (en anglais) : P. Nabat et al., « Contribution of anthropogenic sulfate aerosols to the changing Euro‐Mediterranean climate since 1980 », Geophysical Research Letters, 23 juillet 2014. Dsiponoble à cette adresse : https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/2014GL060798

[9] Gradient : variation d’une grandeur dans l’espace

[10] Courant-jet : courant de haute altitude, qui fluctue entre les hautes et les basses latitudes. Positionné en basse latitude, il laisse l’air polaire descendre sur l’Europe.

[11] « Hivers trop doux en Europe : la faute aux réglementations antipollution ? », Futura Sciences, 5 février 2020. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/aerosols-hivers-trop-doux-europe-faute-reglementations-antipollution-55484/

 


Coup de gueule

        Le télescope spatial CHEOPS (CHaracterising ExOPlanets Satellite) a été satellisé le 18 décembre 2019 par une fusée Soyouz. Un de ses objectifs : trouver des planètes de taille semblable à celle de la Terre (de préférence) à étudier dans l’environnement « proche » du Système solaire[1].

        En attendant de trouver une « jumelle » de la Terre, « l’originale » est toujours plus mal en point. Et avec l’échec de la COP 25 à Madrid, ça ne va pas s’arranger …

 

        Depuis les travaux de Svante Arrhenius en 1896[2], on sait que l’émission massive de dioxyde de carbone provoque un réchauffement climatique. Le Club de Rome avait déjà évoqué la possibilité d’un effondrement environnemental, économique et social dans le rapport The Limits to Growth en 1972.

        Pour ce qui est de l’effondrement environnemental, il est malheureusement en cours. L’année 2019 est un bon résumé de ce qui va suivre : glaces en fonte accélérée, canicules, sécheresses, tempêtes et cyclones de plus en plus intenses et répétés, incendies monstres, biodiversité en berne, niveau des océans en hausse …

 

        Des années qu’on parle des changements nécessaires, et qu’on les attend encore.

        Étonnant ? Pas du tout !

        La société dominante est dans son ensemble hautement incompatible avec la lutte contre la dégradation de l’environnement. Individualiste, inégalitaire, gangrenée par un capitalisme de plus en plus anarchiste[3], droguée à la surconsommation, elle ne fera aucun effort susceptible de porter potentiellement atteinte à son « petit confort ». Conséquence : rien ne va bouger.

        Du côté des dirigeants, ce n’est pas mieux. Les groupes de pression sont toujours aussi efficaces. Pire, certains pays clés dans la lutte contre le changement climatique (États-Unis, Brésil, Australie, entre autres) sont carrément dirigés par des climatosceptiques convaincus et décomplexés qui n’hésitent pas à mettre leurs actes en accord avec leurs convictions …

 

        Autant le dire tout de suite, il n’y a pas et il n’y aura probablement jamais de « plan(ète) B »[4]. Aménager Vénus ou Mars pour les rendre un peu plus « vivables » représente un coût véritablement astronomique. Une véritable « jumelle » de la Terre serait beaucoup trop lointaine et impossible à atteindre en un temps raisonnable. Et puis un « déménagement » ne ferait que déplacer le problème.

        Avant de jouer aux apprentis sorciers avec des solutions aussi hasardeuses que la géo-ingénierie, le plus « simple » et le « moins coûteux » (mais très cher quand même) reste le changement radical de société vers un modèle beaucoup plus respectueux de l’humanité et de l’environnement. Ou plutôt, de ce qu’il en restera …

        Alors BOUGEZ-VOUS !

 

 

Notes et références

[1] Proximité toute relative : à quelques dizaines d’années-lumière.

[2] La date est bel et bien exacte !

[3] Pas au sens politique du terme, mais plutôt à celui du refus de toute autorité ou règle.

[4] Le jeu de mots n’est pas de moi. Il apparaît dans n’importe quelle manifestation contre le réchauffement climatique.


Bonne année 2020 !

Chère lectrice, cher lecteur,

 

Je te souhaite mes meilleurs vœux pour l'année 2020.

Nouvelle année, nouvelle décennie ... Mais ce blog continuera à suivre et à expliquer l'actualité scientifique ! Il abordera également à l'occasion quelques notions importantes de temps en temps.

Bonnes découvertes sur le blog Décryptons la science !


9 décembre 2019 : le premier étage du SLS (enfin !) terminé

L’horloge tourne. Mais attention, la roue de la fortune aussi …

Cadrans        Retour dans l’espace (ou presque) pour le blog !

        Le 9 décembre 2019, la NASA a annoncé avoir terminé le premier étage de son Space Launch System (ou SLS)[1].

        Au fait, qu’est-ce que le Space Launch System ? À quoi sert-il ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le Space Launch System

        Le Space Launch System (ou SLS) est une fusée en cours de développement dans le cadre du retour vers la Lune.

        Celle qui fut longtemps considérée comme une « fusée à destination de nulle part » (rocket to nowhere), faute de charge utile adéquate[2], doit maintenant permettre le retour d’astronautes sur la Lune d’ici 2024.

        Comme le lanceur Ares de feu le programme Constellation, le SLS réutilise des éléments de la navette spatiale américaine.

Navette spatiale_éléments    La navette spatiale américaine. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Sts_dia.jpg).

        Ainsi, les deux propulseurs d’appoint qui flanquent la fusée et lui donnent plus de puissance au décollage sont dérivés des Solid Rocket Boosters de la navette.

        Le premier étage (celui qui vient d’être terminé) reprend le réservoir externe (« External Tank » sur l’image précédente) et les moteurs de la navette (« Space Shuttle Main Engines »). Pour limiter sa masse, il ne sera pas peint, ce qui laissera apparaître la mousse isolante et lui donnera la même couleur orange que son « ancêtre ». Signalons que contrairement à ceux de la navette, les moteurs du SLS ne sont pas réutilisables, ce qui simplifie leur conception[3].

SLS Block 1    Vue d’artiste du SLS Block 1 sur son pas de tir. Auteur : NASA. Source : https://www.nasa.gov/sites/default/files/thumbnails/image/sls_block1_on-pad_sunrisesmall.jpg. Domaine public.

        L’engin sera décliné en plusieurs versions. La première, appelée Block 1, est celle qui sera utilisée prochainement. Elle connaître deux évolutions. Tout d’abord, son Interim Cryogenic Propulsion Stage (ICPS) sera remplacé par un Exploration Upper Stage plus puissant, ce qui donnera la version Block 1B. Puis les propulseurs d’appoint seront changés pour d’autres plus performants, aboutissant ainsi à la version Block 2. Le premier étage restera le même pour les trois versions.

Evolution SLS    Évolution du SLS. Auteur : Keith Hefner. Source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Space_Launch_System#/media/Fichier:SLSEVO_(2015).png). Domaine public.

 

Quelles utilisations ?

        Le SLS est prévu pour un retour sur la Lune, dans le cadre du programme Artemis[4]. Il propulsera pour cela la capsule Orion, ainsi qu’un module de service de conception européenne[5].

        Mais pas seulement !

        La NASA a en effet concocté un programme un peu plus ambitieux pour l’ex « fusée à destination de nulle part »[6].

        Le lanceur doit en plus propulser la sonde Europa Clipper vers Jupiter (ou plus précisément sa lune Europe, suspectée d’abriter un océan souterrain favorable à l’apparition de la vie). Plus puissant que les autres, il permettrait à la sonde d’atteindre sa cible en un peu moins de 2 ans au lieu de 6, grâce à un chemin plus direct (assistance gravitationnelle[7] de Vénus et de la Terre plus nécessaire). Décollage prévu en 2022.

LOPG    Vue d’artiste (réaliste) du Lunar Orbital Platform Gateway. Auteur : NASA. Source : https://www.nasa.gov/sites/default/files/atoms/files/cislunar-update-gerstenmaier-crusan-v5a.pdf. Domaine public.

        La fusée doit également placer en orbite autour de la Lune le Lunar Orbital Platform Gateway (nom abrégé en LOPG). Le LOPG doit prendre la succession de la Station Spatiale Internationale (ISS) en ce qui concerne l’occupation humaine de l’espace et la recherche. Elle peut également servir de relais vers la surface lunaire et, surtout, vers Mars.

 

        Le programme annoncé est plutôt alléchant. Toutefois, le calendrier risque de glisser. La NASA doit en effet composer avec différents aléas susceptibles de retarder le projet, voire de l’amputer. Le plus difficile à prévoir étant l’administration Trump, avec ses contradictions et ses revirements répétitifs …

 


Notes et références

[1] Source : « Retour sur la Lune : Le premier étage de la fusée de la Nasa est terminé », 20 minutes, 11 décembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/sciences/2672539-20191211-retour-lune-premier-etage-fusee-nasa-termine

[2] Sa capacité d’emport est proche de celle de la fusée Saturn V du programme Apollo.

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacrée au Space Launch System. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Space_Launch_System

[4] Clin d’œil de la NASA à la mythologie grecque : Artémis est la sœur d’Apollon, qui avait donné son nom au programme Apollo dans les années 1960 et 1970.

[5] Source : « La construction du module de service d’Orion a débuté », Futura Sciences, 22 mai 2016. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/astronautique-construction-module-service-orion-debute-62864/. Petite précision : le vol de test évoqué dans l’article n’a pas encore eu lieu …

[6] Source (en anglais) : « NASA finally sets goals, missions for SLS – eyes multi-step plan to Mars », NASA Spaceflight.com, 6 avril 2017. Disponible à cette adresse : https://www.nasaspaceflight.com/2017/04/nasa-goals-missions-sls-eyes-multi-step-mars/

[7] Assistance gravitationnelle : utilisation de la gravité d’un astre pour modifier la vitesse d’un engin (typiquement, une sonde spatiale).


18 novembre 2019 : la première carte détaillée de Titan

Les Titaniens prennent leurs précautions

Titanien

        Le 18 novembre 2019, la première carte détaillée du satellite Titan a été dévoilée dans un article paru dans la revue Nature[1].

        C’est une bonne occasion de parler de cette étrange lune … et des spéculations à son sujet.

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Titan : drôle de lune …

Titan    Titan photographié devant les anneaux de Saturne par la sonde Cassini, le 21 mai 2011. Crédit : NASA/JPL-Caltech/Space Science Institute. Source : https://solarsystem.nasa.gov/resources/177/titan-up-front/?category=moons/saturn-moons_titan

        Titan est une lune particulièrement originale dans le Système solaire.

        Plus gros satellite de Saturne (et de très loin), l’astre est également plus grand que Mercure (rayon de 2 574,7 km pour Titan[2], et de 2 439,7 km pour Mercure[3]).

        La principale particularité de ce monde est son atmosphère, très épaisse pour une lune. Si l’existence de cette coquille gazeuse était connue depuis 1940[4], les premières observations sur place se sont révélées plutôt décevantes du fait de sa présence. Ni Pioneer 11 (en 1979), ni Voyager 1 (en 1980) ne parviennent à voir la surface titanienne, cachée par une épaisse brume. Cette brume sera « percée » une première fois par le télescope Hubble, qui observe des zones claires et sombres en infrarouge[5].

        L’atmosphère est composée à 95% de diazote (N2) et à 5% de méthane (CH4). Le rayonnement solaire casse les molécules de méthane et de diazote, ce qui forme des molécules d’hydrocarbures plus lourdes et plus complexes. Ce sont elles qui forment la brume orangée visible sur les photos de Titan, avant de tomber au sol[6].

        La lune présente aussi un cycle hydrologique, similaire au cycle de l’eau sur Terre. À une différence près : avec une pression atmosphérique d’environ 1,5 bar et une température d’environ -180°C, ce n’est pas de l’eau qui coule à la surface de Titan, mais du méthane et de l’éthane. L’eau est gelée, dure comme de la roche et érodée par ces liquides. L’eau liquide sert de « lave » à des cryovolcans[7].

Carte géologique Titan    Carte de la surface de Titan figurant dans l’article paru dans Nature. Crédit : NASA/JPL-Caltech/ASU. Source : https://www.courrierinternational.com/article/astronomie-vapeur-deau-sur-europe-carte-de-titan-les-lunes-du-systeme-solaire-se-devoilent

        La surface comporte donc des rivières et des lacs (en bleu sur la carte). Mais également des dunes aux basses latitudes (en mauve), des plaines (en vert), des zones plus bosselées (en jaune), des « labyrinthes » (en rose), et quelques rares cratères (en rouge).

 

Un paradis glacé ?

        Des étendues liquides, des molécules organiques complexes … Pas étonnant que Titan figure sur la liste des endroits où chercher la vie (qui serait très différente de celle qu’on connaît sur Terre), ou, à défaut, étudier la chimie prébiotique.

Titan_structure    Structure interne de Titan. Auteur (image originale) : NASA. Source (image avec traduction en français) : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Titan_cutaway_french.svg).

        Il existerait un autre endroit intéressant dans ce domaine. Un modèle de la structure de Titan a été déduit des données recueillies par la sonde Cassini. Outre un noyau rocheux, Titan abriterait un océan d’eau liquide pris en sandwich entre deux couches de glace (une de glace « ordinaire », notée « 1h » sur le schéma précédent, et une autre de glace spécifique aux hautes pressions)[8]. Cette couche d’eau liquide pourrait-elle abriter de la vie ?

        Enfin, la colonisation de Titan par l’humanité serait possible (mais pas pour demain). Déjà évoquée par la science-fiction (dans l’œuvre d’Arthur C. Clarke ou dans le film Oblivion, par exemple), elle est envisagée comme une alternative crédible à la colonisation de Mars. L’endroit ferait une bonne « station-service » pour fusées (entre autres utilisations). À condition d’être suffisamment patient pendant le voyage (qui durerait 7 ans avec les moyens actuels), de s’adapter à la faible gravité (0,14 g, moins que sur la Lune), de se protéger du froid et de porter un masque à oxygène [9]

 

        Grâce aux données recueillies par Cassini, les scientifiques disposent désormais d’une carte détaillée de Titan. L’exploration sur place de la lune a déjà démarré avec l’atterrissage de la sonde Huygens le 14 janvier 2005. Elle va se poursuivre avec la mission Dragonfly (qui utilisera un aérobot[10]), retenue en juin 2019. Décollage annoncé pour 2026 et arrivée prévue en 2034 …

 

 

Notes et références

[1] Lopes, R.M.C., Malaska, M.J., Schoenfeld, A.M. et al., « A global geomorphologic map of Saturn’s moon Titan », Nature Astronomy, publié le 18 novembre 2019. Disponible à cette adresse :  https://www.nature.com/articles/s41550-019-0917-6

[2] Source (en anglais) : page de la NASA donnant quelques chiffres sur la lune Titan. Disponible à cette adresse : https://solarsystem.nasa.gov/moons/saturn-moons/titan/by-the-numbers/

[3] Source (en anglais) : page de la NASA donnant quelques chiffres sur la planète Mercure. Disponible à cette adresse : https://solarsystem.nasa.gov/planets/mercury/by-the-numbers/

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Titan. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Titan_(lune)#Observation

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Titan. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Titan_(lune)#Exploration

[6] Source (en anglais) : page de la NASA consacrée à Titan. Disponible à cette adresse : https://solarsystem.nasa.gov/moons/saturn-moons/titan/in-depth/#atmosphere_otp

[7] Source (en anglais) : page de la NASA consacrée à Titan. Disponible à cette adresse : https://solarsystem.nasa.gov/moons/saturn-moons/titan/in-depth/#surface_otp

[8] Source (en anglais) : page de la NASA consacrée à Titan. Disponible à cette adresse : https://solarsystem.nasa.gov/moons/saturn-moons/titan/in-depth/#structure_otp

[9] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Titan. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Colonisation_de_Titan

[10] Aérobot : sonde spatiale similaire à un drone.


16 - 24 novembre 2019 : Semaine Européenne de la Réduction des Déchets

Logo SERD

« Tout le monde veut sauver la planète,

mais personne veut descendre les poubelles. »

Jean Yanne

 

        Du 16 au 24 novembre a lieu l’édition 2019 de la Semaine Européenne de Réduction des Déchets.

        Inspirée d’un modèle canadien et lancée en 2009[1], cette semaine a pour but de « diminuer nos déchets et consommer mieux »[2].

        Le blog « Décryptons la science » ne pouvait pas passer à côté de cet événement ! Je te propose donc, chère lectrice, cher lecteur, quelques moyens de faire un geste pour la planète dans ce domaine.

 

Réduire

        Le meilleur moyen de lutter contre les déchets, c’est encore de ne pas en produire ! Petite liste non exhaustive de trucs et astuces …

        Préférer les articles les moins emballés (voire sans emballage)[3]. Exemples de produits suremballés : les biscuits en portions individuelles ou certains produits électroniques de petite taille (clé USB, par exemple) noyés dans des blisters en plastique beaucoup trop grands. Mention spéciale à certains fruits vendus en barquette plastique. Pas besoin de rajouter ce style d’artifice à une banane, elle possède déjà un « emballage » naturel : sa peau.

        En 2015, les Français recevaient en moyenne 17 kg de publicités et autres prospectus par habitant, qui le plus souvent terminent invariablement à la poubelle[4]. Placer un « Stop Pub » sur sa boîte aux lettres permet de réduire ce flot de papier indésiré (l’autocollant est censé être respecté).

StopPub    Exemple d’autocollant Stop Pub. Source : https://www.stoppub.fr

        Autre solution, se mettre au vrac. Ce terme désigne des produits (souvent alimentaires, mais pas seulement) non emballés. Le contenant est au choix du consommateur : sac en papier (à réutiliser), sac en tissu, bocal en verre … Une possibilité de plus en plus répandue.

        Enfin, penser à privilégier les emballages et les produits réutilisables / rechargeables, et à limiter les objets à usage unique. Un sac en toile vaut mieux qu’un sac plastique. Et il existe même des piles rechargeables (ce qui pour le coup devrait plutôt s’appeler des batteries).

 

Réutiliser

        Cette solution complète la précédente. Plutôt que de jeter « définitivement » un objet pour s’en débarrasser, autant faire des heureux et le donner à quelqu’un qui s’en servira.

        Il convient de distinguer le réemploi de la réutilisation.

        Dans les deux cas, l’objet connaît une « seconde vie ». Il est réemployé s’il n’est pas considéré comme déchet entre ses deux « vies ». Sinon, il est réutilisé[5].

        Les articles « plus désirés » sont collectés, réparés, remis à neuf … en vue d’être revendus.

Portable    Le téléphone portable, un objet auquel il est particulièrement intéressant de donner une deuxième vie. Source de l’image : https://www.fr.clipproject.info

        Une option particulièrement intéressante pour certaines catégories de biens comme les vêtements ou l’électronique, dont la production est particulièrement polluante. Et pour bien d’autres encore !

        Rappelons également que réparer un objet cassé peut également être envisagé avant de le jeter.

        En clair : ne pas négliger les recycleries, repair cafés et autres lieux à vocation semblable …

 

Recycler

        Un déchet peut tout à fait servir de matière première. Le dioxygène que l’on respire n’est-il pas le « déchet » de la photosynthèse ? Logo recyclage    Le ruban de Möbius, symbole du recyclage. Source : https://tous-logos.com/recycle-logo/

        La plupart des déchets peuvent être recyclés. Tout est une question de moyens disponibles (à titre d’exemple, une barquette de jambon n’est pas considérée comme recyclable partout). Les consignes de tri sont donc très variables. Les déchets non recyclables et non valorisables énergétiquement (c’est-à-dire, en gros, incinérés avec récupération de la chaleur) sont dits « ultimes » et atterrissent en décharge pour déchets ultimes[6].

        Les matériaux des déchets sont triés, récupérés et réinjectés dans la chaîne de fabrication de nouveaux objets, avec toutefois des contraintes de compatibilité : du verre coloré ne pourra pas servir pour fabriquer du verre blanc, par exemple. Par contre, des bouteilles en plastique peuvent non seulement redevenir d’autres bouteilles, mais également être transformées en polaire.

        Avantage principal : une économie de matières premières et d’énergie.

        Inconvénients (parmi quelques autres) : certains matériaux ont une capacité de recyclage limitée. Ainsi, le papier ne peut être recyclé qu’une dizaine de fois environ (les fibres s’abîment à chaque traitement). De plus, le tri doit au préalable être correctement effectué par le consommateur[7].

        Pour les plus bricoleurs, signalons aussi la possibilité de transformer les déchets en meubles (le carton se prête bien à cette activité), en bibelots, en rangements ou autres.

 

Composter

        Le compost concerne les déchets organiques (au sens « d’origine vivante »), à l’exception de la viande, des fruits de mer et du poisson[8]. Très intéressant, sachant que les restes de repas constituent environ 30% des déchets produits par les ménages[9] (valeur assez variable, mais qui reste dans cet ordre de grandeur).

        Les déchets verts sont entassés dans un composteur. Puis la nature se charge de les transformer en compost, qui pourra enrichir le jardin.

        Pour celles et ceux qui n’ont pas de jardin, habitent en ville et veulent transformer quand même leurs déchets verts en compost, on peut trouver des composteurs publics. Les consignes de tri sont les mêmes. Le composteur est juste situé un peu plus loin …

 

        Voilà, ce petit florilège de solutions (très souvent citées) pour la réduction des déchets est maintenant terminé. Je te laisse découvrir, chère lectrice, cher lecteur, d’autres possibilités. Pourquoi pas dans les animations proposées cette semaine ?

 

 

Notes et références

[1] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la Semaine Européenne de la Réduction des Déchets. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Semaine_européenne_de_la_réduction_des_déchets

[2] Source : site Web de la Semaine Européenne de Réduction des Déchets. Disponible à cette adresse : https://serd.ademe.fr/

[3] Source : page du site Web Nature Obsession consacrée au suremballage. Disponible à cette adresse :  http://www.nature-obsession.fr/dechets/suremballage-fleau-environnemental.html

[4] Source : « «Stop Pub»: encore des tonnes de prospectus dans nos boîtes aux lettres », Le Figaro, 2 novembre 2015. Disponible à cette adresse : https://www.lefigaro.fr/conso/2015/11/02/05007-20151102ARTFIG00009-stop-pub-encore-des-tonnes-de-prospectus-dans-nos-boites-aux-lettres.php

[5] Source : page Web de l’ Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie (ADEME) sur le réemploi et la réparation. Disponible à cette adresse : https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/eviter-production-dechets/reemploi-reutilisation

[6] Source : définition du déchet ultime sur le site Web d’Actu Environnement. Disponible à cette adresse : https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/dechet_ultime.php4

[7] Source : article de l’encyclopédie Ékopédia consacré au recyclage. Disponible à cette adresse : https://www.ekopedia.fr/wiki/Recyclage

[8] Même source que la note précédente.

[9] Source : « Déchets - Chiffres clés - Édition 2016 », ADEME. Disponible à cette adresse : https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/dechets-chiffres-cles-edition-2016-8813.pdf


4 novembre 2019 : les États-Unis quittent l’accord de Paris sur le climat

« USA for USA » : le retour

Trump    Traduction (pour les non-anglophones) : « Nous jurons de détruire votre planète pour faire de l’argent. »

 

        Donald Trump l’avait annoncé le 1er juin 2017[1], il a finalement dû attendre jusqu’au 4 novembre 2019 pour pouvoir le faire : les États-Unis ont notifié leur retrait de l’accord de Paris sur le climat.

        Quel est l’impact de cette décision en matière d’émissions de dioxyde de carbone ? Et surtout, quelles sont les conséquences sur ledit accord ?

        Mais gardons la tête froide et analysons (rapidement) ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Les États-Unis et le CO2

        Les États-Unis sont le deuxième plus gros émetteur de dioxyde de carbone du monde (5 270 millions de tonnes en 2018), derrière la Chine (9 839 millions de tonnes)[2]. Ces deux pays sont de loin les plus gros contributeurs aux 33,1 milliards de tonnes de dioxyde de carbone émises en 2018[3].

        Engagés dans l’accord de Paris sur le climat par Barack Obama, les États-Unis devaient réduire leurs émissions de 26 à 28% en 2025 par rapport à 2015[4]. Un engagement jugé trop lourd pour l’économie américaine par Donald Trump. Le pays est désormais sur le chemin de la sortie. C’est une promesse électorale tenue par l’actuel locataire de la Maison-Blanche. Lequel est de toute façon un climatosceptique assumé et décomplexé …

 

Accord de Paris : clap de fin ?

        L’accord de Paris sur le climat est-il donc torpillé par ce retrait ? Que nenni !

        Bien que premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, la Chine tient à ce qu’il soit maintenu. Par ailleurs, ses émissions sont relativement stables depuis quelques années[5]. L’Europe fait également des efforts, et la Russie (4ème plus gros émetteur) a à son tour ratifié le texte cet automne[6].

        De plus, l’accord est appliqué à partir du moment où 55 pays couvrant 55% des émissions l’ont ratifié, avec 1 mois de délai[7]. Conditions réunies début octobre 2016, pour une application effective au mois de novembre suivant.Accord de Paris    L’accord de Paris sur le climat : États signataires qui ne l’ont pas encore ratifié en vert clair, États signataires qui l’ont ratifié en vert foncé, États non signataires en gris, États non signataires mais qui l’ont ratifié quand même en bleu clair, États qui s’en retirent en orange. Carte éditée sur le site Web Mapchart (https://mapchart.net/).

        Les États-Unis représentent en 2018 15,9% des émissions de dioxyde de carbone mondiales. Malgré leur retrait, les États ayant ratifié le traité représentent toujours 79% des émissions, soit  largement plus que les 55% requis[8]. L’accord de Paris sur le climat reste donc en vigueur. Même si une partie des États américains veut poursuivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’objectif de limiter le réchauffement climatique à +2°C semble par contre bien plus difficile à tenir …

 

 

Notes et références

[1] Source : « Climat : Donald Trump annonce le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris », Le Monde, paru le 1er juin 2017, mis à jour le 2 juin 2017. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/donald-trump/article/2017/06/01/climat-donald-trump-annonce-le-retrait-des-etats-unis-de-l-accord-de-paris_5137402_4853715.html

[2] Source (en anglais) : site Web Global Carbon Atlas. Disponible à cette adresse : http://www.globalcarbonatlas.org/en/CO2-emissions

[3] Source : « Nouveau pic d’émissions de CO2 en 2018 », Le Monde, 27 mars 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/blog/huet/2019/03/27/nouveau-pic-demissions-de-co2-en-2018/

[4] Source : « Emissions de CO2 par les Etats-Unis », sur le site Web Planetoscope. Disponible à cette adresse : https://www.planetoscope.com/co2/677-emissions-de-co2-par-les-etats-unis.html

[5] Voir la page de Global Carbon Atlas citée précédemment, et y consulter l’évolution des émissions de la Chine.

[6] Source : « Climat : la Russie ratifie l’accord de Paris, Macron salue une «formidable nouvelle» », Le Parisien, 24 septembre 2019. Disponible à cette adresse : http://www.leparisien.fr/environnement/climat-la-russie-ratifie-l-accord-de-paris-macron-salue-une-formidable-nouvelle-24-09-2019-8158371.php

[7] Source : « Climat : l’accord de Paris va entrer en vigueur dès novembre », Le Monde, 1er octobre 2016. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/cop21/article/2016/10/01/climat-l-accord-de-paris-va-entrer-en-vigueur-des-novembre_5006535_4527432.html

[8] Source : « Climat : où en est l’accord de Paris, après le retrait annoncé des Etats-Unis ? », Le Monde, publié le 5 novembre 2019 et mis à jour le 6 novembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/11/05/climat-ou-en-est-l-accord-de-paris-apres-le-retrait-annonce-des-etats-unis_6018116_4355770.html


22 octobre 2019 : Starlink, Internet (et problèmes ?) à haut débit

Bientôt de nouvelles constellations dans le ciel ?


Constellations_new space

        La nouvelle est tombée via un tweet d’Elon Musk, le 22 octobre 2019 : le réseau Starlink de SpaceX fonctionne[1].

        À terme, ce réseau a pour objectif d’apporter l’Internet à haut débit partout dans le monde, grâce à des satellites placés en orbite basse[2]. Ce qui pourrait poser quelques problèmes …

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Comment ça marche ?

        Le principe est le même que pour les satellites de télécommunication. Il s’agit de relayer un signal de la source vers l’utilisateur. Le concept  a été développé en 1945 par Arthur C. Clarke dans un article intitulé « Extra-terrestrial Relays »[3].

        La solution la plus pratique consiste à envoyer le satellite en orbite géostationnaire, à près de 36 000 km d’altitude. Le satellite met 23 heures et 56 minutes à boucler une orbite autour de la Terre. Comme cette dernière met le même temps pour faire 1 tour sur elle-même, le satellite reste fixe au-dessus d’un point au sol. Il peut couvrir une zone très large et les antennes chargées de capter ses émissions n’ont pas à bouger pour le suivre.

        Les satellites du réseau Starlink, quant à eux, sont placés en orbite basse, à 550 km d’altitude. Ils nécessitent moins de puissance pour relayer un signal. Leur fabrication et leur lancement coûtent donc moins cher. En contrepartie, ils couvrent chacun une zone plus réduite et se déplacent beaucoup plus vite, ce qui implique d’utiliser plusieurs satellites, regroupés dans ce qu’on appelle une « constellation ». Ainsi, le système de télécommunications Iridium utilise plusieurs dizaines de satellites placés à 780 km d’altitude[4].

Constellation Iridium    Constellation de satellites Iridium. Copyright : Iridium. Source : http://www.esa.int/ESA_Multimedia/Images/2012/11/Iridium_NEXT_constellation

        Plusieurs satellites peuvent être lancés en une seule fois, ce qui réduit encore les coûts. Ainsi, le premier lancement de satellites Starlink a vu la mise sur orbite de 60 unités[5] !

 

Soucis à haut débit ?

        L’orbite terrestre est très loin d’être vide. Au 1er avril 2019, elle comptait 2 063 satellites opérationnels, dont 1 325 (soit 64%) en orbite basse (de 500 à 2 000 km d’altitude).

        Un embouteillage qui induit déjà un réel risque de collision. Le syndrome de Kessler reste toujours possible[6]. Et ça ne va pas s’arranger avec l’arrivée de la constellation Starlink : 1 600 satellites à 550 km d’altitude, 2 800 à 1 150 km et environ 7 500 à 340 km[7]. Notons au passage l’existence de projets concurrents qui apporteront probablement eux aussi d’impressionnantes armadas spatiales, comme celui de OneWeb (650 unités) ou Kuiper, développé par Amazon (3 250)[8]. Les porteurs de ces projets l’assurent : ils feront le nécessaire pour que les appareils en fin de vie soient désorbités et brûlent dans l’atmosphère.

        En attendant, une première manœuvre d’évitement d’un élément de la « flotille » de SpaceX a eu lieu le 2 septembre 2019, afin d’empêcher une collision  avec le satellite Aeolus de l’ESA[9] (dédié à l’étude des vents)[10].

        L’arrivée de tous ces nouveaux venus aura une conséquence sur le plancher des vaches. Après la pollution lumineuse due aux éclairages, voici celle causée par les satellites ! Pour l’instant, les engins actuels sont plutôt discrets, à part quelques exceptions, comme la Station Spatiale Internationale[11] (très brillante en raison de ses grands panneaux solaires) ou les satellites Iridium et leur fameux « flashs ». Les 60 premiers exemplaires de la constellation Starlink se sont quant à eux déjà fait remarquer, grâce à leur orbite basse, leur coque aplatie et leur panneau solaire. Fraîchement lancés, ils ont formé une longue série de points très lumineux dans le ciel nocturne[12].

Starlink_photo    Les 60 satellites de Starlink, filmés le 24 mai 2019 par un astronome néerlandais. Auteur : Marco Langbroek.

        Avec environ 12 000 objets similaires en orbite, plusieurs centaines seront visibles dans le ciel en même temps. De quoi changer radicalement l’aspect du ciel, et déranger les observations astronomiques. Mais jusqu’à quel point ?

        Pour répondre à cette question, dessinons un petit schéma à l’échelle :

Visibilité satellite nuit    Visibilité nocturne des satellites de la constellation Starlink. En jaune : lumière du Soleil ; en orange : orbite d’un des satellites ; point gris : satellite (taille exagérée). La Terre (disque bleu et noir) et l’orbite des satellites sont à l’échelle.

        La position 1 correspond à la limite jour-nuit. Le Soleil semble se coucher au sol. En raison de son altitude, le satellite est quant à lui toujours éclairé, donc visible. En 2, le satellite est sur le point d’entrer dans l’ombre de la Terre.  Il était jusqu’alors visible en pleine nuit. En 3, l’engin est plongé dans l’ombre, donc « invisible ». Ce schéma explique aussi pourquoi l’ISS, située à environ 400 km d’altitude, est observable uniquement en début ou en fin de nuit. Ce qui sera heureusement également le cas de la constellation de SpaceX.

 

Quelles alternatives ?

        Une autre piste est explorée pour apporter l’accès à Internet partout. Il s’agit de drones, voire de dirigeables. Maintenus en vol dans la stratosphère, alimentés par des panneaux solaires, ces derniers pourraient remplir le même rôle que les satellites, avec quelques avantages supplémentaires : une capacité à se maintenir au-dessus d’un même point et la possibilité d’effectuer d’autres missions, comme de la surveillance[1].

 

        Les « méga constellations » comme Starlink promettent d’apporter un accès à Internet à haut débit à des milliards de personnes dans le monde. Mais elles risquent également d’avoir des conséquences sérieuses sur le secteur spatial, en encombrant davantage encore l’orbite terrestre. Ces projets se concrétiseront-ils ?

 

 

Notes et références

[1] Source : « Starlink : Elon Musk assure avoir envoyé un tweet via son réseau de satellites », 20 minutes, 23 octobre 2019. Disponible à cette adresse :  https://www.20minutes.fr/sciences/2634871-20191023-starlink-elon-musk-assure-avoir-envoye-tweet-via-reseau-satellites

[2] Source (en anglais) : site Web de Starlink. Disponible à cette adresse : https://www.starlink.com/

[3] Source : page Web du site Techno-Science.net consacrée aux satellites de télécommunications. Disponible à cette adresse : https://www.techno-science.net/definition/2669.html

[4] Source : artcile de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux satellites Iridium Next. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Iridium_Next

[5] Source : « SpaceX : les premiers satellites "Starlink" sont en orbite », RTL, 24 mai 2019. Disponible à cette adresse : https://www.rtl.fr/actu/futur/spacex-les-premiers-satellites-de-la-starlink-sont-en-orbite-7797699487

[6] Voir l’article « 9 août 2018 : la « guerre des étoiles » selon Donald T. », publié le 7 septembre 2018 sur ce blog. Disponible dans les archives de septembre 2018 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/09/9-aout-2018-guerre-des-etoiles-donald-t.html

[7] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Starlink. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Starlink

[8] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au projet OneWeb. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/OneWeb

[9] ESA : European Space Agency, ou en français Agence Spatiale Européenne.

[10] Source : « Un satellite de l'ESA évite une collision avec un engin de SpaceX », 20 minutes, 3 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/sciences/2595767-20190903-satellite-esa-evite-collision-engin-spacex

[11] Aussi très connue sous son sigle anglophone ISS.

[12] Source : « Les satellites Starlink de SpaceX très (trop) visibles dans le ciel nocturne », Sciences et Avenir, 29 mai 2019. Disponible à cette adresse : https://www.sciencesetavenir.fr/espace/exploration/les-satellites-starlink-de-spacex-tres-visibles-dans-le-ciel_134049

[13] Source : « Marseille: Thales prêt à lancer son dirigeable du futur dans la stratosphère », 20 minutes, 29 avril 2016. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/marseille/1836863-20160429-marseille-thales-pret-lancer-dirigeable-futur-stratosphere


18 septembre 2019 : mise en service de la centrale solaire de Piolenc

Fluctuat nec mergitur        Le 18 septembre 2019 a été mise en service la première centrale solaire flottante de France, construite à Piolenc, dans le Vaucluse[1].

        Comment fonctionne le solaire photovoltaïque ? Quels sont les matériaux utilisés ? Quels sont les avantages et inconvénients des centrales flottantes ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Solaire photovoltaïque : la théorie …

        L’effet photovoltaïque fait partie de la famille des effets photoélectriques. Ce type de phénomènes a été découvert en 1839 par Antoine et Edmond Becquerel, en observant le comportement électrique d’électrodes plongées dans un liquide, modifié par un éclairage.

        C’est Albert Einstein qui apportera une explication à ce phénomène en 1905, à l’aide des concepts de photon (« particules de lumière ») et de quantum d’énergie. Les électrons d’un matériau exposé à la lumière absorbent les photons qui la composent. Si l’énergie du photon absorbé est suffisante, un électron peut être éjecté du matériau. Une explication qui a valu à son auteur le prix Nobel de physique en 1921[2].

Silicium

    Morceaux de silicium, un matériau semi-conducteur. Auteur : NASA. Source : https://wfc3.gsfc.nasa.gov/MARCONI/made-from.html. Domaine public.

        L’effet photovoltaïque est l’application de l’effet photoélectrique aux matériaux semi-conducteurs[3]. L’absorption de photons fait apparaître des paires d’électrons et de « trous » (absence d’électrons), ce qui génère un courant électrique[4].

 

… et la pratique

        Les cellules photovoltaïques exploitent ce phénomène. En assemblant plusieurs cellules, on obtient des panneaux solaires.

        Le semi-conducteur le plus utilisé est le silicium, très abondant à la surface de la Terre. Le silicium a 4 électrons disponibles sur sa couche électronique extérieure (il fait partie de la colonne n°14 du tableau périodique des éléments). Pour obtenir un matériau plus riche en électrons, il faut le « doper » avec des éléments plus riches en électrons, issus de la colonne n°15 (5 électrons sur la couche extérieure), comme le phosphore (de symbole chimique P), l’arsenic (As) ou l’antimoine (Sb) pour obtenir un matériau semi-conducteur dit « de type N ».  Pour obtenir un matériau plus riche en trous, il faut doper le silicium avec des éléments moins riches en électrons, issus de la colonne n°13 (3 électrons sur la couche extérieure), comme le bore (B), pour obtenir un matériau semi-conducteur dit « de type P »[5].

Classification périodique des éléments    La classification périodique des éléments chimiques. Auteurs : Scaler, Michka B. Image non modifiée. Source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Tableau_périodique_des_éléments#/media/Fichier:Tableau_périodique_des_éléments.svg). CC BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/). 

        Une cellule photovoltaïque juxtapose donc une couche de semi-conducteur de type P avec une couche de type N, prises en sandwich entre deux grilles qui servent de contact électrique.

        Si le silicium reste très utilisé actuellement, ce ne sera peut-être pas toujours le cas. D’autres matériaux, comme les polymères (organiques) moins chers à produire ou les « pérovskites » plus efficaces[6], pourraient le détrôner à l’avenir.

 

Centrale flottante : avantages et inconvénients

        Premier avantage : la centrale flottante ne grignote pas de terrain agricole ou d’espace naturel protégé[7]. Dans le cas de Piolenc, elle a pris place dans une carrière de granulats. Construite au centre du plan d’eau, elle ne dérange pas non plus la vie aquatique qui se développe près du bord.

        Autre avantage : l’eau permet de refroidir les panneaux solaires, ce qui permet de gagner 5 à 10% de rendement par rapport à des installations plus « classiques »[8].

        Inconvénient de l’installation : elle est sise dans un lac qui sert à absorber les crues du Rhône, tout proche, ce qui implique des variations du niveau de l’eau de plusieurs mètres[9]. Une contrainte qu’il a fallu prendre en compte au moment de concevoir la centrale.

 

        Des panneaux solaires ont déjà été installés sur des toits, au-dessus de parkings ou dans des clairières. La centrale photovoltaïque de Piolenc est la première en France posée sur un lac. D’autres projets de centrales photovoltaïques flottantes sont à l’étude. Jusqu’à quel point couvriront-elles nos plans d’eau ?

 

 

Notes et références

[1] Source : « Vaucluse: La plus grande centrale solaire flottante d’Europe a posé l’ancre à Piolenc », 20 minutes, 19 octobre 2019. Disponible à cette adresse :  https://www.20minutes.fr/planete/2631551-20191019-vaucluse-plus-grande-centrale-solaire-flottante-europe-pose-ancre-piolenc

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia concernant l’effet photoélectrique. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_photoélectrique

[3] Matériau semi-conducteur : matériau dont la conductivité électrique est intermédiaire entre celle d’un métal et celle d’un isolant.

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia concernant l’effet photovoltaïque. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_photovoltaïque

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia concernant les matériaux semi-conducteurs. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Semi-conducteur

[6] Source : « Une cellule photovoltaïque à base de pérovskite bat un record de rendement », Industries & Technologies, 21 juin 2018. Disponible à cette adresse : https://www.industrie-techno.com/article/une-cellule-photovoltaique-a-base-de-perovskite-bat-un-record-de-rendement.53365

[7] Source : « Quand l'énergie solaire prend l'eau », Le Monde, 3 mai 2011. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/planete/article/2011/05/03/quand-l-energie-solaire-prend-l-eau_1516139_3244.html

[8] Source : « En Provence, la première centrale solaire flottante de France », GEO, 1er août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.geo.fr/environnement/en-provence-une-carriere-desaffectee-devient-la-premiere-centrale-solaire-flottante-de-france-196848

[9] Source : article du Monde cité précédemment.


9 octobre 2019 : un Nobel pour les batteries lithium-ion

Lithium        Cette semaine est marquée par l’attribution des Prix Nobel. Avec à la clé des récompenses pour quelques « révolutions », dont la découverte d’exoplanètes (Prix Nobel de physique) et l’invention des batteries lithium-ion[1] (Prix Nobel de chimie). Le sujet des exoplanètes ayant déjà été abordé dans ce blog[2], c’est aux batteries lithium-ion que nous allons nous intéresser dans cet article.

        Une excellente occasion de découvrir comment elles fonctionnent !

 

Principe de fonctionnement[3]

        D’un point de vue historique, la batterie est une « amélioration » de la pile électrique.

        Cette dernière combine deux électrodes (l’anode, négative, et la cathode, positive) et un électrolyte (qui peut être un liquide, une pâte ou un gel). Une fois la pile branchée, l’anode libère des électrons, qui migrent vers la cathode à travers le circuit électrique alimenté par la pile. Par exemple, dans une pile zinc-cuivre, le zinc va perdre des électrons et passer en solution, alors que le cuivre va gagner des électrons. L’anode s’use de façon irréversible, jusqu’à sa disparition. La pile cesse alors de fonctionner.

Fonctionnement pile    Fonctionnement d’une pile électrique (pile Daniell). Source de l’image : https://www.maxicours.com/se/cours/fonctionnement-d-une-pile/

        La pile a pour inconvénient de ne pouvoir servir qu’une seule fois. Pour remédier à cet inconvénient, l’accumulateur a été inventé. Le principe reste le même, mais les réactions en jeu sont réversibles. Brancher l’accumulateur sur une source d’électricité (qui peut être un alternateur ou le réseau électrique, par le biais d’un chargeur) permet d’inverser les réactions, et donc de le « recharger ».

        En associant plusieurs accumulateurs, on obtient une batterie.

 

Batterie(s) lithium-ion

        Les batteries lithium-ion possèdent un excellent rapport énergie stockée/masse et fonctionnent même à basse température, ce qui leur a valu d’alimenter les robots Spirit et Opportunity sur Mars, couplées à des panneaux solaires[4].

Rover MER    Les rovers MER Spirit et Opportunity embarquent des batteries lithium-ion. Crédit : NASA, source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Mars_Exploration_Rover#/media/Fichier:Rover1.jpg). Domaine public.

        Les batteries au lithium métallique sont potentiellement beaucoup plus efficaces que les batteries au lithium-ion. Leur principal inconvénient est la formation à l’intérieur de dendrites qui provoquent un court-circuit, ce qui rend la batterie inutilisable et induit un risque d’incendie (le liquide contenu dans l’accumulateur est inflammable). Des solutions pourraient toutefois exister et remettre ce type de batteries dans la course[5]. Sont par exemple possibles des batteries lithium-métal-polymère, lithium-air ou lithium-soufre[6].

        Comme leur nom l’indique, les batteries lithium-ion utilisent quant à elles le lithium sous forme d’ions, et non sous forme métallique. Il en existe plusieurs types, en fonction ou en cours d’étude.

        La plupart des variantes actuelles utilisent une anode de graphite et une cathode de métal additionné de lithium. Cette dernière peut être à base de dioxyde de cobalt (LiCoO2), de dioxyde de manganèse (LiMnO2), ou de phosphate de fer (électrodes LiFePO4, moins chères et moins toxiques)[7].

        Une batterie lithium-titanate, plus performante, est également à l’étude.

        Signalons enfin la batterie lithium-ion-polymère (aussi connue sous son sigle Li-Po), dont l’électrolyte est un polymère gélifié, ce qui la rend plus sûre que les lithium-ions « classiques ».

 

        Ordinateurs portables, smartphones … Les batteries lithium-ion qui les alimentent sont de vrai concentrés d’énergie qui ont envahi notre quotidien. Elles permettront probablement aussi de se passer plus facilement de carburant fossile à l’avenir. Ça valait bien un Prix Nobel, non ?

 

Notes et références

[1] Source : « Le Nobel de chimie 2019 récompense les travaux sur les batteries au lithium », France 24, 9 octobre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.france24.com/fr/20191009-prix-nobel-chimie-2019-batteries-lithium-ion-goodenough-whittingham-yoshino

[2] « 30 octobre 2018 : Kepler, clap de fin … », 2 novembre 2018. Disponible dans les archives de novembre ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/11/30-octobre-2018-kepler-clap-de-fin.html

[3] Source : « Comment fonctionne une batterie Lithium-Ion ? », 01net.com, 24 février 2018. Disponible à cette adresse : https://www.01net.com/actualites/comment-fonctionne-une-batterie-lithium-ion-1378434.html

[4] Source : B. V. Ratnakumar et al., « Li-Ion Rechargeable Batteries on Mars Exploration Rovers ». Disponible à cette adresse : https://trs.jpl.nasa.gov/bitstream/handle/2014/38400/05-3884.pdf

[5] Source : « Le principal obstacle aux batteries lithium-métal plus performantes est tombé », Futura Sciences, 28 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/tech-principal-obstacle-batteries-lithium-metal-plus-performantes-tombe-77379/

[6] Source : « Une batterie lithium-soufre, avec du graphène et des nanotubes de carbone, stocke 3 fois plus d’énergie », Roulez électrique.com, 23 mai 2017. Disponible à cette adresse : http://roulezelectrique.com/une-batterie-lithium-soufre-avec-du-graphene-et-des-nanotubes-de-carbone-stocke-3-fois-plus-denergie/

[7] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux accumulateurs au lithium. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Accumulateur_lithium


5 octobre 2019 : début de la Fête de la Science

Fête de la Science 2019

        C’est parti !

        La Fête de la Science 2019 a lieu du 5 au 13 octobre 2019 en France métropolitaine (« continentale »), et du 9 au 17 novembre 2019 en Corse, en outre-mer et à l’international[1].

        Après une cuvée 2018 consacrée à « la science face aux idées reçues », cette 28ème édition a pour thématique nationale « raconter la science, imaginer l’avenir »[2].

        Pendant 10 jours, tu auras, chère lectrice, cher lecteur, la possibilité de découvrir les sciences, techniques et innovations, partagées par des passionné(e)s (scientifiques, médiateurs …).

        Leurs objectifs (je reprends le site de la Fête de la Science mot pour mot) :

  • Sensibiliser le grand public à la culture scientifique
  • Favoriser le partage des savoirs et les échanges entre les chercheurs et les citoyens
  • Faciliter l'accès à une information scientifique de qualité
  • Faire découvrir le travail des scientifiques et les métiers issus de la recherche
  • Valoriser le travail de la communauté scientifique
  • Permettre à chacun de s'approprier les enjeux des évolutions scientifiques pour une participation active au débat public
  • Susciter des vocations chez les jeunes en stimulant leur l'intérêt pour la science et la curiosité à l'égard des carrières scientifiques

        Le tout dans une approche ludique et festive[3] …

 

        Je t’invite donc à te renseigner sur les activités organisées près de chez toi. Et à participer aux événements qui t’intéressent …

 

 

Notes et références

[1] Source : site Web de la Fête de la Science. Disponible à cette adresse : https://www.fetedelascience.fr/

[2] La thématique de 2018 avait inspiré un article sur les infox. Celle de 2019 est beaucoup plus large. Difficile d’en faire un article précis …

[3] Source : site Web de la Fête de la Science. Disponible à cette adresse : https://www.fetedelascience.fr/pid34623-cid145283/le-concept.html


25 septembre 2019 : les océans et les glaces encore plus menacés que prévu

Cosmogonies

        Le 25 septembre 2019, le GIEC[1] a rendu un rapport concernant l’état des océans et de la cryosphère[2]. Et le tableau est encore plus sombre que prévu !

        Le sujet du réchauffement climatique a déjà été longuement abordé dans un article de ce blog[3]. Je t’encourage donc, chère lectrice, cher lecteur, à te (re)plonger dedans pour mieux comprendre la suite de ce nouvel article.

        Les explications ayant donc déjà été données précédemment, je vais me borner à pointer ce qui est pire qu’annoncé précédemment. Et ça fait froid dans le dos …

 

Si rien n’est fait …

        En l’absence d’action pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, le scénario RCP8.5 du GIEC se réalisera (et il est bien parti pour !).

        Avec de très gros dégâts à la clé[4].

 

Hausse du niveau des océans

        Elle pourrait atteindre 1,10 mètre d’ici 2100 (au de 0,98 m dans le rapport précédent). Ça semble peu élevé, mais c’est largement suffisant pour forcer des centaines de millions de personnes à aller voir ailleurs (il y a déjà potentiellement 280 millions de personnes à déplacer avec une hausse des températures de « seulement » 2°C[5]). En cause : la submersion pure et simple de certaines portions de littoral particulièrement basses, mais également l’eau salée qui va s’infiltrer à l’intérieur des terres côtières en lieu et place de l’eau douce des nappes phréatiques.

        Voici ce que donnerait une élévation du niveau de la mer d’1 mètre sur certaines côtes particulièrement exposées (les zones inondées sont en bleu-gris) (source : http://flood.firetree.net) :

Mer du Nord        Côtes de la mer du Nord : submersion d’une partie des Pays-Bas, du Danemark, de l’Allemagne, du Royaume-Uni, de la Belgique et du Nord-Pas-de-Calais.

Golfe du Lion        Golfe du Lion (France) : submersion de la Camargue et d’une partie du littoral languedocien.

Delta du Pô        Delta du Pô (Italie) : submersion du delta, de la lagune de Venise et d’une partie de Ravenne.

Delta de la Rivière des Perles        Delta de la Rivière des Perles (Chine) : submersion partielle de Guangzhou (Canton).

Delta du Mississipi        Delta du Mississippi (États-Unis) : submersion d’une partie de la Nouvelle-Orléans.

Delta du Nil        Delta du Nil (Égypte) : submersion partielle, isolement d’Alexandrie.

        En ce qui concerne les pays insulaires « au ras de l’eau » comme les Maldives ou certains États du Pacifique, la situation sera particulièrement tendue, avec des submersions à répétition. En attendant leur submersion définitive si la hausse du niveau marin se poursuit …

 

Des océans plus chauds et plus acides

        Les océans stockent de plus en plus de chaleur. Ils stockent également une grande partie du dioxyde de carbone émis par les humains, ce qui les rend plus acides.

        Si certaines espèces peuvent migrer pour aller trouver une eau plus fraîche ailleurs, ce n’est pas le cas des herbiers sous-marins, des mangroves et des récifs coralliens, condamnés à rester sur place.

        En ce qui concerne les coraux, ils pourraient subir des épisodes de blanchissement[6] non plus environ tous les 10 ans, mais tous les ans, et ce dès 2030. Très mauvais pour les récifs, ainsi que pour la biodiversité qu’ils abritent et pour les 500 millions de personnes qui en dépendent par le biais de la pêche.

Corail blanchi    Corail blanchi, Grande Barrière de Corail, Australie. Auteur : J. Roff. Image non modifiée. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Coral_bleaching#/media/File:Bleachedcoral.jpg). CC BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/).

        Petite précision : les herbiers (de posidonies, par exemple) et les mangroves stockent le carbone beaucoup plus efficacement que n’importe quel écosystème purement terrestre[7]. Et les coraux l’emprisonnent dans leur « squelette » calcaire. Perdre ces écosystèmes serait donc désastreux pour la séquestration du dioxyde de carbone.

 

Des glaces en fonte accélérée

        La fonte des glaces de cet été est un bon aperçu de ce qui nous attend. Le sujet a également été abordé dans ce blog au mois d’août[8].

        La fonte des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique est devenue la principale contribution à la hausse du niveau des océans[9]. Pas mieux du côté des glaciers de montagne : ceux situés à relativement « basse altitude » (Europe, Caucase …) devraient perdre plus de 80% de leur volume d’ici 2100.

        La fonte totale de la banquise arctique en été n’est plus qu’une question de temps. 2030 ? 2040 ? Quelle que soit la date, l’ours polaire devra s’adapter à sa disparition, et très vite.

        Qui dit réchauffement, dit aussi précipitations neigeuses moindres. Donc des rivières moins alimentées en eau, avec tout ce que cela implique.

        Et en ce qui concerne le permafrost, il pourrait fondre dans une proportion allant jusqu’à 99%[10]. En relâchant au passage encore plus de gaz à effet de serre et autres « surprises » indésirables jusqu’alors emprisonnées dans la glace, comme du mercure ou des agents pathogènes en sommeil.

 

Une météo de plus en plus extrême

        Avec des océans plus chauds, les phénomènes météo extrêmes seront plus fréquents et plus intenses. Les cyclones, inondations, canicules … vont donc faire plus de dégâts. Pas besoin de développer davantage.

        Petite précision pour celles et ceux qui utilisent les vagues de froid hivernales pour nier l’existence du réchauffement climatique : le réchauffement déstabilise la dynamique des masses d’air, ce qui autorise des incursions de la part de l’air polaire plus bas en latitude l’hiver (provisoirement)[11]. Le paradoxe n’est donc qu’apparent. Et ne pas confondre non plus météo (à très court terme) et climat (moyenne à long terme) …

 

        La situation est donc plus qu'urgente. À ce niveau-là, il faut vraiment une action forte à tous les niveaux. L’effort sera-t-il fait ?

 

 

Notes et références

[1] GIEC : Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat.

[2] Cryosphère : ensemble de l’eau à l’état solide à la surface de la Terre (neiges, glaces, permafrost …)

[3] « Climat : attention, surchauffe ! », 26 octobre 2018. Disponible dans les archives d’octobre 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/10/climat-attention-surchauffe.html

[4] Source : « Selon le rapport du Giec, océans et glaces plus que jamais menacés », Libération, 25 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/planete/2019/09/25/selon-le-rapport-du-giec-oceans-et-glaces-plus-que-jamais-menaces_1753353

[5] Source : « Que dit le rapport de l'Onu sur les océans et la cryosphère ? », Geo, publié le 29 août 2019, mis à jour le 30 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.geo.fr/environnement/principaux-points-du-rapport-de-lonu-sur-les-oceans-et-la-cryosphere-197278

[6] Blanchissement du corail : expulsion des bactéries qui vivent en symbiose avec lui. Le corail devient beaucoup plus vulnérable et peut mourir.

[7] Source : « Les herbiers de Posidonies », Planet Vie, 6 juin 2016. Disponible à cette adresse : https://planet-vie.ens.fr/article/2197/herbiers-posidonies

[8] « Été 2019 : coup de chaud sur l’Arctique », 9 août 2019. Disponible dans les archives d’août 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/08/été-2019-coup-de-chaud-sur-l-arctique.html

[9] Source : « Que dit le rapport de l'Onu sur les océans et la cryosphère ? », Geo, publié le 29 août 2019, mis à jour le 30 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.geo.fr/environnement/principaux-points-du-rapport-de-lonu-sur-les-oceans-et-la-cryosphere-197278

[10] Source : « Rapport du Giec : Océans et cryosphère, deux puissantes armes anti-réchauffement en péril », 20 minutes, 24 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/planete/2611967-20190924-rapport-giec-oceans-cryosphere-deux-puissantes-armes-anti-rechauffement-peril

[11] Source : « Le changement climatique est-il à l’origine des vagues de froid ? », Sciences et Avenir, 7 janvier 2018. Disponible à cette adresse : https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/climat/le-changement-climatique-est-il-a-l-origine-des-vagues-de-froid_119600


Septembre 2019 : C/2019 Q4 (Borissov), une comète venue d’ailleurs

Comète Borissov_Gemini Observatory    Photographie couleur de C/2019 Q4 (Borissov) par l’observatoire Gemini, dans la nuit du 9 au 10 septembre 2019. Copyright : Gemini Observatory, NSF, AURA. Source de l’image : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/objet-interstellaire-premiere-image-couleur-objet-interstellaire-c-2019-q4-77559/

 

        Le 30 août 2019, la comète C/2019 Q4 a été repérée pour la première fois par un astronome amateur, Guennadi Borissov[1]. Une photo en couleurs a été prise dans la nuit du 9 au 10 septembre 2019 par l’observatoire Gemini North, à Hawaï. Cet objet s’est avéré être une « comète interstellaire ».

        D’où vient-elle ? Comment sait-on qu’elle ne vient pas du Système solaire ? Peut-on l’observer de plus près ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Une comète interstellaire

        Une écrasant majorité des comètes connues jusqu’à présent voyage uniquement à l’intérieur du Système solaire. Certaines peuvent être éjectées suite à un passage près du Soleil ou des planètes géantes. Ce type d’objets a déjà été présenté dans un article de ce blog[2]. Originaires d’un « réservoir » de noyaux de glaces et de poussières situé au-delà des orbites des planètes, les comètes ne s’approchent du Soleil qu’à l’occasion d’une perturbation dudit réservoir (par le passage d’une étoile à proximité, par exemple).

        La comète C/2019 Q4 (Borissov) est différente : elle n’est pas originaire du Système solaire, elle vient de l’extérieur. D’où le qualificatif d’« interstellaire ».

 

Une trajectoire très excentrique …

        À défaut d’un passeport indiquant son système d’origine ou d’avoir pu la suivre avec une balise Argos, les astronomes ont tout de même pu déterminer que la comète C/2019 Q4 (Borissov) était uniquement de passage à proximité du Soleil. Comment ?

        Tout objet nouvellement détecté est signalé à la communauté astronomique. Laquelle peut l’observer et suivre son déplacement apparent par rapport aux étoiles. Les lois de la gravitation étant les mêmes pour tout le monde, la trajectoire de l’objet peut être déterminée.

        Pour la quasi-totalité des objets du Système solaire, les trajectoires sont des ellipses.

Ellipse    Différentes caractéristiques d’une ellipse. F1 et F2 : foyers ; a : demi grand axe ; b : demi petit axe ; C : centre. Auteur : M. W. Toews. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Ellipses#/media/File:Ellipse_semi-major_and_minor_axes.svg). CC0 (https://creativecommons.org/publicdomain/zero/1.0/deed.en).

        Une ellipse est caractérisée à partir de la longueur de son grand axe et de son petit axe. Les foyers de l’ellipse se trouvent sur le grand axe, alignés avec le centre. Le plus souvent, la longueur de la moitié du grand axe (appelée « demi grand axe ») est notée a, celle de la moitié du petit axe (appelée « demi petit axe ») est notée b.

        L’excentricité (notée e) d’une ellipse représente son « aplatissement » par rapport à un cercle. Elle est calculée en effectuant le rapport de la distance centre-foyer au demi grand-axe[3], soit e = F1C / a. Ou selon une autre formule : e = (a-b) / (a+b)[4]. Les deux reviennent au même.

        Dans le cas d’un cercle, les deux foyers et le centre sont confondus, donc son excentricité vaut 0. Plus une ellipse est « aplatie », plus ses foyers s’écartent et plus son excentricité augmente.

        Pour une excentricité égale à 1, la trajectoire s’ouvre et devient une parabole.

        Enfin, une excentricité strictement supérieure à 1 correspond à une trajectoire hyperbolique.

        Tout objet dans le Système solaire dont la trajectoire a une excentricité inférieure à 1 est en orbite autour du Soleil. Par exemple, l’orbite de la Terre, presque circulaire, a une excentricité de 1,017. La comète Hale-Bopp, au contraire, a une orbite très allongée, d’une excentricité de 0,995[5]. Elle met des milliers d’années à boucler une telle orbite.

        La comète C/2019 Q4 (Borissov), quant à elle, affiche une excentricité supérieure à 3[6]. Elle n’est donc que de passage.

 

… et très inclinée !

        En reconstituant la trajectoire de la comète, les astronomes ont pu déterminer qu’elle venait d’une région située dans la direction de la constellation de Cassiopée[7].

Cassiopée    Région d’origine (cercle rouge) de la comète C/2019 Q4 (Borissov), dans la constellation de Cassiopée. Source de l’image : logiciel Stellarium.

        La région en question est très proche du plan de la Voie Lactée, ce qui renforce l’hypothèse d’une origine en dehors du Système solaire.

        La comète C/2019 Q4 (Borissov) a donc été éjectée d’un autre système stellaire, ce qui la rend très intéressante.

 

        La comète C/2019 Q4 (Borissov) est donc le deuxième objet interstellaire connu à visiter le Système solaire, après l’astéroïde 1I/‘Oumuamua en 2017. Envoyer une sonde spatiale l’étudier aurait permis d’en savoir beaucoup plus sur elle, mais la comète fonce à 110 000 km/h, et elle est de plus en plus difficile à atteindre à mesure que le temps passe[8]. Heureusement, les observations au télescope seront possibles pendant plusieurs mois[9]. À suivre …

 

 

Notes et références

[1] La transcription du nom du découvreur de la comète varie selon les sources.

[2] «La ménagerie du Système solaire », 21 décembre 2018. Disponible dans les archives de décembre 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/12/systeme-solaire.html

[3] Source : « L’excentricité », sur le site de l’ENS de Lyon. Disponible à cette adresse : http://acces.ens-lyon.fr/acces/thematiques/paleo/variations/tp-milankovitch/excentricite

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’excentricité orbitale. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Excentricité_orbitale

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la comète Hale-Bopp. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/C/1995_O1_(Hale-Bopp)

[6] Source : « Détection d'une étrange comète interstellaire en approche de notre système solaire », National Geographic, 16 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.nationalgeographic.fr/espace/2019/09/detection-dune-etrange-comete-en-provenance-dun-autre-systeme-stellaire

[7] Source : Bill Gray, A list for asteroid and comet researcher, 10 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://groups.yahoo.com/neo/groups/mpml/conversations/messages/35237?guccounter=1&guce_referrer=aHR0cHM6Ly9mci53aWtpcGVkaWEub3JnLw&guce_referrer_sig=AQAAAIR3jFlQlAbh6ZDS7hC-KEdOGnYcJ_TsLiNbqRQbROyvF7v1c3hdEmUNX4qKUtLMcX30F8Gkfg0-GO5PaU94D8rraKkZqHmm5fEsVPEEOZM_68Wg1_cDYJARCE43gX--I4ZRm9a3V8BMZ9LxuD9CfyP3El7NcGQLeBX5HbLt5RUG. Ce sont des coordonnées astronomiques en ascension droite (RA) et déclinaison (dec) qui sont annoncées, la constellation de Cassiopée n’est pas nommée.

[8] Source : « Comment intercepter C/2019 Q4 Borisov, la première comète interstellaire ? », Ciel et espace, 20 septembre 2019. Disponible (avec accès payant) à cette adresse : https://www.cieletespace.fr/actualites/comment-intercepter-c-2019-q4-borisov-la-premiere-comete-interstellaire

[9] Source : « Première image en couleur de l'objet interstellaire C/2019 Q4 », Futura Sciences, 17 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/objet-interstellaire-premiere-image-couleur-objet-interstellaire-c-2019-q4-77559/


12 septembre 2019 : mise en service des premiers bus à hydrogène en France

Bis repetita placent[1]

Ecureuil

        On l’attendait plutôt du côté de Pau, le premier bus à hydrogène français a finalement été mis en service en région parisienne le 12 septembre 2019[2].

        Ce nouveau bus est souvent présenté comme « vert ». Mais l’est-il vraiment ? Quels sont ses avantages par rapport aux véhicules électriques à batteries ou thermiques ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Comment ça marche ?

        Avant de commencer, petite précision : le bus dit « à hydrogène » fonctionne au dihydrogène (molécule de formule chimique H2).

        Les bus en question présentent un moteur électrique, alimenté par une pile à combustible. À l’intérieur de cette pile, le dihydrogène réagit avec le dioxygène de l’air, ce qui produit des électrons. Le système a déjà été présenté plus en détail dans ce blog à l’occasion de la mise en service de l’Alstom Coradia iLint, il y a près d’un an.[3].

        Le dihydrogène est stocké dans un réservoir. Le bus fait donc le plein dans une « station-service » dédiée au lieu de se brancher sur une prise électrique.

 

Avantages et inconvénients par rapport aux autres bus

        Par rapport à un bus électrique à batterie, il y a deux avantages. D’une part, il faut moins de temps pour faire le plein de dihydrogène (une vingtaine de minutes) que pour recharger des batteries au lithium. D’autre part, l’autonomie du bus à pile à combustible est de 300 km[4]. Les batteries actuelles ne permettent pas une grande autonomie, à moins de sacrifier de la place à l’intérieur du bus. Des solutions techniques semblent toutefois se dessiner : supercondensateurs pour une recharge plus rapide, recharge par la route[5] …

        En comparaison de son homologue thermique, un bus à dihydrogène n’émet pas de particules fines, et seule de l’eau est rejetée, ce qui lui donne une image « verte ». Mais ce véhicule est-il vraiment écologique à 100% ?

Station à hydrogène    Station de recharge des bus à dihydrogène. Source : Engie , sur le site Web de GreenUnivers (https://www.greenunivers.com/2017/09/a-pau-bus-electriques-rouleront-a-lhydrogene-167619/).

        Comme expliqué précédemment dans l’article sur le train à dihydrogène, tout dépend du mode du mode d’obtention du « combustible ». Les bus inaugurés le 12 septembre en région parisienne sont alimentés avec du dihydrogène fabriqué par reformage du méthane (comme 95% du gaz produit en France), un procédé qui dégage beaucoup de dioxyde de carbone. Nettement moins écologique … Les bus bientôt mis en service dans le Pas-de-Calais et à Pau, quant à eux, seront abreuvés d’un dihydrogène obtenu par électrolyse de l’eau[6]. Les émissions de gaz à effet de serre dépendent alors du mode de production de l’électricité : très faible si elle est obtenue à l’aide de panneaux solaires, maximale si elle provient de centrales au charbon.

        Gros inconvénient à signaler : le prix (600 000 euros pièce, soit le double d’un bus « classique » à moteur thermique[7]). Avec en prime l’installation d’une unité de recharge en dihydrogène …

 

        La mise en service de bus à dihydrogène est une étape dans le lancement de cette source d’énergie en France. Ces débuts sont toutefois encore assez timides. La carte des stations à dihydrogène est encore quasiment vide[8], et celles disponibles pour faire le plein sont très rares (une bonne partie de celles qui existent déjà est d’usage privé). Donc un peu de patience avant d’envisager un investissement dans une voiture à dihydrogène …

 

 

Notes et références

[1] À prendre plutôt ici comme une antiphrase …

[2] « Les premiers bus à hydrogène entrent en service en France », Libération, 12 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/depeches/2019/09/12/les-premiers-bus-a-hydrogene-entrent-en-service-en-france_1750875

[3] « 17 septembre 2018 : entrée en service de l’Alstom LHB Coradia iLint », 21 septembre 2019. Disponible dans les archives de septembre 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/09/17-septembre-2018-alstom-lhb-coradia-ilint.html

[4] « Les premiers bus à hydrogène entrent en service en France », Libération, 12 septembre 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/depeches/2019/09/12/les-premiers-bus-a-hydrogene-entrent-en-service-en-france_1750875

[5] « Écomobilité : le bus se recharge par la route ! », Consoglobe, 8 août 2013. Disponible à cette adresse : https://www.consoglobe.com/ecomobilite-bus-charge-route-kaist-cg

[6],[7] « Les premiers bus à hydrogène entrent en service en France », Libération, 12 septembre 2019 (en fin d’article). Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/depeches/2019/09/12/les-premiers-bus-a-hydrogene-entrent-en-service-en-france_1750875

[8] Carte disponible sur le site Web de Vig’Hy, l’observatoire de l’hydrogène. Disponible à cette adresse : https://www.vighy-afhypac.org/


29 août 2019 : abandon du projet ASTRID

Abandon du projet ASTRID : quelques piscines encore squattées pour pas mal de temps …

Barils

        Cette semaine, le blog va aborder une nouvelle plutôt discrète dans les médias. Le 29 août 2019, le Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA) a annoncé l’abandon du projet ASTRID[1] : « le projet de construction d’un réacteur prototype n’est pas prévu à court ou moyen terme »[2].

        Le lancement de la 4ème génération de réacteurs nucléaires en France est donc repoussé aux calendes grecques.

        Au fait, qu’est-ce qu’un réacteur de 4ème génération ? Quels sont ses impacts en matière d’environnement ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Réacteur « nouvelle génération » ?

        Les centrales nucléaires fonctionnent sur le même principe : l’utilisation de la fission nucléaire pour chauffer de l’eau (directement ou par utilisation d’un fluide intermédiaire, dit « caloporteur »). La vapeur formée va entraîner une turbine reliée à un générateur, et ainsi produire de l’électricité[3].

        Il existe plusieurs générations de réacteurs nucléaires[4].

        La 1ère génération regroupe les réacteurs construits avant 1970. Exemple : Chooz A (près de la frontière franco-belge, en déconstruction).

        La 2ème génération regroupe des réacteurs construits entre 1970 et 1998. La plupart sont des réacteurs dits « à eau pressurisée » (REP) (en anglais Pressurized Water Reactor, ou PWR). Les réacteurs actuellement en service en France sont de cette génération.

        La 3ème génération a été développée à partir des années 1990. Elle prend en compte le retour d’expérience du fonctionnement des réacteurs de 2ème génération (y compris l’accident de Tchernobyl). Le réacteur européen à eau pressurisée (plus connu sous son sigle anglais EPR) fait partie de cette génération.

        La 4ème génération est quant à elle encore à l’étude. Plusieurs pistes sont testées : utilisation d’uranium 238 (qui représente 99% de l’uranium extrait) ou de thorium (3 fois plus abondant sur Terre que l’uranium), consommation de déchets radioactifs ou surgénération.

        La surgénération n’est pas nouvelle : en France, elle a déjà été mise en œuvre dans les réacteurs Phénix, Rapsodie et Superphénix. D’autres pays testent ce type de réacteurs. Un surgénérateur produit plus d’isotopes[5] fissiles[6] qu’il n’en consomme.

Superphénix_IAEA    Le réacteur Superphénix. Crédit : Agence Internationale de l’Énergie Atomique (IAEA). Image non modifiée. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Superphenix#/media/File:Superphenix_04710008_(8134166148).jpg). CC BY-SA 2.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0/)

        ASTRID est un réacteur de 4ème génération, successeur « amélioré » de Superphénix.

 

Avantages et inconvénients des réacteurs de type ASTRID

        Les centrales nucléaires actuelles ne consomment que de l’uranium 235. Les réacteurs dits « à neutrons rapides » (comme ASTRID) peuvent quant à eux également utiliser de l’uranium 238. Ça tombe bien, l’enrichissement de l’uranium en a produit un stock considérable (plus de 300 000 tonnes rien qu’en France)[7]. Il n’y aurait donc plus besoin d’importer d’uranium avant très longtemps.

        Autre avantage : ces réacteurs pourraient également consommer du plutonium (pour l’instant entreposé en piscines).

        Enfin, ces réacteurs pourraient également servir à transformer des déchets radioactifs pour qu’ils soient moins actifs et dangereux moins longtemps.

        Parlons maintenant des sujets qui fâchent.

        Malgré tous ces avantages, ASTRID reste un réacteur nucléaire, avec tous les risques que ça peut bien présenter.

Réaction eau et sodium    Réaction de l’eau et du sodium. Auteur : Tavoromann. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Sodium#/media/File:Naatriumi_reaktsioon_veega_purustab_klaasist_anuma.jpg).  CC BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/)

        Le fluide caloporteur est dans son cas du sodium liquide. Petit souci : le sodium est inflammable à l’air (à haute température) et réagit de façon littéralement explosive avec l’eau.

        Notons toutefois que des solutions techniques pourraient être apportées pour réduire les risques (sans néanmoins jamais atteindre le zéro absolu en la matière).

 

        ASTRID (et les réacteurs de 4ème génération en général) a donc ses avantages, mais aussi quelques inconvénients, notamment en termes de sécurité. Et surtout, il arrive à un moment où le nucléaire en général est sujet à débat. Son abandon est-il une bonne ou une mauvaise nouvelle ? Je te laisse, chère lectrice, cher lecteur, forger ton propre avis sur ce sujet …

 

 

Notes et références

[1] Source : « La construction du réacteur de 4ème génération Astrid n'est plus envisagée », Le Figaro, 30 août 2019. Disponible à cette adresse : http://www.lefigaro.fr/flash-eco/la-construction-du-reacteur-de-4eme-generation-astrid-n-est-plus-envisagee-20190830

[2] Source : « Nucléaire : la France abandonne la quatrième génération de réacteurs », Le Monde, publié le 29 août 2019, mis à jour le 30 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/08/29/nucleaire-la-france-abandonne-la-quatrieme-generation-de-reacteurs_5504233_3234.html

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux centrales nucléaires. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Centrale_nucléaire

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux générations de centrales nucléaires. Disponible à cette adresse :  https://fr.wikipedia.org/wiki/Générations_de_réacteurs_nucléaires

[5] Isotope : « variante » d’un élément chimique. Les isotopes d’un élément ont le même nombre de protons, mais pas le même nombre de neutrons.

[6] Fissile : terme qui qualifie un isotope qui peut subir une fission nucléaire sous l’effet de l’impact d’un neutron.

[7] Source : page Web du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA) consacrée au projet ASTRID. Disponible à cette adresse : http://www.cea.fr/Pages/domaines-recherche/energies/energie-nucleaire/astrid-option-quatrieme-generation.aspx?Type=Chapitre&numero=2


2019 : l’Amazonie brûle !

Amazonie : le côté obscur de « J’haïr » Bolsonaro mis en lumière

Dessin

        Le sujet a été copieusement évoqué dans les médias, et s’est même invité au G7 : la forêt amazonienne subit une augmentation spectaculaire du nombre d’incendies qui la consument !

        Un désastre à l’origine de quelques phrases chocs et « piques » en tous genres (dont je m’abstiendrai de parler), mais également de quelques « approximations » auxquelles nous allons nous intéresser.

        La forêt amazonienne est-elle vraiment le « poumon vert » de la planète ? Que deviennent les zones brûlées ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le « poumon vert » de la Terre ?

        L’expression a une popularité certaine.

        Elle est pourtant fausse : un poumon permet à un organisme d’absorber du dioxygène et de rejeter du dioxyde de carbone.

        S’il est vrai qu’une forêt (composée de végétaux) rejette du dioxygène par photosynthèse, elle rejette aussi du dioxyde de carbone. Une fois arrivée à maturité, elle présente à la fois des arbres en croissance (chez lesquels la photosynthèse domine effectivement) et des arbres morts, qui se décomposent en absorbant du dioxygène. Ce qui est le cas de la forêt amazonienne[1]. Laquelle a par contre une influence certaine sur le climat, aussi bien local (elle le rend beaucoup plus humide, par évapotranspiration) que mondial.

Diatomées vues au microscope    Diatomées vues au microscope. Auteur : Prof. Gordon T. Taylor, Stony Brook University - corp2365, NOAA Corps Collection. Source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Phytoplancton#/media/Fichier:Diatoms_through_the_microscope.jpg). Domaine public.

        Le principal fournisseur en dioxygène de la Terre est l’océan[2]. Le phytoplancton effectue lui aussi de la photosynthèse. S’il n’est pas mangé, il coule vers le fond océanique, enfouissant à l’occasion de la matière organique, et donc du carbone. Le phytoplancton a donc un rôle très important : il est à la base de la chaîne alimentaire marine, fournit 50% du dioxygène respiré par les êtres vivants sur Terre et sert de « pompe à dioxyde de carbone »[3].

 

La vie après la forêt

        Les incendies sont particulièrement nombreux, surtout au sud de l’Équateur.

Feux Amazonie MODIS    Les incendies en Amérique du Sud, du 15 au 22 août 2019, observés par les instruments MODIS des satellites Terra et Aqua. Auteur : Joshua Stevens, NASA Earth Observatory. Source : https://www.earthobservatory.nasa.gov/images/145498/uptick-in-amazon-fire-activity-in-2019

Carte Amazonie    Extension de la déforestation  en Amazonie brésilienne (jusqu’en 2005) . Les zones concernées sont en rouge. Les réserves naturelles sont en vert foncé, les territoires amérindiens en orange. Source : https://www.cartograf.fr/img/indiens_bresil/carte_bresil_amazonie_legale_zone_protegee_deforestation_territoire_indien.jpg

        Une comparaison des images de satellite et d’une carte de la déforestation en Amazonie permet de constater que les feux ont lieu essentiellement dans des zones déjà touchées. Les feux servent en effet à préparer le sol pour les cultures à venir, dans des parcelles agricoles déjà gagnées sur la forêt. S’ils ne sont pas éteints à temps (par la pluie, par exemple[4]), ils atteignent la forêt[5], comme c'est le cas actuellement.

        Le sol amazonien est en effet très pauvre (sauf en quelques endroits où il a été enrichi par les Amérindiens, pour former de la terra preta). Le feu permet de lui restituer une partie des minéraux utiles à la croissance des plantes. Au bout de quelques années, le sol est épuisé. Ce qui oblige à trouver de nouvelles terres …

        Il existe bien des initiatives de reboisement. Mais une forêt replantée n’a pas la richesse en biodiversité de l’originale[6]. Une forêt tropicale met par ailleurs au minimum plusieurs décennies à se reconstituer[7].

 

        Les incendies de la forêt amazonienne sont les plus médiatisés. Rappelons toutefois que la forêt africaine est également concernée (et même plus). L’Indonésie est également touchée. Avec en prime dans ce pays un projet qui ne va pas arranger la situation : le déménagement de la capitale en pleine forêt, sur l’île de Bornéo ..

 

 

Notes et références

[1] Source : «20 % de notre oxygène» vient de l’Amazonie : pourquoi le chiffre de Macron est à nuancer », Le Parisien, 23 août 2019. Disponible à cette adresse : http://www.leparisien.fr/societe/20-de-notre-oxygene-vient-de-l-amazonie-pourquoi-le-chiffre-de-macron-est-a-nuancer-23-08-2019-8138214.php

[2] Source : « Le poumon vert de la planète, c'est quoi ? », Futura Sciences. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/pollution-poumon-vert-planete-cest-991/

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au phytoplancton. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Phytoplancton

[4] Le réchauffement climatique, qui va lui aussi contribuer à assécher le climat local, ne va pas aider …

[5] Source : « La déforestation à l'origine des dramatiques incendies en Amazonie », France Inter, publié le 22 août 2019, mis à jour le 23 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.franceinter.fr/environnement/la-deforestation-a-l-origine-des-dramatiques-incendies-en-amazonie

[6] Surtout en Amazonie, particulièrement riche de ce point de vue.

[7] Les valeurs avancées sont assez variables dans les médias en général : 50, 200, voire un millier d’années ! Donc pas de valeur plus précise indiquée dans cet article …


18 août 2019 : les adieux à l’Okjökull

Okjokull

        Un peu de choix cette semaine, ça change un peu !

        En ce qui concerne les incendies en Amazonie, j’aborderai probablement le sujet la semaine prochaine, puisqu’il en sera question pendant la réunion du G7 à Biarritz. Wait and see, comme disent les anglophones …

        J’ai donc décidé de parler des « obsèques » d’un glacier islandais. L’Okjökull[1] a en effet été officiellement « déclaré mort » (il a été déclassé en 2014). Le 18 août 2018, une plaque a été inaugurée à son emplacement, pour commémorer le premier des quelque 400 glaciers islandais à disparaître, victime du réchauffement climatique[2].

        Qu’est-ce qu’un glacier ? Comment se forme-t-il ? Comment disparaît-il ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Glacier : définition

        Attention : on parle ici des glaciers naturels, pas des fabricants et/ou vendeurs de crème glacée. Et encore moins des plaques de givre plus ou moins épaisses qui tapissent les parois des congélateurs.

        Un glacier est formé par accumulation de couches de neige. La pression augmente avec l’épaisseur, ce qui compacte la neige et la transforme en glace. Tant que son épaisseur est inférieure à environ 50 mètres, la glace a un comportement cassant, à l’origine des grandes crevasses visibles à la surface des glaciers. Au-delà de cette épaisseur, elle adopte un comportement plutôt visqueux, et commence à « s’écouler » vers l’aval. La glace prend alors la forme d’une grande « langue » qui érode les roches qu’elle rencontre. Ces dernières sont transportées et déposées sous formes de moraines.

Schéma_glacier     Schéma d’un glacier. Auteur : Rémih. Source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Glacier#/media/Fichier:SchémaLégendéGlacier.JPG). Domaine public.

        L’Okjökull avait été déclassé en 2014, car il n’atteignait plus les 50 mètres d’épaisseur. Il ne pouvait donc plus se déplacer sous l’effet de son propre poids[3].

 

Comment disparaît un glacier

        Pas la peine de faire de mystère là-dessus. Comme son nom l’indique, un glacier est fait de glace. Et la glace, ça a une fâcheuse tendance à fondre quand il fait chaud …

        La source de chaleur à laquelle on pense le plus en ce moment est le réchauffement climatique. Un « coupable » dont sont victimes la plupart des glaciers depuis la fin du « Petit Âge Glaciaire », suite à la révolution industrielle. Les chutes de neige ne compensent plus la fonte de la glace. Les glaciers sont de plus en plus courts et de moins en moins épais. Pas besoin d’aller au bout du monde pour trouver des exemples, ils sont déjà assez parlants dans les Alpes ou les Pyrénées.

Glacier d'Ossoue    Comparaison de deux photos du glacier d’Ossoue (Hautes-Pyrénées), prises en 1921 et en 2007. Source de l’image : http://www.randonneepyrenees.com/2_photo/glaciers_vignemale.html

        Des solutions sont bien testées, à l’image de la couverture de certains glaciers[4]. Mais c’est très insuffisant, et surtout ça n’agit pas sur l’origine de la fonte de la glace …

        L’eau de fonte peut s’accumuler dans un lac glaciaire. Dans ce cas, le principal danger est une éventuelle et brutale vidange, par rupture du barrage naturel à l’origine du lac, par exemple.

        Le réchauffement climatique n’est toutefois pas le seul « agent » capable de détruire des glaciers. Certains de ces « glaçons géants » sont en effet posés sur des volcans ! Tant que ces derniers sont inactifs, aucun problème. L’affaire se corse en cas d’éruption. La température augmente alors subitement, ce qui fait fondre la glace. L’eau peut s’accumuler et former un lac qui se videra brutalement, en produisant un jökulhlaup (mot d’origine islandaise, qui se prononce approximativement « yeukeul-leuip »)[5]. L’eau peut également se mélanger avec des cendres volcaniques, ce qui provoque des coulées de boue appelées lahars (ça marche aussi avec de fortes pluies). Ces derniers suivent alors les vallées, qu’ils dévastent. Une série de lahars très connue s’est produite dans la nuit du 13 au 14 novembre 1985, sur les pentes du Nevado del Ruiz, en inondant plusieurs villes, dont Armero et Chinchina. Bilan : environ 23 000 morts (soit la 2ème pire catastrophe volcanique du 20ème siècle, après l’éruption de la Montagne Pelée, en Martinique, en 1902)[6].

 

        Relâchée soudainement, l’eau de fonte des glaciers peut provoquer des dégâts.

        Mais ce n’est pas tout. Même en coulant au fur et à mesure de sa production, elle contribue aussi à l’augmentation du niveau des océans.

        Les glaciers servent par ailleurs de réserve d’eau pour les fleuves nés dans les montagnes, alimentés par la fonte des glaces et des neiges, ce qui garantit un débit minimal. Plus de glaciers, plus de réserves. Un problème pour les êtres vivants qui dépendent de cette eau …



Notes et références

[1] « Le glacier de l’Ok (volcan islandais) »

[2] Source : «Okjökull », Libération, 22 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.liberation.fr/planete/2019/07/22/okjokull_1741496. L’article annonce la date de la « cérémonie ». Laquelle a effectivement bien eu lieu à la date dite …

[3] Source : « L'Islande va rendre hommage à l'Okjökull, le premier glacier disparu à cause du réchauffement climatique », France Info, 23 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/l-islande-va-honorer-okjokull-son-premier-glacier-englouti-par-le-rechauffement-climatique_3547971.html

[4] Source : « Des couvertures sur un glacier suisse, protection dérisoire contre la fonte des glaces », Sciences et Avenir, publié le 12 décembre 2015, mis à jour le 14 décembre 2015. Disponible à cette adresse : https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/des-couvertures-sur-un-glacier-suisse-protection-derisoire-contre-la-fonte-des-glaces_17418

[5] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux jökulhlaups. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jökulhlaup

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’éruption du Nevado del Ruiz de 1985. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Éruption_du_Nevado_del_Ruiz_en_1985


11-15 août 2019 : 4ème éruption de l’année pour le Piton de la Fournaise !

Coulée

        Cette semaine, ce sera un peu de géologie (pour changer). Du 11 au 15 août 2019, le Piton de la Fournaise est entré en éruption pour la 4ème fois de l’année (après février-mars, juin et les 29 et 30 juillet)[1].

        Pourquoi des éruptions aussi fréquentes ? Ces éruptions sont-elles dangereuses ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le Piton de la Fournaise : un volcan de point chaud

        Le Piton de la Fournaise est un volcan « de point chaud ». Le concept a déjà été abordé dans ce blog à l’occasion de la découverte d’un volcan près de Mayotte[2].

        Le point chaud en question, dit « de la Réunion », est actif depuis environ 65 millions d’années. Il s’est particulièrement fait remarquer au moment de son arrivée à la surface de la planète, en crachant des millions de kilomètres cubes de lave qui ont formé les trapps[3] du Deccan, en Inde. Une éruption colossale, qui a apporté une contribution certaine à l’extinction de masse de la fin du Crétacé en détraquant le climat terrestre.

Carte géologique Inde     Carte géologique simplifiée de l’Inde. Les trapps du Deccan sont en rose. Source : https://www.cartograf.fr/img/Inde/carte_regions_geologique_inde.png

        Tectonique des plaques oblige, le point chaud a depuis fabriqué une longue chaîne de volcans : les îles Laquedives, les Maldives, les îles Chagos et enfin les îles Mascareignes (dont l’île Maurice et la Réunion).

 

Un volcan très actif

        Le Piton de la Fournaise est l’un des volcans les plus actifs de la planète. Depuis 1998, il est entré en éruption plusieurs fois par an (mis à part un « repos » entre 2010 et 2014)[4]. 4 éruptions en moins d’1 an, ça peut paraître beaucoup. Le volcan a toutefois déjà accompli cet « exploit » en 1998, 1999 et 2018, et il a même fait « mieux » en 2005, 2015 et 2003, avec respectivement 5, 6 et 8 éruptions !

        Si elles sont très fréquentes, ces éruptions ne sont pas particulièrement dangereuses. Il s’agit de coulées de lave basaltique (donc de volcanisme non explosif), qui se déroulent en grande majorité dans une caldeira[5] isolée par des falaises appelée l’« enclos Fouqué » , et le long de la « pente du Grand Brûlé »[6].

Localisation des éruptions    Localisation des éruptions sur une carte en relief de la Réunion. Source de la carte : https://ignrando.fr/boutique/relief-ile-de-la-reunion.html

        Les dégâts se limitent en général à de la végétation brûlée et à une route (la route nationale 2) à reconstruire (quand la lave la traverse). Cette route est d’ailleurs surnommée « la route des laves ».

        Certaines coulées atteignent l’océan. Il peut alors se produire des explosions dites « phréato-magmatiques »[7]. Au contact de l’eau, une fine pellicule de verre se forme autour de la lave. La lave encore chaude gonfle cette enveloppe et finit par la percer pour s’écouler un peu plus loin. Le processus se répète jusqu’au refroidissement de la lave, ce qui donne des laves en coussins, ou en anglais pillow lavas[8]. En se solidifiant, les coulées agrandissent l’île.

        Il peut également se produire des éruptions en dehors de l’Enclos Fouqué. Les coulées peuvent alors toucher des villages au sud-est de l’île. La vitesse de progression des coulées permet d’évacuer les habitants des zones menacées.

 

        C’est spectaculaire, donc[9], mais sans risque tant qu’on ne se trouve pas sur le chemin de la lave …

 


Notes et références

[1] Source : « La Réunion : le Piton de la Fournaise en éruption pour la quatrième fois cette année », RTL, 11 août 2019. Disponible à cette adresse : https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/la-reunion-le-piton-de-la-fournaise-en-eruption-pour-la-quatrieme-fois-cette-annee-7798173983

[2] « 16 mai 2019 : un nouveau volcan sous-marin fait trembler Mayotte », 24 mai 2019. Disponible dans les archives de mai 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/05/16-mai-2019-nouveau-volcan-sous-marin-mayotte.html

[3] Trapp : grand plateau constitué d’un épais empilement de coulées de lave basaltique.

[4] Source : activité du Piton de la Fournaise depuis 1998, sur le site de l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP). Disponible à cette adresse : http://www.ipgp.fr/sites/default/files/liste_activite_fournaise_1998_2019_0.pdf

[5] Caldeira : dépression créée par l’activité volcanique.

[6] Source : « Le Piton de la Fournaise », Institut de Physique du Globe de Paris. Disponible à cette adresse : http://www.ipgp.fr/fr/ovpf/piton-de-fournaise[7] Source : définition du Piton de la Fournaise sur Futura Sciences. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/volcan-piton-fournaise-16031/

[8] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux pillow lavas. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pillow_lava

[9] Pour avoir un aperçu des éruptions les plus spectaculaires, voir cette page : http://www.ipreunion.com/volcan/reportage/2019/08/15/piton-de-la-fournaise-piton-de-la-fournaise,106500.htm


Été 2019 : coup de chaud sur l’Arctique

Coup de chaud Arctique

        Cette semaine, j’aurais pu parler du Flyboard Air, après l’exploit du 4 août. Mais j’ai préféré parler d’un événement dont la durée et l’intensité valent bien eux aussi un article sur ce blog : le coup de chaud qui sévit cet été sur l’Arctique.

        On a pu entendre dans les médias quelques infos alarmistes du style « 40% de la glace du Groenland a fondu ». Il est temps d’expliquer de façon claire et concise ce qui se passe dans le coin.

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Vague de chaleur en Arctique

        Le mois de juin a été particulièrement chaud en Arctique. L’Alaska, le nord-est du Canada, le Groenland et la Sibérie ont connu des températures particulièrement élevées, comme le montre la carte suivante :

Anomalie de température pour juin 2019 par rapport aux normales de 1981-2010    Carte d’anomalies de températures relevées dans le monde en juin 2019 par rapport à la moyenne des années 1981 à 2010. Le bleu représente des températures plus basses, le rouge des températures plus élevées. Copyright : ECMWF, Copernicus Climate Change Service. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/actualites/74013325-juin-2019-le-plus-chaud-sur-le-globe-et-en-europe

        Des records ont été battus en Alaska en juillet 2019 : 32,2°C par exemple à Anchorage (la plus grande ville de l’État), une valeur qui pulvérise le précédent record de 29,4°C établi en juin 1969. La chaleur a également concerné la Sibérie orientale. Cette situation est due à un phénomène de « blocage », avec un dôme d’air chaud qui stagne et empêche la formation de nuages. D’où un mercure qui grimpe toujours plus dans les thermomètres [1]… Ce phénomène est également à l’origine de la canicule de juin 2019 en Europe, également abordée dans un article de ce blog[2].

        Le 14 juillet, un autre record a été battu : 21°C à Alert, au Canada[3]. Une température qui peut sembler « fraîche » dans ce contexte. Sauf que la station météo qui l’a mesurée se trouve à moins de 900 km du pôle nord, et qu’il y fait au maximum 5,9°C en moyenne au plus « chaud » de l’été[4].

 

Des incendies géants

        Un début d’été particulièrement chaud et sec, donc. Rien de mieux pour favoriser les incendies.

        Pas besoin de pyromanes pour les allumer, des impacts de foudre tout à fait naturels suffisent. L’Alaska, le Canada, le Groenland et la Sibérie ont ainsi vu plus de 100 feux se déclarer. Ils enflamment non seulement des forêts, mais également des sols tourbeux[5]. Pour information : la tourbe est faite de débris de végétaux accumulés en milieu humide, donc riche en carbone. Elle est d’ailleurs utilisée par endroits comme combustible alternatif au charbon[6].

Feux-Arctique-espace    Image de satellite de la Sibérie, prise le 21 juillet 2019. Traduction : smoke = fumée ; fires = incendies. Copyright : Joshua Stevens, NASA Earth Observatory. Source : https://www.futura-sciences.com/planete/breves/banquise-arctique-incendies-precedent-ravagent-arctique-vus-espace-965/

        Problème : ces incendies libèrent beaucoup de dioxyde de carbone (une estimation a été faite à environ 100 mégatonnes du 1er au 21 juillet). Mais ils produisent également des cendres et de la suie, sombres, dont une partie va se déposer à proximité … sur de la neige ou de la glace.

 

Une fonte des glaces accélérée

        Quand de la cendre ou de la suie se dépose sur de la neige ou de la glace, cette dernière devient plus sombre. Au lieu de réfléchir la lumière du Soleil, elle va l’absorber et fondre. Les eaux de fonte s’écoulent ensuite en rivières qui se dirigent vers la mer.

Groenland glace noire    La calotte glaciaire du Groenland, noircie et en fonte. La taille des personnes donne une idée de la largeur de la « rivière » qui écoule les eaux de fonte. Source : https://www.tuxboard.com/photos-groenland-hd-avion-de-chasse/

        Cet obscurcissement de la glace est combiné cet été à des températures particulièrement élevées : au Groenland, des valeurs positives ont été relevées à 3 200 mètres d’altitude, au sommet de la calotte glaciaire. Résultat : le 31 juillet, ladite calotte a perdu 1 mm d’épaisseur sur 60% de sa surface, soit une perte de 10 milliards de tonnes d’eau. Pour le seul mois de juillet, la perte de glace a été estimée à 197 milliards de tonnes, ce qui a élevé le niveau des océans de 0,5 mm[7].

        Petite précision utile : quand la rumeur parle de 40% de glace fondue, elle est en partie fausse. Le chiffre de 40% est plausible, mais c’est en fait la proportion de la surface de la calotte qui a été touchée par la fonte, pas son volume. Sinon, le niveau des océans aurait monté de 3 mètres !

        Et du côté de la banquise, ce n’est pas mieux : elle est beaucoup moins étendue et plus fine que la moyenne des années 1981 à 2010, comme le montre la carte suivante :

Banquise arctique 7 août 2019    Carte de l’extension de la banquise arctique le 7 août 2019. Bleu foncé : zones libres de glace ; blanc : zones complètement occupées par la banquise. Trait orange : extension moyenne de la banquise à cette date, sur la période 1981-2010. Crédit : National Snow and Ice Data Center. Source de l’image : https://nsidc.org/arcticseaicenews/

 

Et le numéro complémentaire …

        Dernier sujet d’inquiétude pour les scientifiques : le pergélisol (ou permafrost). Cette couche de sol gelé en permanence représente un réservoir de carbone enfoui sous forme de matière organique. En dégelant, la matière organique est exposée aux bactéries, qui la dégradent en dioxyde de carbone. Le permafrost contient également du méthane, qui va accélérer le réchauffement en rejoignant l’atmosphère. Ce qui va en retour accélérer la fonte du permafrost[8] …

        Problème : le pergélisol commence à fondre massivement, ce qui n’était pas prévu avant 2090[9].

 

        Y a-t-il encore des climatosceptiques dans la salle ?

 

 

Notes et références

[1] Source : « Chaleur record : près de 34 °C dans le sud de l'Alaska », Météo France, 10 juillet 2019. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/actualites/73988536-chaleur-record-pres-de-34-c-dans-le-sud-de-l-alaska

[2] « Europe : une semaine de canicule », 28 juin 2019. Disponible dans les archives de juin ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/06/europe-une-semaine-de-canicule.html

[3] Source : « Record de chaleur au point habité le plus proche du Pôle Nord », La Voix du Nord, 17 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lavoixdunord.fr/614308/article/2019-07-17/record-de-chaleur-au-point-habite-le-plus-proche-du-pole-nord

[4] Source : « Données des stations pour le calcul des normales climatiques au Canada de 1971 à 2000 » (station d’Alert), Gouvernement du Canada. Disponible à cette adresse : http://climate.weather.gc.ca/climate_normals/results_f.html?stnID=1731&dCode=1&province=NU&provBut=Search&month1=0&month2=12

[5] Source : « Les incendies « sans précédent » qui ravagent l’Arctique vus de l'espace », Futura Sciences, 26 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/breves/banquise-arctique-incendies-precedent-ravagent-arctique-vus-espace-965/

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la tourbe. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tourbe

[7] Source : « Groenland  : la fonte de la calotte a fait monter de 0,5 mm le niveau de la mer », Météo France, 2 août 2019. Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/actualites/74602294-groenland-la-fonte-de-la-calotte-a-fait-monter-de-0-5-mm-le-niveau-de-la-mer

[8] Un mécanisme déjà décrit dans l’article de ce blog consacré le 26 octobre 2018 au rapport du GIEC sur le réchauffement climatique, « Climat : attention, surchauffe ! ». Disponible dans les archives d’octobre 2018 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/10/climat-attention-surchauffe.html

[9] Source : « En Arctique, le permafrost fond 70 ans plus tôt que prévu », Futura Sciences, 22 juin 2019. Disponible à cette adresse. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/rechauffement-climatique-arctique-permafrost-fond-70-ans-plus-tot-prevu-43336/


26 juillet 2019 : le CETA vraiment « bon pour l’environnement » ?

CETA

        Le 23 juillet 2019, l’Assemblée nationale a approuvé la ratification du CETA[1].

        Les avis à propos dudit CETA divergent très fortement : bon pour l’économie selon ses défenseurs, nuisible pour l’environnement pour une partie de ses détracteurs. La position à l’origine de cet article est celle du député Gilles Legendre, qui a affirmé le 26 juillet 2019 que « le CETA, c’est bon pour l’environnement », avec un effet sur les émissions carbone « epsilonesque, quasiment proche de zéro »[2].

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique (avec des sources plutôt objectives).

 

Le CETA : qu’est-ce que c’est ?

        CETA est un sigle qui signifie Comprehensive Economic and Trade Agreement, ou en français Accord Économique et Commercial Global (abrégé en AECG).

        Il désigne un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, dont le but est de supprimer près de 98% des droits de douane[3]. Les 2 344 pages de l’accord sont résumées dans l’article de Wikipédia consacré au CETA, disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_économique_et_commercial_global.

 

Quelles conséquences pour l’environnement ?

        Un groupe d’experts avait déjà été missionné par Emmanuel Macron en 2017 pour donner un avis objectif sur le CETA. Ce groupe, composé d’économistes, experts en environnement et juristes, a rendu un rapport qui a pointé en particulier un « manque d’ambition de l’accord » sur le plan environnemental[4].

        Qui dit accord de libre-échange, dit augmentation des échanges. Cette augmentation et le retard du transport maritime en matière de lutte contre les émissions de polluants ont fait pronostiquer aux experts un CETA « légèrement défavorable » pour le climat.

Carte NOx    Carte des émissions d’oxydes d’azote. Certaines routes maritimes apparaissent clairement. Auteur : projet européen Monitoring atmospheric composition and climate (MACC). Source : https://dr-petrole-mr-carbone.com/pollution-atmospherique-la-carte-du-monde-selon-les-oxydes-dazote/

        Le transport maritime utilise en effet massivement du fioul lourd (qui en brûlant relâche des oxydes de soufre et d’azote, ainsi que des particules fines), et du gazole (pas spécialement plus « propre »). Des solutions comme l’utilisation de carburants alternatifs ou la réduction de la vitesse des navires sont à l’étude[5].

        Un autre risque concerne la stimulation potentielle par le traité de secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre, comme le charbon ou l’extraction de pétrole issu de sables bitumineux[6]. Pour rappel : le charbon est le combustible fossile le plus émetteur de dioxyde de carbone, et l’exploitation des sables bitumineux est très vorace en eau (qui en ressort particulièrement sale) et en énergie (ce qui rend cette source d’énergie peu compétitive).

Exploitation sables bitumineux    Exploitation de sables bitumineux en Alberta. Source : https://energieetenvironnement.com/2018/04/09/sables-bitumineux-de-lalberta-un-plafond-demissions-rempli-de-trous/comment-page-1/

        Autre source d’impact possible : le manque d’harmonisation des pratiques agricoles des deux côtés de l’Atlantique. Le Canada est beaucoup plus « souple » en matière d’organismes génétiquement modifiés (OGM) et de pesticides que l’Union européenne. Ce qui risque fort de pénaliser les agriculteurs du Vieux Continent (qui vont devoir s’adapter pour rester compétitifs), voire d’entraver leur transition écologique[7].   

 

        Le CETA n’est donc a priori pas un cadeau pour l’environnement dans son état actuel. Des mesures complémentaires de limitation des émissions de gaz à effet de serre seraient les bienvenues.

        Et dire qu’il y a un accord du même genre avec le Mercosur dans les tuyaux …

       

        Pour approfondir le sujet, tu peux, chère lectrice, cher lecteur, consulter les liens qui figurent dans les notes et références en fin d’article.

 

 

Notes et références

[1] Source : « Ceta : l'Assemblée nationale approuve la ratification du traité de libre-échange entre l'UE et le Canada », France Info, 23 juillet 2019.

[2] Source : « VIDEO. "Le Ceta, c'est bon pour l'environnement", affirme le député LREM Gilles Legendre », France Info, 26 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/economie/commerce/ceta/video-climat-le-ceta-c-est-bon-pour-l-environnement-affirme-le-depute-lrem-gilles-legendre_3552359.html

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au CETA. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_économique_et_commercial_global

[4] Source : « Les experts missionnés par Macron rendent un avis critique sur le CETA », Le Monde, 8 septembre 2017. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/accord-commercial-europe-canada-ceta/article/2017/09/08/les-experts-missionnes-par-macron-rendent-un-avis-critique-sur-le-ceta_6005122_4998347.html

[5] Source : « Transport maritime : la nouvelle réglementation de 2020 en questions », Connaissance des énergies, 5 avril 2019. Disponible à cette adresse : https://www.connaissancedesenergies.org/transport-maritime-la-nouvelle-reglementation-de-2020-en-questions-190404-0

[6] Source : « « Au cœur du CETA », épisode 3 : CETA et climat font-ils bon ménage ? », Le Monde, publié le 2 novembre 2016, mis à jour le 7 novembre 2016. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/11/02/au-c-ur-du-ceta-episode-3-ceta-et-climat-font-ils-bon-menage_5024330_4355770.html

[7] Source : « CETA : pourquoi l'accord de libre-échange entre l'Europe et le Canada menace l'environnement », GEO, publié le 9 novembre 2018 et mis à jour le 12 novembre 2018. Disponible à cette adresse : https://www.geo.fr/environnement/ceta-pourquoi-laccord-de-libre-echange-entre-leurope-et-le-canada-peut-avoir-des-repercutions-sur-l-environnement-193346


23 juillet 2019 : LightSail 2 déploie sa voile (solaire)

Le lièvre et la tortue, acte 2

Lièvre et tortue

        Le 23 juillet 2019, le satellite LightSail 2 a correctement déployé une voile … solaire ![1]

        Une voile dans l’espace ? Comment est-ce que ça peut marcher sans vent ? Pour quoi faire ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Voile solaire : le principe

        Le principe de la voile est simple, et utilisé sur Terre depuis des millénaires : il s’agit de faire avancer un véhicule grâce au souffle du vent. On peut ainsi propulser des engins sans moteur : voilier, planche à voile, kite surf ou char à voile.

        La voile solaire reprend ce principe, transposé dans l’espace. L’idée n’est pas neuve, et LightSail 2 n’est pas la première à rejoindre l’espace[2]. En l’absence d’air (et donc de vent), ce sont les photons[3], et, dans une moindre mesure, le vent solaire, qui vont prendre le relais. Une voile solaire navigue donc littéralement grâce à la lumière (d’où le nom de LightSail).

LightSail_caractéristiques    Caractéristiques de la voile solaire de LightSail 2. Copyright : The Planetary Society. Source : https://www.dailymail.co.uk/sciencetech/fb-7278501/WHAT-LIGHTSAIL2.html

        La poussée est fournie par la réflexion des photons sur la surface de la voile. Cette dernière doit donc être très grande et très réfléchissante. Elle doit également être très légère.

        Ainsi, la voile de LightSail 2 est un carré de 5,6 m de côté, soit une surface de 32 m², et d’une épaisseur de seulement 4,5 µm (plus fine qu’un cheveu humain). Elle est réalisée en Mylar, une forme de polytéréphtalate d’éthylène (PET) métallisé. Très résistant et très réfléchissant, ce matériau est utilisé dans les enveloppes de ballons sondes, les couvertures de survie ou les filtres solaires, par exemple.

 

À quoi ça sert ?

        La voile solaire sert à propulser un vaisseau. Attention, rien de bien spectaculaire : la voile de 32 m² de LightSail 2 accélère les 5 kg de l’engin de seulement 0,058 mm/s² ! En 1 jour, la vitesse du satellite augmente de 5 m/s, soit 18 km/h. Ce qui a pour effet d’élever son orbite : son apogée[4] s’éloigne progressivement de la Terre[5]. Lentement, mais sûrement.

        Ce mode de propulsion a donc quelques inconvénients. Une faible accélération, comme on vient de le voir, ce qui oblige à concevoir des vaisseaux très légers et des voiles démesurées. On peut également ajouter la difficulté liée au déploiement d’une voile très grande et très fine.

        Inutile donc de songer à faire décoller un vaisseau spatial à l’aide d’une voile solaire. Par contre, on peut s’en servir pour l’accélérer, une fois mis sur orbite. C’est là que le principal avantage de ladite voile va apparaître. Le vaisseau n’a en effet pas besoin d’embarquer de carburant pour être propulsé. Une économie de poids à tous les sens du terme : le carburant représente une partie non négligeable de la masse d’un engin spatial, qu’il faut lancer avec lui (ce qui coûte cher). À la place, le vaisseau va utiliser une ressource inépuisable, la lumière du Soleil, disponible jusqu’à de très grandes distances. L’accélération sera certes très faible comparée à celle fournie par un moteur chimique, mais elle durera beaucoup plus longtemps. Ce qui permettra au final d’obtenir des vitesses bien plus élevées.

Nanosatellite    Un nanosatellite Sprite : un bon aperçu de ce que seraient les sondes du projet Breakthrough Starshot ... Copyright : Zac Manchester. Source de l’image : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/espace-breakthrough-starshot-plus-petits-satellites-monde-sont-orbite-68106/

        À défaut de propulser de gros vaisseaux (comme dans le roman Sunjammer d’Arthur C. Clarke), la voile solaire pourrait permettre de lancer des sondes spatiales miniaturisées à travers le Système solaire, à destination d’Uranus ou Neptune, par exemple.

        Le cas le plus « extrême » d’utilisation de la voile solaire est le projet Breakthrough Starshot, que j’avais brièvement évoqué dans un article précédent de ce blog[6]. Le projet, particulièrement ambitieux, consiste à envoyer des milliers de sondes interstellaires à destination de Proxima du Centaure. Ces sondes seraient très petites (de quelques centimètres seulement) et pèseraient environ 1 gramme. Attachées à des voiles solaires de 4 m², elles seraient visées par des faisceaux laser pendant 10 minutes, ce qui porterait leur vitesse à 20% de celle de la lumière ! Un voyage qui soulève de nombreux problèmes techniques à résoudre.

        À suivre …

 

P.S. : Désolé pour la qualité du dessin, il rendait beaucoup mieux à l’œil. C'est après le passage au scanner que ça s'est gâté ...

 

 

Notes et références

[1] Source : « LightSail 2: La voile solaire américaine s'est déployée dans l'espace «pour voguer parmi les étoiles» », 20 Minutes, 23 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.20minutes.fr/sciences/2569967-20190723-lightsail-2-voile-solaire-americaine-deployee-espace-voguer-parmi-etoiles

[2] Pour l’historique de la voile solaire, voir cette page de Techno-Science.net : https://www.techno-science.net/glossaire-definition/Voile-solaire-page-2.html

[3] Photon : particule de lumière, de masse nulle.

[4] Apogée : point de l’orbite d’un satellite le plus éloigné de la Terre.

[5] Source (en anglais) : page Web du site eoPortal consacrée à LightSail 2. Disponible à cette adresse : https://directory.eoportal.org/web/eoportal/satellite-missions/l/lightsail-2

[6] « 18 mars 2019 : la lévitation optique sort du domaine microscopique », 22 mars 2019. Disponible dans les archives de mars 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/03/18-mars-2019-la-levitation-optique-sort-du-domaine-microscopique.html


21 juillet 1969 : on n’a pas marché sur la Lune, vraiment ?

Astronaute

(« C’est un petit coup de pied pour un homme, mais un bond de géant pour l’humanité »)

 

        Ah, le fameux anniversaire d’Apollo 11 et des premiers pas sur la Lune ! L’occasion pour les plus jeunes de revivre ce moment historique … mais également pour les complotistes d’essayer de se faire entendre et de nous seriner que tout ceci n’a jamais eu lieu !

        Ces derniers le clament haut et fort : depuis 50 ans, on nous ment ! Les missions Apollo ne sont que des superproductions hollywoodiennes, tournées en studio (de préférence dans la célèbre Zone 51[1]) ! Thèse « étayée » par des arguments « scientifiques », images à l’appui …

        Même si je t’encourage, chère lectrice, cher lecteur, à réfléchir par toi-même face au flot continuel d’infox débité par les médias en tous genres, voici quelques contre-arguments à ces âneries.

 

Le drapeau

        Sur les photos, le drapeau américain semble flotter au vent, alors que la Lune n’a pas d’atmosphère (à très peu de choses près). Preuve pour les complotistes que la scène a été tournée en studio.

Drapeau    Buzz Aldrin saluant le drapeau américain. Crédit : NASA. Source : Apollo 11 Image Library (https://www.hq.nasa.gov/alsj/a11/AS11-40-5874HR.jpg)

        Un coup d’œil rapide audit drapeau permet de repérer une réglette insérée dans sa bordure supérieure, bien visible sur la photo précédente. La couche de poussière étant peu profonde sur le site d’alunissage, le drapeau a été difficile à planter, d’où ses ondulations. Dernière précision à son sujet : il ne « flotte » plus à la surface de la Lune. Il a été arraché par le souffle du moteur de l’étage de remontée au moment du départ des astronautes[2].

 

Des ombres pas si obscures

        Les complotistes s’insurgent : on peut voir des détails (objets, astronautes) dans les ombres ! Si le site n’est éclairé que par le Soleil, ça ne devrait pas être le cas. Objection ! Il existe plusieurs objets réfléchissants : les parties métalliques du LEM, les combinaisons des astronautes (de couleur blanche) … et la surface lunaire ! Ben oui, cette surface est peut-être très sombre (elle ne renvoie que 11 ou 12% de la lumière qu’elle reçoit[3]), mais c’est suffisant pour éclairer les paysages terrestres les soirs de Pleine Lune. Donc rien d’anormal.

 

L’absence de cratère suite à l’alunissage

        Le sol lunaire est fait de poussière ? Le moteur aurait alors dû creuser un cratère ! Or, ce n’est pas le cas.

Absence cratère moteur    Le sol sous le moteur du LEM. Pas de cratère en vue … Crédit : NASA. Source : Apollo 11 Image Library (visible ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Rumeurs_sur_le_programme_Apollo#/media/Fichier:AS11-40-5921.jpg)

        Comme signalé précédemment, la couche de poussière est assez fine sur le site d’Apollo 11. Comme c’est justement elle qui est déplacée pour former un cratère, il n’est donc pas étonnant que ce dernier ne soit pas apparu de façon flagrante.

        Par contre, il est bien plus évident sur les autres sites d’alunissage du programme Apollo[4].

 

L’observation directe

        Les éléments des missions Apollo sont longtemps restés invisibles aux observateurs.

        Premier exemple : comment un laser peut-il « retrouver » un réflecteur déposé sur la Lune[5], alors que les télescopes ne peuvent pas « voir » les véhicules lunaires, pourtant bien plus gros ? Avec un faisceau parfait et très étroit (comme il devrait l’être théoriquement), cela relèverait effectivement de l’exploit. Sauf que le faisceau n’est pas rectiligne : il est « dispersé » par sa traversée de l’atmosphère terrestre (particulièrement turbulente) et fait environ 1 km de diamètre en arrivant sur la Lune[6]. Seuls quelques photons sont réfléchis et détectés en retour.

        Autre exemple : l’objet J002E3, découvert en 2002 par un astronome amateur, s’est avéré être l’étage S-IVB de la Saturn V d’Apollo 12[7]. La nature de l’objet a été révélée par le dioxyde de titane de sa peinture, détecté pendant son observation.

Photo Apollo 14 LRO    Le site d’Apollo 14 photographié par la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter. Crédits: NASA/Goddard Space Flight Center/Arizona State University. Source : « LRO Sees Apollo Landing Sites » (https://www.nasa.gov/sites/default/files/thumbnails/image/ap14labeled_540.jpg)

        Enfin, preuve ultime dans cette catégorie : la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter a photographié les sites d’alunissage depuis son orbite à 50 km au-dessus de la surface lunaire. Le cas d’Apollo 14 est particulièrement éloquent : on distingue sur la photo la base du LEM, son ombre, les instruments scientifiques déposés, et même les traces de pas laissées par les astonautes !

 

382 kg de roches lunaires

        Les différentes missions ont rapporté en tout 382 kg de roches lunaires. Des roches qui ne peuvent pas provenir de la Terre : leur surface est criblée de minuscules impacts de micrométéorites[8]. Sur Terre, l’atmosphère brûle ces micrométéorites avant qu’elles ne touchent le sol.

Roche avec microcratères    Roche lunaire rapportée par la mission Apollo 16, constellée de microcratères. Le cube en bas à droite mesure 1 cm d’arête. Crédit : NASA. Source : https://www.lpi.usra.edu/lunar/samples/atlas/images/hires/61195/S72-37972.jpg

        Toujours pas convaincu(e) ?

 

Derniers arguments

        Bon, je vais arrêter les arguments scientifiques (même s’il y en a encore bien d’autres, comme l’absence d’étoiles dans le ciel).

        Terminons avec des arguments un peu plus « terre à terre ».

        Si tout le programme n’était qu’une supercherie, pourquoi avoir pris le risque de falsifier 7 fois une mission lunaire (dont une qui a failli très mal tourner, Apollo 13) ?

        Enfin, l’exploit a même été reconnu par les Soviétiques. Il n’a par contre pas beaucoup été ébruité dans la presse[9] …

 

        Il y a un peu moins de 4 ans, plus de 8 000 photos ont été mises en ligne[10]. Pas vraiment suffisant pour stopper les thèses complotistes apparemment. En même temps, ce genre de thèses a la peau dure : on trouve encore des gens qui essayent de prouver que la Terre est plate, alors que ça fait environ 2 500 ans que le contraire est scientifiquement démontré et plus de 50 qu’on a des photos à l’appui !

 

 

Notes et références

[1] Tant qu’on parle de la Zone 51 : il y a fort à parier qu’elle ne renferme pas le moindre vaisseau extraterrestre ou autre alien. Par contre, on y trouverait bien plus probablement des prototypes d’avions espions comme le Lockheed U-2 ou le Lockheed SR-71 Blackbird.

[2] « Les pas d’Armstrong sur la Lune sont toujours là ! », Ciel & Espace, publié le 29 août 2012, modifié le 30 août 2012. Disponible à cette adresse : https://www.cieletespace.fr/actualites/les-pas-d-armstrong-sur-la-lune-sont-toujours-la

[3] Source (en anglais) : « Moon Fact Sheet », données sur l’albédo (proportion de lumière incidente réfléchie). Disponible à cette adresse : https://nssdc.gsfc.nasa.gov/planetary/factsheet/moonfact.html

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux rumeurs sur le programme Apollo. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Rumeurs_sur_le_programme_Apollo

[5] Ces réflecteurs servent à mesurer la distance Terre-Lune à l’aide d’un laser.

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux rumeurs sur le programme Apollo. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Rumeurs_sur_le_programme_Apollo

[7] Source (en anglais) : « Newly Discovered Object Could be a Leftover Apollo Rocket Stage », Center for Near Earth Object Studies, 11 septembre 2002. Disponible à cette adresse : https://cneos.jpl.nasa.gov/news/news134.html

[8] Source : « L’Homme a bien posé le pied sur la Lune : la preuve ! », Futura Sciences. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/lune-homme-bien-pose-pied-lune-preuve-11745/

[9] Source : « Ce jour-là, l'URSS regardait ailleurs. L'exploit des astronautes américains est volontairement passé sous silence », Libération, 21 juillet 1999. Disponible à cette adresse :.https://www.liberation.fr/cahier-special/1999/07/21/ce-jour-la-l-urss-regardait-ailleurs-l-exploit-des-astronautes-americains-est-volontairement-passe-s_278769

[10] Source : « Ces clichés des premiers pas sur la Lune vont-ils mettre fin aux théories conspirationnistes ? », France Info, 8 octobre 2015. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/sciences/espace/ces-cliches-des-premiers-pas-sur-la-lune-vont-ils-mettre-fin-aux-theories-conspirationnistes_1116669.html


5 et 6 juillet 2019 : bientôt le « Big One » en Californie ?

Big One

        La semaine écoulée depuis l’article précédent a fourni une actualité scientifique plutôt intéressante. J’ai choisi pour thème l’activité sismique en Californie.

        Si les séismes notables ne sont pas particulièrement rares là-bas, deux en moins de 48 heures, par contre, ça suscite déjà bien des interrogations. Et surtout, ça réveille les craintes de « Big One » dans les médias.

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

L’origine des séismes

        Les séismes sont dus aux mouvements de terrain. Ces mouvements peuvent avoir plusieurs origines, comme la tectonique des plaques[1] ou les activités humaines, par exemple. Le mouvement exerce une contrainte sur les roches, qui emmagasinent de l’énergie. La réponse des roches pour relâcher la contrainte consiste à libérer l’énergie par glissement le long de cassures (les failles) : c’est l’origine des séismes.

        Plus l’énergie est accumulée, plus le séisme produit est fort.

        Les failles sont de 3 types.

Types de failles    Les différents types de failles. Source : Wikipédia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Faille#/media/Fichier:Fault_types_TypesDeFailles.jpg), d’après une image de l’USGS. Domaine public.

  • Les failles normales se trouvent en contexte d’extension, et induisent un allongement.
  • Les failles inverses se trouvent en contexte de compression, et provoquent un raccourcissement.
  • Les failles décrochantes (ou transformantes) génèrent un coulissement. Elles sont dites « senestres » quand le compartiment en face semble partir vers la gauche, « dextres » quand il semble partir vers la droite.

 

L’activité sismique en Californie

        Le contexte tectonique californien est assez particulier.

        Le continent nord-américain « chevauche » la dorsale océanique qui « fabrique » le fond de l’océan Pacifique, comme on peut le voir sur le schéma suivant :

Contexte tectonique    Contexte tectonique de l’ouest de l’Amérique du nord. Les dorsales sont représentées par les traits rouges, les fosses de subduction par les traits noirs chargés de triangles et les failles transformantes par des traits accompagnés de flèches. Source : http://www.earth-of-fire.com/article-le-volcanisme-sedimentaire-les-mud-pots-58906713.html

        La plaque océanique située à l’est de la dorsale est segmentée en plusieurs morceaux, qui plongent sous le continent américain au niveau de fosses de subduction. La Californie est « encadrée » au nord par la fosse des Cascades (subduction de la plaque Juan de Fuca, donc zone en compression) et au sud par le golfe de Californie (création de plancher océanique, donc zone en extension). La transition entre ces deux zones ne peut donc se faire que par une faille transformante : la faille de San Andreas.

Failles Californie     Les principales failles actives en Californie. Source : Southern California Earthquake Center (https://www.scec.org/research/ucerf2).

        Un coup d’œil à la carte précédente nous montre que la faille de San Andreas n’est pas la seule présente dans le coin. Elle est accompagnée d’autres failles, plus petites mais tout aussi actives, comme la faille de Hayward.

        Par exemple, les séismes des 5 et 6 juillet derniers auraient été produits par la faille de Garlock[2].

 

Vers le « Big One » ?

        Avant de commencer ce chapitre, qu’entend-on par « Big One » ?

        Il s’agit d’un séisme particulièrement puissant, qui pourrait toucher la Californie dans les années à venir. D’une magnitude d’au moins 8,5 sur l’échelle de Richter[3], il ferait des dégâts considérables[4].

        La carte précédente montre que les failles à proximité de Los Angeles et San Francisco (en rouge) sont les plus susceptibles de générer un séisme prochainement. Si les deux derniers séismes ont relâché de la contrainte sur la faille de Garlock, il en ont probablement rajouté sur les failles voisines, ce qui augmente la probabilité de les voir s’actionner.

        Le séisme de 1906 à San Francisco, de magnitude 8,2 environ[5], donne un aperçu des dégâts que pourrait occasionner le Big One. Notons toutefois que les progrès des constructions parasismiques peuvent donner des résultats spectaculaires, comme au Japon.

 

        Alors oui, le risque que le Big One se produise est très loin d’être nul. Les sismologues savent quels sont les segments de faille à risques. Par contre, ils ne peuvent pas prédire quand exactement les séismes se déclenchent.

Faille nord-anatolienne    Séismes le long de la faille nord-anatolienne. Source : site Web de l’International Continental Scientific Drilling Program (https://www.icdp-online.org/projects/world/asia/north-anatolian-fault/).

        Signalons enfin que Los Angeles et San Francisco ne sont pas les seules grandes villes menacées par l’imminence d’un séisme potentiellement destructeur. Istanbul, par exemple, est construite à proximité de la faille nord-anatolienne. Depuis 1939, les séismes se produisent d’est en ouest sur cette faille. Le segment proche d’Istanbul est le dernier à ne pas avoir fonctionné, et il accumule de l’énergie depuis 1766 ! Le séisme à venir s’annonce lui aussi dévastateur …

 

 

Notes et références

[1] Tectonique des plaques : la partie la plus superficielle de la Terre (la lithosphère, rocheuse et rigide) est découpée en plaques qui se déplacent sur l’asthénosphère (rocheuse, mais au comportement visqueux à l’échelle des millions d’années).

[2] Source : « Séismes en Californie : «La faille de San Andreas va-t-elle se réveiller ?» », Le Parisien, 6 juillet 2019. Disponible à cette adresse : http://www.leparisien.fr/societe/seismes-en-californie-on-peut-craindre-que-cela-reveille-la-faille-de-san-andreas-06-07-2019-8111151.php

[3] Échelle de Richter : pour faire simple, échelle basée sur la mesure de l’énergie libérée par un séisme. Un gain d’1 magnitude correspond à une multiplication de l’énergie libérée par 30. C’est une échelle ouverte : même si on n’a jamais mesuré un séisme de magnitude 10 pour l’instant, il est possible qu’il se produise à l’avenir.

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au Big One. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Big_One

[5] Source : « San Francisco en ruines après le tremblement de terre du 18 avril 1906 », Le Figaro Histoire, 18 avril 2016. Disponible à cette adresse : http://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2016/04/15/26010-20160415ARTFIG00323-san-francisco-en-ruines-apres-le-tremblement-de-terre-du-18-avril-1906.php


3 juillet 2019 : violente éruption du Stromboli

Visite du Stromboli : le nouvel accessoire indispensable ?

 

Casque

        Cette semaine, je vais (enfin !) parler d’autre chose que d’environnement. Le Stromboli a piqué une « colère » qui a tué 1 personne[1] et qui tranche avec son image de volcan « crachouilleur » de fontaines de lave.

        Une éruption aussi violente est-elle exceptionnelle pour ce volcan ?

        Tant que le sujet est abordé, jetons également un œil à l’explosivité des volcans ...

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

L’Italie du sud : une région volcanique

Localisation volcans Italie     Localisation de quelques volcans sur la carte de l’Italie. Source du fond de carte : https://mapchart.net/italy.html

        Le plancher de la mer Méditerranée s’enfonce sous le sud de l’Italie, ce qui « tire » l’Afrique vers le nord[2]. Ce mouvement dit « de subduction » s’accompagne d’un volcanisme particulièrement bien représenté : l’Etna en Sicile, les Îles Éoliennes (dont seuls le Stromboli et Vulcano sont encore actifs), et les Champs Phlégréens et le Vésuve près de Naples, pour ne citer que les volcans les plus connus.

        Notons au passage que Naples est ainsi particulièrement exposée au risque volcanique …

 

L’indice d’explosivité volcanique

        Tous les volcans n’ont pas la même façon d’entrer en éruption.

        Certains, dits « volcans rouges », ont une lave plutôt fluide, d’où les gaz volcaniques s’échappent facilement. Leurs éruptions sont donc pas ou peu explosives : elles font partie respectivement des types hawaïen[3] et strombolien[4]. Ces types sont caractérisés par des coulées et fontaines de lave. Ces éruptions sont relativement peu dangereuses … tant qu’on ne se trouve pas sur le passage de la lave ! Le type strombolien peut occasionnellement émettre des projections : cendres, lapillis[5] et bombes volcaniques (là, ça devient déjà plus dangereux).

        Pour d’autres, dits « volcans gris », la lave est plus riche en silice (dioxyde de silicium SiO2), donc plus visqueuse. Un « bouchon » se forme. Les gaz volcaniques s’échappent difficilement. La pression s’accumule, jusqu’à ce que le « bouchon » cède avec pertes et fracas. Ces volcans ont donc des éruptions explosives, de types vulcanien[6], péléen[7], plinien[8] ou ultra-plinien. L’étendue des dégâts varie : assez localisée pour le type vulcanien, mais d’ampleur mondiale pour les pires éruptions ultra-pliniennes (qualifiées de « supervolcans »), capables de propulser plus de 1 000 km3 de débris dans l’atmosphère et d’entraîner un net refroidissement du climat !

Toba    L’éruption du Toba, il y a environ 74 000 ans, a laissé un « trou » (une caldeira) de près de 100 km de long (encerclé de rouge) dans l’île de Sumatra. Source de la carte : OpenStreetMap (https://www.openstreetmap.org).

        Afin de caractériser la puissance d’une éruption, il existe un indice d’explosivité volcanique. Les éruptions sont ainsi classées de 0 (pour le type hawaïen, d’explosivité nulle) à 8 (pour les supervolcans). Les pires éruptions connues au cours des temps historiques ont atteint un indice de 7 : Santorin (vers -1600), Mont Paektu (vers 946), Samalas (en 1257) et Tambora (en 1815)[9].

 

Et le Stromboli ?

        La plupart du temps, le Stromboli se contente de coulées et de fontaines de lave.

        Ce qui n’exclut pas de temps en temps des éruptions un peu plus explosives, comme celle du 3 juillet dernier. De telles éruptions s’étaient déjà produites à maintes reprises, la dernière fois en 2003. L’éruption de 1930 a même été marquée par l’émission d’une nuée ardente[10], un phénomène plutôt caractéristique du type plinien[11] !

 

        Heureusement, de tels épisodes restent peu fréquents. Alors non, il est peu probable d’avoir à porter un casque de chantier pour visiter l’île de Stromboli !

 

 

Notes et références

[1] Source : « Éruption du Stromboli. Un mort et un blessé après le réveil du volcan en Italie », Ouest France, paru le 3 juillet 2019, modifié le 4 juillet 2019. Disponible à cette adresse : https://www.ouest-france.fr/europe/italie/italie-un-mort-et-un-blesse-dans-la-puissante-eruption-du-volcan-stromboli-6429020

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la mer Méditerranée. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mer_Méditerranée#Géologie

[3] Nommé d’après l’archipel d’Hawaï.

[4] Nommé d’après le Stromboli.

[5] Lapilli : petits fragments de lave solidifiée (taille de l’ordre du centimètre).

[6] Nommé d’après l’île de Vucano.

[7] Nommé d’après la Montagne Pelée, en Martinique.

[8] D’après l’auteur romain Pline le Jeune, qui a décrit l’éruption (de ce type) du Vésuve, en 79 après Jésus-Christ.

[9] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’indice d’explosivité volcanique. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_d’explosivité_volcanique

[10] « Avalanche » de débris volcaniques et de gaz très chauds.

[11] Source : fiche de l’activité volcanique du Stromboli, sur le site de l’ACTIV (Association pour la Connaissance et la Transmission de l’Information en Volcanologie). Disponible à cette adresse : http://www.activolcans.info/eruptions-volcaniques-historiques-du-volcan-Stromboli.html

 


Europe : une semaine de canicule

« Fontaine (version 21ème siècle) »


Fontaine
        Bon ben cette semaine, je vais faire comme tout le monde et parler de la canicule. Une canicule qui frappe une grande partie de l’Europe (Espagne, France, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Autriche, République Tchèque, Danemark, Suède …), et surtout plutôt précoce[1].

        Qu’est-ce que la canicule ? Pourquoi a-t-elle lieu ? Pourquoi y en a-t-il de plus en plus ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Canicule : définition

        Voici la définition que Météo France donne de la canicule : « un épisode de températures élevées, de jour comme de nuit, sur une période prolongée »[2].

        Ce genre d’épisode se produit la plupart du temps au cours d’une période allant de mi-juillet à mi-août. Pendant cette période, l’étoile la plus brillante du ciel nocturne, Sirius (Alpha du Grand Chien, également appelée « Canicula ») se lève et se couche en même temps que le Soleil. D’où le nom de « canicule ».

 

Une situation météorologique particulière

        Pour obtenir un temps aussi stable sur plusieurs jours, il faut tout d’abord une situation de « blocage »[3].

        L’été, la météo de l’ouest de l’Europe est essentiellement dictée par l’anticyclone des Açores. Il s’agit d’une région de haute pression atmosphérique, dans laquelle l’air tourne dans le sens des aiguilles d’une montre.

Hann_Atlas_der_Meteorologie_extrait carte    L’anticyclone des Açores, visible sur une carte de l’Atlas der Meteorologie (isobares[4] et vents de juillet). Julius Hann - Archive/Alfred Wegener Institute. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Azores_High#/media/File:Hann_Atlas_der_Meteorologie_8.jpg).

        Lorsque l’anticyclone en question est positionné au niveau des Açores, les dépressions peuvent passer et balayer l’Europe de l’ouest, ce qui donne une météo fraîche.

        Par contre, si l’anticyclone pose ses valises en Europe, les dépressions sont bloquées, et la météo y devient chaude et sèche.

        La situation météorologique de fin juin 2019 est quant à elle particulièrement favorable à un temps très chaud et très sec. Une dépression (c’est-à-dire une zone de basses pressions avec des vents dans le sens inverse des aiguilles d’une montre) est placée à l’ouest de l’Europe, et un anticyclone à l’est. L’action combinée des deux fait remonter une énorme masse d’air très chaud en provenance du Sahara, d’où les températures relevées cette semaine.

Masses d'air    Le contexte météorologique en Europe fin juin 2019. Source : meteo-paris.com (http://www.meteo-paris.com/actualites/canicule-exceptionnelle-a-venir-d-intensite-comparable-a-2003-22-juin-2019.html).

 

Une fréquence en hausse

        Avec le réchauffement climatique, les canicules ne sont plus le « privilège » des mois de juillet et août. Désormais, des épisodes de forte chaleur peuvent également se produire en juin, comme en 2005 et 2017[5]. À l’avenir, si rien n’est fait pour limiter le réchauffement, la période favorable au phénomène pourrait même s’étaler de mai à octobre.

        Les canicules deviennent également de plus en plus fréquentes et de plus en plus intenses, comme le montre un examen attentif du graphique suivant :

Vagues_chaleur_France_1947_2018    Les vagues de chaleur en France, de 1947 à 2018. Plus la « boule » est grosse, plus la canicule est intense ; plus elle est sur la droite du graphique, plus elle est longue. Source : http://www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/meteo-et-sante/canicules# (« Les vagues de chaleur remarquables »).

        Il y a bien déjà eu des épisodes particulièrement sévères ou prolongés au 20ème siècle (en 1947 et 1983), mais le 21ème siècle est bien parti pour encombrer davantage le graphique.

 

Comment s’en protéger ?

        Le mieux est de rester au frais !

        Je ne vais pas donner de conseils ici, ils tournent déjà en boucle dans les médias.

        Je souhaite par contre, chère lectrice, cher lecteur, te faire prendre conscience du « poids écologique » de la climatisation. Si elle permet de se soustraire à la canicule, elle n’arrange rien en matière d’environnement[6]. Elle consomme beaucoup d’énergie : aux États-Unis, 90% des maisons en sont équipées, et son utilisation représente 6% de l’énergie consommée par l’habitat. Et qui dit plus d’énergie produite, dit davantage de gaz à effet de serre produits. Les gaz réfrigérants utilisés sont une autre source de problèmes. Les chlorofluorocarbures (CFC) ont bien été interdits[7], mais leurs remplaçants, les hydrofluorocarbures (HFC) sont des composés dont certains ont un « pouvoir chauffant » des milliers de fois pire que celui du dioxyde de carbone ! Les fuites de ces gaz renforcent donc le réchauffement climatique, ce qui en retour rend les canicules encore plus difficiles à supporter.

 

        Pour conclure sur la canicule, voici un lien vers un article qui décrit ce à quoi elle pourrait ressembler en France métropolitaine dans 30 ans : https://www.francetvinfo.fr/meteo/canicule/recit-franceinfo-nous-sommes-le-16-aout-2050-et-voici-a-quoi-ressemble-la-canicule-dans-l-hexagone_2895639.html

        À méditer !

 

 

Notes et références

[1] Source : « Météo: l’Europe commence à chauffer, des records de chaleur attendus », Le Nouvelliste, 24 juin 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lenouvelliste.ch/articles/monde/meteo-l-europe-commence-a-chauffer-des-records-de-chaleur-attendus-849611

[2] Source : dossier consacré par Météo France aux canicules, « Vague de chaleur ou canicule ? Définitions ». Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/meteo-et-sante/canicules#

[3] Source : dossier consacré par Météo France aux canicules, « Les situations météo propices aux canicules ». Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/meteo-et-sante/canicules#

[4] Isobare : ligne de pression atmosphérique égale, sur une carte météo.

[5] Source : dossier consacré par Météo France aux canicules, « Vagues de chaleur précoces ». Disponible à cette adresse : http://www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/meteo-et-sante/canicules#

[6] Source : « La climatisation, fléau pour l’environnement », Le Temps, 18 août 2016. Disponible à cette adresse : https://www.letemps.ch/sciences/climatisation-fleau-lenvironnement

[7] Pour cause de responsabilité dans la destruction de la couche d’ozone.

 


16 juin 2019 : le G20 s’engage contre la pollution plastique en mer

Dauphin

        Le 16 juin 2019, un accord de réduction des déchets plastiques en mer a été annoncé par les pays du G20. Ces derniers annoncent leur volonté de réduire les déchets plastiques. Le tout repose sur des mesures volontaires[1].

        Est-ce que ce sera efficace ? C’est en tout cas une bien belle occasion de parler de la pollution plastique dans les mers sur ce blog ...

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le G20

        Le G20 prend la suite du G7.

        Contrairement à une idée reçue, il ne regroupe pas les 20 plus grosses économies de la planète. Il comporte 19 États membres, plus l’Union Européenne. Si une majorité de ces États fait effectivement partie des 20 plus gros produits intérieurs bruts (PIB) de l’économie mondiale[2], tous les membres de ce « top 20 » n’y figurent pas. Ainsi, l’Espagne et les Pays-Bas ne participent au G20 qu’en tant que membres de l’Union Européenne, et la Suisse n’y prend pas du tout part. L’Argentine et l’Afrique du Sud participent en tant qu’économies émergentes[3].

Carte G20    Les États participant au G20. Carte éditée avec mapchart.net (https://mapchart.net/detworld.html).

        Notons que d’autres économies émergentes auraient pu être invitées mais ont été « zappées » : Iran, Malaisie, Nigeria, Thaïlande …

        L’ensemble des pays membres du G20 regroupe les deux tiers de la population mondiale, pour 85% du commerce et 90% du produit mondial brut[4].

 

Qui pollue ?

        Petite précision avant de commencer : la pollution au plastique concerne également les continents, quel que soit le niveau de développement économique.

        Le plastique arrive en mer de plusieurs façons. En voici 3 parmi les plus répandues :

  • Jeté au bord des rivières (avec la variante de la décharge, plus ou moins légale, qui « a les pieds dans l’eau »). Lesquelles rivières se déversent dans des fleuves, qui rejoignent la mer. Les déchets en plastique suivent le mouvement …
  • Jeté sur la plage. Les marées enlèvent les déchets et les emportent vers le large, au gré des courants. Notons que les courants peuvent également déposer des déchets sur les plages, ainsi que les tempêtes : c’est le phénomène de « laisse de mer », tout à fait naturel. La présence de plastique, par contre, ne l’est pas.
  • Jeté directement à l’eau. Eh oui, malheureusement, tout le monde n’attend pas d’être de retour au port pour vider ses poubelles !

        Tous les pays sont concernés. Voici un « palmarès » des plus gros pollueurs au plastique :

Pollution plastique par pays

    Les pays qui polluent le plus les océans. Source : https://fr.statista.com/infographie/14928/pays-pollution-plastique-oceans/. Les autres infographies présentes sur la même page valent également le coup d’œil.

        Sur ces 12 « gros pollueurs au plastique », seuls 4 font partie du G20 (Chine, Indonésie, Brésil, États-Unis) ! D’accord, la Chine et l’Indonésie sont les 2 plus gros pollueurs (et d’assez loin). Toutefois, une éventuelle action de leur part sera nécessaire, mais pas suffisante, si on en croit les chiffres …

 

Le devenir du plastique

        Le plastique, pour fabriquer des objets, c’est super. Pour s’en débarrasser, par contre, c’est galère.

        L’origine du problème que pose le plastique est double. D’abord, sa durée de vie. Les objets en plastique sont particulièrement longs et difficiles à « digérer » en milieu naturel : environ 100 ans pour un briquet, 400 pour une bouteille en plastique et 450 pour un sac[5]. Une sacrée longévité, comparée au temps d’utilisation (souvent particulièrement bref) de ces objets … Autre souci : certains composés ajoutés pour modifier les propriétés des plastiques sont nocifs. Le bisphénol A, par exemple, est un perturbateur endocrinien[6]. La dégradation du plastique libère ces composés dans l’environnement.

        Au cours de leur dégradation, les objets en plastique se fragmentent et donnent des particules de plus en plus petites. Et plus les morceaux sont petits, plus ils sont faciles à ingérer. Le plastique peut ainsi faire son entrée dans la chaîne alimentaire. Pas question de faire du sensationnel avec des photos d’animaux pris dans le plastique ou morts à cause de lui, ce n’est pas le but de ce blog.

Courants    Carte des principaux courants marins de surface. Source : http://enseignants.villamaria.qc.ca/usager7/Science%20et%20technologie%20I/Compl%E9ment%20au%20cours/Eau/Courants%20marins/Les%20courants%20de%20surface.htm

        Soumis aux courants marins, le plastique ne peut que les suivre passivement. Comme les courants en question forment des boucles (ou « gyres »), les déchets finissent par s’accumuler au milieu de ces gyres, et produisent des « radeaux » de taille parfois impressionnante : le « Great Garbage Patch » couvre par exemple une surface équivalente à 2 fois celle du Texas, au nord d’Hawaï. Récupérer ces déchets est un véritable défi. Des expérimentations de solutions sont en cours, mais les méthodes testées risquent de ne pas suffire.

Accumulations plastique    Les principales zones d’accumulation de déchets. Source : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/pollution-oceans-mystere-plastique-disparu-t-il-ete-enfin-resolu-62879/

 

        Le plastique pose donc énormément de problèmes, et il faudra plus que des annonces (fussent-elles du G20) pour les régler. En attendant, le mieux pour participer à la réduction de cette pollution reste de trier ses déchets, voire d’éviter au maximum l’utilisation de plastique ...



Notes et références

[1] Source : « Les pays du G20 s'engagent à réduire la pollution plastique en milieu marin », France Info, 16 juin 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/sante/environnement-et-sante/les-pays-du-g20-s-engagent-a-reduire-la-pollution-plastique-en-milieu-marin_3492791.html

[2] Source : liste des États classés par PIB de l’encyclopédie en ligne Wikipédia. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_PIB_nominal

[3] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au G20. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_des_vingt

[4] Produit mondial brut : somme des PIB de tous les États. Je ne vais pas me lancer dans un cours d’économie, désolé …

[5] Source : « Temps de dégradation des produits courants », Conservation Nature. Disponible à cette adresse : http://www.conservation-nature.fr/article2.php?id=139

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au bisphénol A. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bisphénol_A


14 juin 2019 : Journée Mondiale des donneurs de sang

Exceptionnellement, cet article paraît à 8h00 au lieu de 20h00.

 

Don du sang        Comme tous les ans depuis 2004, le 14 juin est la Journée Mondiale des donneurs de sang (ou du don du sang, les deux appellations apparaissent dans les médias).

        Pourquoi cette date ? Qu’est-ce que les groupes sanguins ? À quoi ça sert ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Pourquoi le 14 juin ?

        Le 14 juin correspond à l’anniversaire de Karl Landsteiner (1868 – 1943), un biologiste autrichien. Il a été récompensé en 1930 du prix Nobel de physiologie ou médecine pour la découverte du système de groupes sanguins ABO (en 1900). Il a également découvert le virus responsable de la poliomyélite (en 1909, avec Constantin Levaditi et Erwin Popper) et le facteur Rhésus (en 1940, avec Alexander Solomon Wiener)[1]. Une série de découvertes qui lui a valu d’être représenté sur les billets autrichiens de 1 000 schillings, avant le passage à l’euro.

Billet 1000 schillings    Les deux faces du billet autrichien de 1 000 schillings. Crédit : VladiMens, source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/File:1000_Schilling_banknote_Karl_Landsteiner_front_back.jpg). Image non modifiée. CC BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.fr).

        Mais au fait, qu’est-ce que les groupes sanguins ? Et à quoi servent-ils ?

 

Les groupes sanguins

        Avant la découverte des groupes sanguins, la transfusion sanguine existait déjà, mais les résultats étaient aléatoires, allant de la réussite spectaculaire au décès du patient transfusé.

        La découverte de Landsteiner permet d’expliquer cette variété de résultats.

        Toutes les cellules d’un organisme sont porteuses de marqueurs qui « signent » en quelque sorte leur appartenance à l’organisme[2]. Les globules rouges (aussi appelés « érythrocytes ») portent eux aussi de tels marqueurs (nommés « antigènes »). Il en existe plusieurs types, regroupés en différents systèmes, dits « érythrocytaires ». Le système ABO est le premier à avoir été découvert, car c’est lui qui est impliqué dans le rejet des transfusions sanguines. Dans ce système, les antigènes présentent 2 variantes : A et B. Les globules rouges ont 4 possibilités :

  • ceux qui présentent uniquement la variante A font partie du groupe A ;
  • ceux qui présentent uniquement la variante B font partie du groupe B ;
  • ceux qui présentent les deux variantes font partie du groupe AB ;
  • ceux qui ne présentent ni l’une ni l’autre font partie du groupe O.

        Le sang contient des anticorps chargés de repérer et de détruire les globules rouges porteurs des antigènes autres que ceux présents sur les érythrocytes de l’organisme. Ainsi, le sang de groupe A comporte des anticorps dits « anti-B » ; le sang de groupe B fait quant à lui appel à des anticorps « anti-A » ; le groupe AB n’a ni les uns ni les autres et le groupe O possède les 2 types d’anticorps. Par exemple, le moindre globule rouge porteur d’antigènes A présent dans un sang de groupe B ou O fera l’objet d’une vigoureuse réaction immunitaire et sera impitoyablement détruit.

        C’est pourquoi on ne peut pas transfuser n’importe quel sang à n’importe qui. Les compatibilités sont résumées dans ce schéma :

Compatibilité groupes sanguins    Compatibilité des groupes sanguins. Les flèches signifient « peut donner à » et partent du donneur vers le receveur. Source : https://www.planetesante.ch/Magazine/Ethique-politique-et-droit/Don-du-sang/L-ABC-des-groupes-sanguins

        Les transfusions sont faisables à l’intérieur de chaque groupe, mais également en partie entre groupes différents.

        Dépourvus d’antigènes, les globules rouges du groupe O peuvent être acceptés par tous : le groupe O est donneur universel. Le sang du groupe AB, quant à lui, est dépourvu d’anticorps, et peut donc recevoir le sang de tous les groupes : le groupe AB est receveur universel.

        Il existe également un système complémentaire : le facteur Rhésus (noté Rh D). Ce système se caractérise par la présence (Rh D+) ou l’absence (Rh D-) de l’antigène Rh D. Les donneurs Rh D- peuvent donner à des patients Rh D+, mais pas l’inverse[3].

        Enfin, il existe également d’autres groupes sanguins, mais ils sont beaucoup plus rares.

 

        Au fait, à quoi est destiné le sang donné ?

Usage dons sang 2016    Utilisation du sang donné en 2016. Source : https://www.sudouest.fr/2016/05/31/infographie-a-quoi-sert-le-don-du-sang-2382739-4696.php

        En 2016, 66% des poches de sang ont servi à traiter des maladies (dont des maladies du sang, des cancers et des insuffisances rénales). Les 34% restants ont servi lors d’interventions chirurgicales (eh oui, il faut bien remplacer le sang qui coule en cours d’opération …)[4].

        Les dons sont donc très importants, d’autant plus que les stocks sont un peu à court ces temps-ci. Je t’invite donc, chère lectrice, cher lecteur, à faire un geste (si tu en as la possibilité). Et puis donner du sang, c’est possible toute l’année, pas seulement le 14 juin !

 

 

Notes et références

[1] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à Karl Landsteiner. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Landsteiner

[2] Sujet déjà évoqué dans ce blog avec cet article : « 12 décembre 2018 : un vaccin pour les abeilles ! », le 14 décembre 2018. Disponible dans les archives de décembre 2018 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/12/12-decembre-2018-vaccin-abeilles.html

[3] Source : « L’ABC des groupes sanguins », Planète Santé, 3 mars 2015. Disponible à cette adresse : https://www.planetesante.ch/Magazine/Ethique-politique-et-droit/Don-du-sang/L-ABC-des-groupes-sanguins

[4] Source : « Infographie : à quoi sert le don du sang ? », Sud Ouest, 31 mai 2016. Disponible à cette adresse : https://www.sudouest.fr/2016/05/31/infographie-a-quoi-sert-le-don-du-sang-2382739-4696.php


5 juin 2019 : des polluants dans les produits bio

Nuage polluants

        Le 5 juin 2019, le magazine 60 Millions de consommateurs a publié les résultats d’une étude menée sur 130 produits bio[1]. Le résultat n’est pas rassurant : « bio » ne signifie pas « exempt de polluants », loin de là ! Et sur certains produits, le bio fait même pire que le « conventionnel ».

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le bio, c’est quoi au juste ?

        Voici le définition donnée par le Ministère de l’agriculture et de l’alimentation sur son site Web :

        « L’agriculture biologique constitue un mode de production qui trouve son originalité dans le recours à des pratiques culturales et d’élevage soucieuses du respect des équilibres naturels. Ainsi, elle exclut l’usage des produits chimiques de synthèse, des OGM et limite l’emploi d’intrants. »[2]

        Les méthodes employées font donc appel à des processus biologiques pour la fertilisation des sols et la protection des cultures. Parmi les plus connues, citons la lutte biologique[3] contre les parasites, le compostage, le paillis, l’utilisation d’engrais verts[4] ...

Larve coccinelle    La larve de coccinelle, un des « moyens » de la lutte biologique. Source de l’image : https://jardinage.lemonde.fr/dossier-656-coccinelle-insecte-utile-jardin.html

        L’élevage se soucie quant à lui du bien-être des animaux, qui passent plus de temps en extérieur.

        Le bio a ses avantages et ses inconvénients, mais globalement, il est plutôt bénéfique pour l’environnement. Une petite question toutefois : si on n’utilise pas de produits chimiques en agriculture bio, alors d’où viennent les polluants retrouvés dans les produits bio ?

 

Bio et pollution

        Les apports de type « engrais » ou « pesticides » ne sont qu’une source de polluants parmi d’autres.

        Les cultures et les élevages ne sont en effet pas isolés de la pollution. Une parcelle peut tout à fait être convertie et être cultivée en agriculture biologique après des années d’agriculture conventionnelle. Certaines molécules apportées auparavant peuvent persister dans le sol pendant des années. Par exemple, la molécule de chlordécone a une persistance estimée à 1 à 4 siècles, selon le type de sol pollué[5]. Le glyphosate aurait quant à lui une demi-vie[6] de quelques dizaines de jours dans le sol (durée variable selon les études)[7].

1 4-dioxine    Molécule de 1,4-dioxine. Les atomes de carbone sont en noir, ceux d’oxygène en rouge et ceux d’hydrogène en blanc. Auteur : Ben Mills. Source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/File:1,4-dioxin-3D-balls.png). Domaine public.

        Par ailleurs, la pollution ne s’arrête pas à la limite d’une parcelle bio. Des polluants peuvent contaminer la parcelle par le sol (transportés par l’eau) ou par les airs (dioxines produites par un incinérateur, par exemple). Le sol n’est pas contrôlé avant d’installer les cultures bio. Les plantes poussent dans le sol pollué et les animaux (qui sortent plus souvent que le bétail « conventionnel ») sont davantage exposés. Les polluants se retrouvent au final dans certains produits bio[8].

        Enfin, certaines substances peuvent provenir du conditionnement des produits. Ainsi, les phtalates, présents dans certains plastiques, ont une affinité particulièrement marquée pour les lipides. L’huile végétale étant essentiellement constituée de lipides, les molécules de phtalate migrent du récipient vers ladite huile et la contaminent. L’usage des plastiques dans l’emballage des denrées alimentaires est donc réglementé[9].

 

        Le tableau n’est donc pas très réjouissant. Mais attention : tout n’est pas à jeter ! Certains produits se distinguent même par leur qualité et leur peu de polluants. Alors, amateurs de bio, ne vous découragez pas !

 

 

Notes et références

[1] « Les aliments bio touchés par la pollution », 60 Millions de consommateurs, 5 juin 2019. Disponible à cette adresse : https://www.60millions-mag.com/2019/06/05/les-aliments-bio-touches-par-la-pollution-14218

[2] Source : « Qu'est-ce que l'agriculture biologique ? », Alim’agri, site du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation. Disponible à cette adresse : https://agriculture.gouv.fr/lagriculture-biologique-1

[3] Les coccinelles qui dévorent les pucerons, par exemple.

[4] Source : « Produire en bio : principes et techniques », Le bio dans l’Aude. Disponible à cette adresse : http://bio-aude.com/produire_en_bio_principes_et_techniques_13.php

[5] Source : Cabidoche, Y.M., Achard, R., Cattan, P., Clermont-Dauphin, C., Massat, F., Sansoulet, J., 2009. « Long-term pollution by chlordecone of tropical volcanic soils in the French West Indies: a simple leaching model accounts for current residue. », Environ. Pollut. 157, 1697-1705. Cité dans « Répartition de la chlordécone dans les composantes des biomasses aériennes et souterraines de cinq variétés de canne à sucre dans un sol volcanique pollué de Guadeloupe », Cirad, juillet 2012. Disponible à cette adresse : https://agritrop.cirad.fr/567654/1/document_567654.pdf

[6] Demi-vie : durée nécessaire pour détruire la moitié des molécules de l’espèce chimique considérée.

[7] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au glyphosate. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Glyphosate#Utilisations_et_polémiques

[8] « Le bio n'est pas toujours meilleur pour la santé selon 60 millions de consommateurs », France Info, 5 juin 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/sante/alimentation/le-bio-n-est-pas-toujours-meilleur-pour-la-sante-selon-60-millions-de-consommateurs_3476301.html

[9] Source : « Les phtalates : un risque à prendre en compte dans la production des huiles alimentaires », Association Française Interprofessionnelle de l'Olive. Disponible à cette adresse : https://afidol.org/moulinier/phtalates/


27 mai 2019 : vers une production de dihydrogène plus verte ?

Soulagement chez les bactéries productrices de dihydrogène

Bactéries

        Le 27 mai 2019, l’Université de Newcastle a annoncé dans la revue Nature Chemistry la mise au point d’un nouveau procédé de production de dihydrogène[1]. Présentée comme « une étape importante vers la production d’un hydrogène ‘vert’ », la méthode promet des économies substantielles d’énergie[2].

        Cette méthode est-elle vraiment plus « verte » ? Y a-t-il plus « écologique » pour obtenir du dihydrogène ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le « réacteur à mémoire »

        Le procédé décrit dans l’article de l’Université de Newcastle fait réagir de l’eau et du monoxyde de carbone pour obtenir du dihydrogène et du dioxyde de carbone.

        Pour faire relativement simple, on va s’éviter des cours de thermodynamique et de chimie. En résumé, de l’oxygène est stocké dans un solide en « phase pérovskite[3] ». Ce solide sert d’intermédiaire pour l’échange d’oxygène entre l’eau (oxydante, qui perd son atome d’oxygène) et le monoxyde de carbone (réducteur, qui en gagne un). La pérovskite sert de « mémoire chimique », ce qui rend la réaction réversible[4] et libère le réacteur des problèmes d’équilibre chimique.

Structure pérovskite    Structure de la pérovskite. Les atomes d’oxygène sont en rouge, ceux de titane en bleu clair (au centre des octaèdres) et celui de calcium en bleu-gris au centre. Source de l’image : https://chemicalstructure.net/portfolio/perovskite/

        Cerise sur le gâteau : le dihydrogène et le dioxyde de carbone ne se croisent jamais. Le dihydrogène produit est donc parfaitement pur. C’est là que l’économie d’énergie est réalisée : les méthodes chimiques nécessitent souvent d’énormes quantités d’énergie pour séparer le dihydrogène du dioxyde de carbone.

        Avantage : contrairement au reformage du méthane, le procédé n’a pas besoin d’hydrocarbures. Mais « petit » bémol : comme lui, il dégage du dioxyde de carbone, dont le rôle en tant que gaz à effet de serre est désormais plus qu’établi …

        Y a-t-il une méthode un peu plus « verte » pour produire le dihydrogène ?

 

Quelles alternatives ?

        Le problème de la pollution liée à la fabrication du dihydrogène a déjà été évoqué dans les débuts de ce blog[5]. 95% du dihydrogène produit l’est à partir de ressources non renouvelables : gaz naturel, hydrocarbures liquides et charbon[6].

        Plusieurs alternatives existent.

        Une piste consiste à utiliser des bactéries pour produire du dihydrogène[7]. Les recherches sont encore en cours.

Site production solaire H2    La plate-forme MYRTE, en Corse, produit du dihydrogène par électrolyse de l’eau, à l’aide de panneaux photovoltaïques. Il est ensuite utilisé pour alimenter une pile à combustible. Source : http://www.faiteslepleindavenir.com/2014/09/16/du-soleil-lhydrogene/

        L’autre voie actuellement utilisée (mais de façon relativement marginale pour l’instant) est l’électrolyse de l’eau. Connue depuis l’an 1800, réalisée en TP de chimie, elle peut être une alternative plus « verte » pour produire du dihydrogène. Seuls points potentiellement émetteurs de dioxyde de carbone : la production de l’électricité nécessaire et le traitement de l’eau. En ce qui concerne l’électricité, une production à base d’énergies renouvelables (comme l’énergie solaire) peut faire l’affaire. Quant à l’eau, il semblerait qu’à l’avenir sa parfaite pureté ne fût plus nécessaire, suite à des recherches récentes[8].

 

        Le dihydrogène « vert » semble donc à portée de main.

        Bon, d’accord, après il reste encore à mettre en place un réseau de distribution du dihydrogène à très grande échelle, mais pour ce qui est de sa production (relativement) propre, on progresse, non ?

 

 

Notes et références

[1] I. S. Metcalfe et al., « Overcoming chemical equilibrium limitations using a thermodynamically reversible chemical reactor », Nature Chemistry, 27 mai 2019. Résumé disponible à cette adresse : https://www.nature.com/articles/s41557-019-0273-2 (accès à l’article complet payant).

[2] Source (en anglais) : « Major step forward in the production of ‘green’ Hydrogen », Newcastle University Press Office, 27 mai 2019. Disponible à cette adresse : https://www.ncl.ac.uk/press/articles/latest/2019/05/greenhydrogen/

[3] À la base, la pérovskite est un minéral (titanate de calcium, CaTiO3). Dans la littérature scientifique, tout assemblage d’éléments chimiques dont la structure ressemble à celle de la pérovskite (de formule chimique ABO3, où A et B sont deux éléments chimiques et O est l’oxygène) peut prendre ce nom. Celle décrite dans l’article a pour formule La0.6Sr0.4FeO3.

[4] Réaction réversible : réaction qui peut se dérouler dans les deux sens.[5] Voir l’article sur l’Alstom LHB Coradia iLint : « 17 septembre 2018 : entrée en service de l’Alstom LHB Coradia iLint », 21 septembre 2018. Disponible dans les archives de septembre 2018 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/09/17-septembre-2018-alstom-lhb-coradia-ilint.html

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au reformage du méthane. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Reformage_du_méthane

[7] Source : « Une super bactérie double la production biologique d'hydrogène », Futura Sciences, 18 avril 2018. Disponible à cette adresse : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/developpement-durable-super-bacterie-double-production-biologique-hydrogene-23446/

[8] Source : « Créer de l’hydrogène à partir d’eau de mer, c’est désormais possible ! », Mer & Océan, le média des mers, 30 mars 2019. Disponible à cette adresse : https://www.mer-ocean.com/creer-de-lhydrogene-a-partir-deau-de-mer-cest-desormais-possible/


16 mai 2019 : un nouveau volcan sous-marin fait trembler Mayotte

La nouvelle menace fantôme ?

Menace fantôme

        Depuis le 10 mai 2018, de nombreux séismes secouent les îles de Mayotte (plus de 1 800 de magnitude[1] supérieure à 3,5). Leur origine semblait mystérieuse, jusqu’au 16 mai 2019 et l’annonce de la découverte d’un nouveau volcan sous-marin à 50 km au large[2].

        Ce phénomène peut amener à se poser plusieurs questions. Pourquoi un volcan à cet endroit ? Quels sont les risques ? La naissance d’un volcan est-elle rare ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

Le point chaud des Comores

        Les îles de Mayotte font partie de l’archipel des Comores. Comme l’ensemble de l’archipel, elles ont une origine volcanique : la région est suspectée d’être placée juste au-dessus d’un « point chaud » (la Terre en compte plusieurs dizaines).

Carte points chauds    Carte des points chauds (ceux situés en Antarctique ne sont pas représentés). Celui des Comores porte le numéro 21. Crédit : Ingo Wölbern. Source : Wikimédia Commons (https://fr.wikipedia.org/wiki/Point_chaud_(géologie)#/media/File:Hotspots.jpg). Domaine public.

        Qu’est-ce qu’un point chaud ? En géologie, il s’agit d’une zone de roches anormalement chaudes. Plus légères, ces roches montent sous la forme d’un panache. Arrivées près de la surface, la diminution de la pression les fait fondre, ce qui donne du magma. Si le magma parvient à percer la croûte terrestre, du volcanisme se met en place.

        Les plaques terrestres ayant la bougeotte et le point chaud restant fixe, il ne se forme pas un seul volcan, mais plusieurs. En plusieurs millions d’années, une chaîne de volcans apparaît. Tant qu’ils sont alimentés en magma, les volcans grandissent. S’ils se forment en mer, ils peuvent même émerger. La plus grande montagne terrestre, le Mauna Kea[3], est d’ailleurs un volcan de point chaud. En s’éloignant du point chaud, les volcans, plus alimentés et soumis à l’érosion, s’usent. Si le point chaud perce en mer et sous les tropiques, une barrière de corail s’installe autour d’eux et forme un lagon. Quand l’érosion a fini de détruire les volcans, il ne reste dans ce cas que des anneaux de corail appelés « atolls ». Comme les plaques océaniques s’enfoncent en vieillissant, les atolls disparaissent sous l’eau et deviennent des guyots. De nombreux archipels océaniques se sont formés ainsi.

Point chaud    Formation d’une chaîne de volcans au-dessus d’un point chaud. L’échelle verticale et la proximité des différents éléments (dorsale, volcans) ont été fortement exagérées.

        Dans l’archipel des Comores, les îles, récentes (moins de 10 millions d’années) n’ont pas encore eu le temps de devenir des atolls. Mayotte présente est la plus ancienne, et est entourée par un récif de corail.Mayotte_spot7    Mayotte vue par le satellite SPOT 7. Les récifs coralliens apparaissent en bleu très clair. Source : https://geoimage.cnes.fr/sites/default/files/drupal/201811/image/em_mayotte_20180303_spot7_0.jpg

        Sur l’île de Grande Comore, au nord-ouest de l’archipel, le Karthala est quant à lui encore actif. Rien d’étonnant donc à ce que le point chaud produise un nouveau volcan.

 

Un volcan à risques ?

        Le volcan le plus dangereux de la zone est le Karthala, qui se contente le plus souvent de coulées de lave, mais peut à l’occasion piquer des colères un peu plus explosives et éjecter des nuages de débris[4].

        En ce qui concerne le nouveau venu récemment découvert, il se trouve à 50 km au large de Mayotte, à 3 500 m de profondeur. Malgré ses dimensions plutôt imposantes (800 m de haut, 4 km de diamètre)[5] et l’impressionnante rafale de séismes qui a accompagné sa naissance, il est pour l’instant peu probable qu’une de ses éruptions fasse des dégâts. Par contre, l’activité du volcan contribue à vider un « réservoir » de magma[6], ce qui déséquilibre les environs et provoque un léger affaissement. Les ajustements nécessaires se font plus ou moins brutalement, d’où les nombreux séismes, un poil plus gênants.

Fonds marins Mayotte    Le fond océanique au large de Mayotte. Le nouveau volcan est visible sur l’image (et il n’est pas le seul). Source : http://www.flotteoceanographique.fr/A-la-une/Decouverte-de-la-naissance-d-un-nouveau-volcan-sous-marin-a-l-Est-de-Mayotte

 

Naissance d’un volcan : est-ce fréquent ?

        Pas tant que ça ! Jusqu’à présent, les volcans les plus jeunes connus étaient l’Ardoukôba (né à Djibouti en 1978), Surtsey (né en 1963 au large de l’Islande) et le Paricutín (né en 1943 au milieu d’un champ, au Mexique).

        Quant aux volcans sous-marins, ils sont bien plus nombreux … mais également beaucoup plus difficiles à observer ! Avec seulement moins de 10% du relief des fonds marins connus[7], certaines naissances ont probablement pu passer inaperçues …

 

 

Notes et références

[1] Magnitude d’un séisme : représentation de l’énergie libérée par un séisme. Il s’agit d’une échelle logarithmique : une augmentation d’1 magnitude correspond à une énergie multipliée par 30.

[2] Source : « Mystère des séismes de Mayotte : c’était un volcan sous-marin », Le Parisien, 16 mai 2019. Disponible à cette adresse : http://www.leparisien.fr/societe/mystere-des-seismes-de-mayotte-c-etait-un-volcan-sous-marin-16-05-2019-8073672.php

[3] Sa partie émergée s’élève à 4 207 m d’altitude. En ajoutant la partie immergée, le volcan s’élève à 10 200 m au-dessus du plancher océanique. Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au Pliocène. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_plus_hauts_sommets

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au Karthala. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Karthala

[5] Source : « Mayotte : naissance d'un volcan sous-marin », France Info, 18 mai 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/meteo/seisme/mayotte-naissance-d-un-volcan-sous-marin_3449111.html

[6] Image à prendre avec des pincettes : une chambre magmatique n’a le plus souvent rien à voir avec un énorme creux rempli de magma ! Il s’agit plutôt d’un ensemble de petites poches reliées par des fractures, rempli de magma.

[7] Source : « Les fonds marins moins connus que le sol lunaire », Tribune de Genève, 8 juin 2016. Disponible à cette adresse : https://www.tdg.ch/savoirs/fonds-marins-connus-sol-lunaire/story/17930424


11 mai 2019 : le CO2 au plus haut depuis 3 millions d’années

Quelles autres barres va-t-il encore franchir ?

Saut perche        La nouvelle est tombée sur Twitter le 11 mai 2019 : pour la première fois dans l’histoire de l’Humanité, la concentration en dioxyde de carbone a dépassé la barre des 415 ppm[1].

        Pourquoi ce nombre ? Quelles sont les implications sur l’environnement ? Jusqu’à quel point est-il possible de faire pire ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

La courbe de Keeling

        La courbe de Keeling est un graphique qui montre l’évolution de la concentration en dioxyde de carbone de l’atmosphère terrestre. Cette concentration est mesurée depuis 1958 à l’observatoire de Mauna Loa, à Hawaï[2], un endroit particulièrement favorable, car en altitude et éloigné des sources et puits de CO2[3]. Ladite courbe est visible sur le Web à cette adresse (page en anglais) : https://scripps.ucsd.edu/programs/keelingcurve/.

Courbe de Keeling_1958_présent    La courbe de Keeling, de 1958 à nos jours. Source : site Web de la Scripps Institution of Oceanography (https://scripps.ucsd.edu/programs/keelingcurve/wp-content/plugins/sio-bluemoon/graphs/mlo_full_record.png).

        Les mesures révèlent plusieurs phénomènes : des variations saisonnières liées à la végétation (à l’échelle de l’année), et surtout une inexorable augmentation de la concentration en CO2 de l’atmosphère : +100 ppm[4] en 50 ans !

        En forant la glace et en analysant les bulles d’air qui y sont prisonnières, les scientifiques ont pu remonter jusqu’à 800 000 ans en arrière (âge des plus anciennes glaces encore existantes). Mises bout à bout avec les données du Mauna Loa Observatory, la courbe ressemble alors à ceci :

CO2_800000ans    Évolution de la concentration en CO2 sur les 800 000 dernières années. Source : site Web de la Scripps Institution of Oceanography (https://scripps.ucsd.edu/programs/keelingcurve/wp-content/plugins/sio-bluemoon/graphs/co2_800k.png).

        On voit bien sur cette dernière courbe que la concentration en CO2 actuelle est inédite depuis 800 000 ans.

        Pour « mesurer » les concentrations en dioxyde de carbone antérieures, les scientifiques doivent ruser. Ils peuvent utiliser les fossiles de végétaux, comme expliqué sur un des articles précédents de ce blog[5].

        En consultant ces « archives », on peut avoir une idée des concentrations en CO2 sur plusieurs centaines de millions d’années. La concentration actuelle retrouve ainsi la valeur qu’elle aurait eu il y a environ 3 millions d’années, au cours du Pliocène[6] !

 

Le Pliocène : visite guidée

        À quoi ressemblait donc la Terre à cette époque ? La géologie nous donne quelques réponses.

        Les continents sont à peu près au même emplacement qu’aujourd’hui, à quelques dizaines de kilomètres près[7]. Signalons toutefois que les Amériques sont encore séparées (plus pour longtemps : l’isthme de Panama achève sa formation à cette époque, ce qui va entraîner la migration de nombreuses espèces et la disparition des marsupiaux d’Amérique du Sud).

        Question climat, la température est plus élevée de 3 ou 4°C. Le Groenland et l’ouest de l’Antarctique sont libres de glace. Seule la calotte Est-Antarctique existe déjà. Conséquence : le niveau des mers est 15 à 20 mètres plus haut[8]. La Mer Noire, la Mer Caspienne et la Mer d’Aral sont encore reliées et forment ce qui reste de la Paratéthys.

Antarctique_Pliocène     L’Antarctique au Pliocène. La topographie du terrain est représentée en nuances de vert/marron/jaune, l’épaisseur de glace en nuances de bleu. Crédit : Giogiogp2, source : Wikimédia Commons (https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Pliocene_topography_ice.png). Image non modifiée. CC BY-SA 4.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/deed.fr).

        Même si la concentration en dioxyde de carbone atmosphérique est bien celle du Pliocène, l’environnement correspondant[9] ne va pas réapparaître tout de suite. Les changements (augmentation de la température, fonte des glaces, hausse du niveau des océans …) se font à l’échelle de plusieurs décennies, voire plusieurs siècles.

 

Peut-on faire encore pire ?

        La perspective offerte par 3°C de plus n’est pas particulièrement réjouissante, surtout en termes de conséquences sur l’environnement[10].

        Ce n’est toutefois pas grand-chose comparé à ce qui pourrait se produire si rien n’est fait pour freiner les émissions de gaz à effet de serre. En utilisant tous les combustibles fossiles, l’humanité ferait augmenter la concentration en CO2 atmosphérique à environ 2 000 ppm (soit 0,2%) et la température de 8,5°C (d’où le nom du scénario « business as usual » des simulations climatiques : RCP8.5). Et en brûlant également les réserves non conventionnelles (comme le pétrole « de schiste » ou celui extrait des sables bitumineux, par exemple), la concentration pourrait atteindre 5 000 ppm(soit 0,5%), pour un réchauffement de 12°C ! Si les 2 000 ppm ont déjà été atteints au Trias, les 5 000 ppm seraient, eux, inédits (du moins sur les 420 derniers millions d’années ; avant, on manque de données)[11].

 

        Alors, les émissions de CO2, stop ou encore ?

 


Notes et références

[1] Source : https://twitter.com/Keeling_curve/status/1128017524627365890?ref_src=twsrc%5Etfw

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la courbe de Keeling. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Courbe_de_Keeling

[3] Source (en anglais) : « Another Climate Milestone Falls at Mauna Loa Observatory », Scripps Institution of Oceanography, 7 juin 2018. Disponible à cette adresse : https://scripps.ucsd.edu/programs/keelingcurve/2018/06/07/another-climate-milestone-falls-at-mauna-loa-observatory/

[4] 1 ppm : 1 partie par million. 100 ppm = 0,01%.

[5] « 25 février 2019 : la disparition des nuages fait grimper la température », publié le 1er mars 2019. Disponible dans les archives de mars 2019 du blog ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2019/03/25-fevrier-2019-la-disparition-des-nuages-fait-grimper-la-temperature.html

[6] Source : « Le niveau de CO2 dans l’atmosphère bat un record vieux de 3 millions d’années », National Geographic, 10 avril 2019. https://www.nationalgeographic.fr/environment/2019/04/le-niveau-de-co2-dans-latmosphere-bat-un-record-vieux-de-3-millions-dannees

[7] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au Pliocène. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pliocène

[8] Source : « Le niveau de CO2 dans l’atmosphère bat un record vieux de 3 millions d’années », National Geographic, 10 avril 2019. https://www.nationalgeographic.fr/environment/2019/04/le-niveau-de-co2-dans-latmosphere-bat-un-record-vieux-de-3-millions-dannees

[9] À quelques différences près, liées à la position des continents, qui a entraîné des modifications des courants océaniques.

[10] Voir l’article « Climat, attention, surchauffe ! », publié le 26 octobre 2019 sur ce blog. Disponible dans les archives d’octobre 2019 ou directement à cette adresse : https://decryptons-la-science.typepad.com/decryptons-la-science/2018/10/climat-attention-surchauffe.html

[11] Source (en anglais) : G. L. Foster, D. L. Royer et D. J. Lunt, « Future climate forcing potentially without precedent in the last 420 million years », Nature Communications, 4 avril 2017. Disponible à cette adresse : https://www.nature.com/articles/ncomms14845


10 mai 2019 : l’Union européenne vit à crédit

Empreintes

        Aujourd’hui 10 mai, c’est le « jour du dépassement » pour l’Union européenne[1].

        Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Comment calcule-t-on le nombre de « planètes nécessaires » ? Pourquoi donner une date ?

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

L’empreinte écologique

        L’empreinte écologique (ou environnementale) mesure la pression exercée par l’Homme sur les ressources naturelles et les services écologiques fournis par la nature[2]. Elle mesure la surface « consommée » par les différentes activités humaines (agriculture, industrie, bâtiment …). Elle est donc exprimée en hectares globaux (notés « hag »).

Empreinte écologique par pays    L’empreinte écologique par pays, exprimée en hectares globaux (M : millions ; B : milliards) (chiffres de 2014). D’après le site du Global Footprint Network (http://data.footprintnetwork.org/#/) (carte originale cliquable).

        Une division par le nombre d’habitants pour chaque pays donne l’empreinte écologique par personne. Avec un sacrément grand écart entre l’Érythrée (0,5 hag par personne) et le Qatar (14,2 hag par personne). Je préviens, la carte réserve quelques surprises …

Empreinte écologique par habitant     L’empreinte écologique par personne et par pays, exprimée en hectares globaux (chiffres de 2014). D’après le site du Global Footprint Network (http://data.footprintnetwork.org/#/) (carte originale cliquable).

        Pour comprendre le calcul du « jour du dépassement » et le nombre de « planètes nécessaires », il faut ajouter la notion de biocapacité. La biocapacité est la surface disponible pour produire des ressources (renouvelables) ou absorber les déchets produits par leur consommation (dont le dioxyde de carbone), avec les pratiques actuelles[3]. Elle est elle aussi exprimée en hectares globaux. Entrent dans le calcul :

  • les terres cultivées,
  • les pâturages,
  • les forêts,
  • les zones de pêche,
  • le bâti[4].

        En additionnant les biocapacités des différents pays et en divisant le total par la population humaine totale de la Terre, on obtient une biocapacité moyenne de 1,7 hag par habitant.

        Les pays dont l’empreinte écologique par habitant est inférieure à 1,7 hag n’épuisent donc en principe pas les ressources naturelles. Si toute l’humanité avait les mêmes pratiques, 1 seule planète lui suffirait. On comprend donc un peu mieux les intervalles retenus pour les classes de la carte précédente. Inférieur à 1,7 hag par habitant : 1 planète suffit ; 1,7 à 3,4 : il en faudrait une deuxième ; 3,4 à 5,1 : il en faudrait carrément 3, et ainsi de suite … Voici donc d’où vient le fameux nombre de « planètes nécessaires » dont les médias parlent à l’occasion.

 

« Créanciers » et « débiteurs »

        La biocapacité n’est toutefois pas répartie de façon uniforme. Elle est étroitement liée à la taille des pays, à leur climat et aux écosystèmes présents.

Biocapacité par paysLa biocapacité par pays, exprimée en hectares globaux (M : millions ; B : milliards) (chiffres de 2014). D’après le site du Global Footprint Network (http://data.footprintnetwork.org/#/) (carte originale cliquable).

        La population n’étant pas répartie de façon uniforme à la surface de la planète (loin de là !), certains pays en apparence bien pourvus en biocapacité mais très peuplés, comme la Chine et l’Inde, disposent finalement de peu de biocapacité par habitant :

Biocapacité par habitant    La biocapacité par personne, exprimée en hectares globaux (chiffres de 2014). D’après le site du Global Footprint Network (http://data.footprintnetwork.org/#/) (carte originale cliquable).

        En comparant la biocapacité (B) à l’empreinte écologique (E) pour chaque pays, on obtient deux catégories de pays : les « créanciers » (B > E) et les « débiteurs » (B < E) :

Bilan    « Créanciers » et « débiteurs » (chiffres de 2014). D’après le site du Global Footprint Network (http://data.footprintnetwork.org/#/) (carte originale cliquable).

        Un pays peut très bien avoir des habitants qui pèsent peu sur l’environnement, mais être « débiteur », car il possède peu de biocapacité. Par exemple, le Rwanda (petit et très peuplé) et l’Afghanistan (montagneux) sont « débiteurs », malgré une empreinte écologique de seulement 0,8 hag par habitant. À l’inverse, le Canada a une forte empreinte écologique par personne (7,8 hag), mais aussi d’immenses forêts, ce qui en fait un « créancier ».

        Les « débiteurs » vivent donc à crédit auprès des pays « créanciers » … et des générations futures !

 

Le « jour du dépassement »

        Comme on peut le voir sur la carte, l’aspect « créancier » et « débiteur » est exprimé en pourcentage.

        Pour rendre cette donnée plus « parlante », l’ONG[5] Global Footprint Network calcule un « jour du dépassement de la Terre » (en anglais Earth Overshoot Day) (noté J dans ce qui suit), selon cette formule :

        J = (B/E)x365

        (B = biocapacité ; E = empreinte écologique)[6]

        À partir de cette date, le pays concerné à « épuisé » ses ressources renouvelables et devient « débiteur ».

        Les pays « créanciers » n’ont donc pas de « jour du dépassement ». Pour les « débiteurs », la date est d’autant plus proche du début de l’année qu’ils vivent au-dessus de leurs moyens (d’un point de vue écologique).

        La date de l’échéance est calculable à toutes les échelles. Voici l’évolution de la date en question à l’échelle mondiale :

Jours du dépassement    Date du « jour du dépassement » à l’échelle mondiale. Source : http://www.overshootday.org/newsroom/past-earth-overshoot-days/

 

        La notion de « jour du dépassement » est sujette à controverse, notamment parce que la méthode de calcul est relativement simplifiée par rapport à la réalité.

        Si tu veux aller plus loin, chère lectrice, cher lecteur, tu peux calculer la date de ton propre « jour du dépassement ». Si, si, c’est tout à fait possible ! Voici deux adresses pour estimer ton empreinte écologique : https://www.je-protege-ma-planete.fr/ ; http://www.footprintcalculator.org/ (page du Global Footprint Network).

        Petite astuce pour réduire l’empreinte en question : manger mieux et bouger mieux (entre autres) !



Notes et références

[1] Source : « "Jour du dépassement" : l'Union européenne aura épuisé vendredi ses ressources naturelles pour l'année », France Info, 9 mai 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/jour-du-depassement-l-union-europeenne-aura-epuise-vendredi-ses-ressources-naturelles-pour-l-annee_3435187.html

[2] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à l’empreinte écologique. Disponible à cette adresse :https://fr.wikipedia.org/wiki/Empreinte_écologique

[3] Source (en anglais) : site du Global Footprint Network, page de visualisation des données (de 2014). Disponible à cette adresse : http://data.footprintnetwork.org/#/

[4] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la biocapacité. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocapacité

[5] ONG : organisation non gouvernementale.

[6] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré au « jour du dépassement ». Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jour_du_dépassement


29 avril - 4 mai 2019 : la biodiversité au sommet

        Alerte sur l’arbre du vivant : une espèce coupe la branche sur laquelle elle est assise. Et elle n’y est pas seule !

Arbre du vivant

        Du 29 avril au 4 mai se tient à Paris le sommet sur la biodiversité[1]. Un sommet rendu nécessaire par l’urgence de la situation, qui sera détaillée précisément dans un rapport de 1 800 pages.

        Mais au fait, qu’est-ce que la biodiversité ? Pourquoi la protéger ?

        Puisque les médias parlent de « sixième extinction de masse », c’est également l’occasion d’évoquer les cinq précédentes.

        Mais gardons la tête froide et analysons ceci d’un point de vue plus scientifique.

 

L’IPBES

        Le sommet réunit les membres de la Plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques, en anglais Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, ou IPBES.

        Créée sur le modèle du GIEC et sous l’égide de l’ONU, l’IPBES regroupe des experts dans le domaine de la biodiversité. Chaque État membre de l’ONU peut y participer. Actuellement, 132 États en font partie, les autres ont le statut d’observateurs[2].

Carte IPBES    L’IPBES. En vert foncé : pays membres ; en vert clair : pays observateurs ; hachures bleues : Union Européenne (observateur) ; en blanc : pays non reconnus par l’ONU ou non membres de l’ONU. Fond de carte : https://mapchart.net/detworld.html.

        Objectifs : mieux connaître la biodiversité pour mieux la protéger et l’utiliser de façon durable[3].

        Qu’est-ce donc que la biodiversité ? Pourquoi est-il si important de la préserver ?

 

De l’importance de la biodiversité

        Comme son nom l’indique, la biodiversité est la diversité du vivant sur Terre.

        L’un des indicateurs utilisés pour l’apprécier est le nombre d’espèces. Pour donner une idée de cette diversité, voici les nombres d’animaux, de chromistes[4], de « champignons », de plantes et de protozoaires[5] connues sur terre et dans les océans[6] :

Graphique 1    La biodiversité terrestre : nombre d’espèces d’animaux, de chromistes, de « champignons », de plantes, de protozoaires et d’espèces inconnues (estimées). Les procaryotes (bactéries, archées[7]) ne sont pas pris en compte. D’après Mora et al.

Graphique 2    La biodiversité océanique : nombre d’espèces d’animaux, de chromistes, de « champignons », de plantes, de protozoaires et d’espèces inconnues (estimées). Les procaryotes (bactéries, archées) ne sont pas pris en compte. D’après Mora et al.

        Même en ne tenant pas compte des bactéries et des archées, on peut constater que les scientifiques sont très loin de connaître toutes les espèces présentes sur notre chère planète bleue ! Elles ont pourtant toutes un rôle à jouer.

        Il existe 3 façons de considérer la valeur de la biodiversité[8].

        D’un point de vue moral, on peut estimer que c’est un devoir pour l’humanité de la préserver.

        On peut aussi voir la biodiversité comme un patrimoine à conserver.

        Enfin, elle peut également être perçue comme un « gisement » de ressources et de services dans lequel l’Homme peut piocher. Exemple de « menus services » rendus : les écosystèmes de mangrove qui atténuent les effets dévastateurs des cyclones, les molécules actives régulièrement dénichées dans des organismes récemment découverts et potentiellement utilisables comme médicaments, la purification de l’air et de l’eau, les vers de terre qui aèrent et enrichissent le sol, les insectes qui pollinisent les plantes, et j’en passe ! Des « services écosystémiques » dont la valeur a été estimée à 125 000 milliards de dollars pour l’année 2011[9] ...

        Et malgré cela, la biodiversité est menacée.

 

La sixième extinction massive ?

        Est qualifié d’« extinction massive » un épisode relativement bref (quelques millions d’années[10]) au cours duquel au moins 75% des espèces terrestres et marines disparaissent[11]. La Terre a par le passé déjà connu 5 crises de ce genre, qui marquent toutes des limites importantes en géologie :

  • extinction Ordovicien-Silurien (-445 millions d’années) ;
  • extinction Dévonien-Carbonifère (3  épisodes de -375 à -360 millions d’années) ;
  • extinction Permien-Trias (-252 millions d’années) ;
  • extinction Trias-Jurassique (-201 millions d’années) ;
  • extinction Crétacé-Paléogène (-66 millions d’années).

        L’extinction Crétacé-Paléogène est la plus « célèbre » : c’est elle qui a entraîné la quasi disparition des dinosaures. La crise Permien-Trias est la plus radicale, avec 95% d’espèces marines et 70% d’espèces terrestres disparues.

        Les causes sont diverses et variées : volcanisme particulièrement massif (Permien-Trias), impact d’astéroïde (Crétacé-Paléogène), changement climatique, baisse du niveau des mers (Ordovicien-Silurien) … Les causes peuvent même se combiner : à la fin du Crétacé, l’éruption des trapps[12] du Deccan a affecté le climat, avant que l’impact de Chicxulub ne « termine le travail ».

        Notons également la crise de la « Grande Oxydation », il y a 2,4 milliards d’années : les bactéries anaérobies ont été « empoisonnées » par l’accumulation d’oxygène[13], faute de fer (qui jusque là l’absorbait). Il ne reste de cet épisode que de monstrueux dépôts de fer rubané[14]. Pas beaucoup de fossiles à se mettre sous la dent, la vie étant à l’époque uniquement bactérienne.

Fer rubané    Morceau de fer rubané. Auteur de la photographie : D. Mollex. Source de l’image : https://lithotheque.ens-lyon.fr/Lithotheque/FormRech/page.php?recup=SA03

        La crise actuellement traversée par la biodiversité est a priori inédite par sa cause : elle est due à l’activité d’une seule espèce (la nôtre) ! Exploitation des ressources jusqu’à épuisement, destruction et fragmentation des écosystèmes, pollutions en tout genre, couche d’ozone trouée, émissions immodérées de gaz à effet de serre (et les bouleversements climatiques qui vont avec), auxquels on peut également ajouter l’épée de Damoclès que représentent les arsenaux nucléaires : l’humanité ne fait pas grand-chose pour préserver la biodiversité[15]. À part éventuellement en garder quelques minuscules morceaux dans des parcs et réserves encore trop rares …

 

        Plutôt que de verser dans le larmoyant avec des photos d’animaux en voie de disparition trop mignons, je préfère conclure sur des moyens qui te permettront, chère lectrice, cher lecteur, d’agir à ton niveau pour donner un coup de pouce à la biodiversité. Pas la peine de faire de plagiat, il y a quelques idées sur cette page Web du département de l’Ain : https://www.ain.fr/solutions/preserver-favoriser-biodiversite/. Ces quelques gestes, plus une consommation responsable, ça devrait déjà aider un peu …

 

 

Notes et références

[1] Source : « Sommet historique à Paris pour évaluer l'état de la destruction de la biodiversité », France Info, 29 avril 2019. Disponible à cette adresse : https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/biodiversite/sommet-historique-a-paris-pour-evaluer-l-etat-de-la-destruction-de-la-biodiversite_3420577.html

[2] Source (en anglais) : site Web de l’IPBES. Disponible à cette adresse : https://www.ipbes.net/

[3] Source (en anglais) : site Web de l’IPBES. Disponible à cette adresse : https://www.ipbes.net/members

[4] Chromistes : groupe un peu fourre-tout qui regroupe nombre d’ « algues brunes ». Classification remise en cause. Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré aux chromistes. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Chromista

[5] Protozoaires : organismes constitués d’1 seule cellule à noyau.

[6] Source (en anglais) : C. Mora , D. P. Tittensor, S. Adl, A. G. B. Simpson, B. Worm, « How Many Species Are There on Earth and in the Ocean? », PLOS Biology, 23 août 2011. Disponible à cette adresse : https://doi.org/10.1371/journal.pbio.1001127

[7] Archées : micro-organismes à 1 seule cellule sans noyau, mais différents des bactéries.

[8] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la biodiversité. Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biodiversité#Intérêt_et_valeur_de_la_biodiversité

[9] Source (en anglais) : Costanza et al., « Changes in the global value of ecosystem services », Global Environmental Change, vol. 26, mai 2014. Disponible à cette adresse : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959378014000685

[10] « Bref » à l’échelle des temps géologiques, plutôt qu’à la nôtre.

[11] Source (en anglais) : Barnosky et al., « Has the Earth’s sixth mass extinction already arrived? », Nature, 3 mars 2011. Disponible à cette adresse : https://www.nature.com/articles/nature09678

[12] Trapp : écoulement massif de lave basaltique.

[13] Un déchet toxique, de leur point de vue.

[14] Source : article de l’encyclopédie en ligne Wikipédia consacré à la « Grande Oxydation ». Disponible à cette adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Grande_Oxydation

[15] Et ce n’est pas forcément mieux en France. Voir la vidéo suivante : « Biodiversité : les chiffres inquiétants du déclin de la faune française », Le Monde, 10 janvier 2019. Disponible à cette adresse : https://www.lemonde.fr/planete/video/2019/01/10/biodiversite-les-chiffres-inquietants-du-declin-de-la-faune-francaise_5407418_3244.html